2017, l’année où la chaîne de blocs est devenue une priorité dans divers secteurs

© IBM
Pieter Van Nuffel Journalist DataNews

Cette année, tant des banques, entreprises alimentaires, détaillants que des firmes énergétiques ont mis en oeuvre des projets-pilotes sur base de la technologie ‘blockchain’. Cette nouvelle technologie va-t-elle modifier fondamentalement leur façon de faire ou ne sera-t-elle qu’une vogue éphémère?

La chaîne de blocs devient l’une des top-priorités. Voilà ce qu’ont affirmé cette année les chefs d’entreprise belges dans le cadre de l’enquête de Beltug. C’est assez étonnant dans la mesure où il y a un an, cette technologie ne figurait même pas dans la liste des priorités. Et les travailleurs qui peuvent intégrer une expertise en technologie blockchain à leur CV, peuvent aujourd’hui compter sur un vif intérêt de la part des employeurs. Cela en dit long sur la percée de la chaîne de blocs cette année, du moins dans les esprits.

Le principe sous-jacent à la chaîne de blocs est connu depuis assez longtemps déjà: un réseau d’ordinateurs tient à jour dans une sorte de comptabilité ouverte toutes les transactions en ‘blocs’. Ceux-ci sont cryptés, signés numériquement et regroupés dans une chaîne. Il n’est alors plus possible d’y changer quoi que ce soit car cela modifierait l’ensemble de la chaîne et cela serait remarqué par tous les participants dans le réseau. En d’autres mots, il n’y a plus besoin d’une autorité centrale pour garantir la fiabilité des transactions.

La chaîne de blocs

  • C’est un réseau sans gestionnaire central ou instance de contrôle
  • Chaque participant de la chaîne ajoute de l’information qui est stockée et transférée en blocs
  • Chaque bloc reçoit une étiquette et contient des infos codées sur toutes les autres transactions
  • Tous les participants du réseau contrôlent et valident en permanence l’information ajoutée
  • Il n’y a pas de registre central de toutes les transactions, et le journal de bord est réparti sur le réseau. Aucun participant ne possède toutes les informations
  • Les erreurs ou la fraude sont directement remarquées par tous les participants

Voilà pour la théorie, mais celle-ci n’a précédemment encore été mise en pratique qu’au compte-gouttes par les services IT des entreprises. Jusqu’il y a peu en effet, ceux-ci devaient eux-mêmes se plonger dans le code sous-jacent, par exemple via hyper ledger, un projet open source de la Linux Foundation. Les choses ont cependant bougé cette année, lorsqu’IBM en a lancé une première application commerciale, une sorte de service cloud public.

C’est ainsi que le géant technologique a créé par exemple un réseau blockchain pour KBC et six autres banques européennes. Le réseau a comme but de relier directement entre elles les parties concernées lors de transactions commerciales. Un groupe d’entreprises alimentaires et de détaillants, dont Dole, Nestlé, Unilever et Walmart, ont également collaboré avec BM. Voilà ce qu’il a annoncé juste après la crise du fipronil de cet été: un réseau blockchain devrait désormais pouvoir suivre la chaîne de distribution alimentaire mondiale et ainsi améliorer sa sécurité, telle est l’idée. Des firmes énergétiques et des banques se sont elles aussi unies pour numériser et rendre plus efficientes les transactions énergétiques via la chaîne de blocs.

Dans notre pays, le secteur du diamant anversois et la Fédération des notaires entre autres annoncèrent la mise en oeuvre de projets-pilotes sur base de la chaîne de blocs. Le secteur logistique, à présent encore souvent aux prises avec pas mal de paperasserie administrative, a également montré son intérêt. C’est ainsi que dans le port d’Anvers, un projet-pilote a vu le jour pour le traitement de containers avec la technologie de la chaîne de blocs.

La nature décentralisée de la technologie, qui rend superflus les intermédiaires et une autorité centrale, est manifestement toujours plus prisée par les entreprises dans de plus en plus de secteurs. Mais elle menace du coup l’existence même d’autres firmes ou organisations – comme les instances qui délivrent les certificats. Voilà pourquoi il fut d’autant plus étonnant que même une instance de certification décida cette année de rendre elle-même directement disponibles via la chaîne de blocs tous les certificats qu’elle avait auparavant délivrés.

Vogue?

Les spéculations sur le bitcoin et sur les autres monnaies numériques vont de pair avec un accroissement de l’intérêt pour la chaîne de blocs, la technologie qui en est à la base. Il en résulte que la chaîne de blocs est de plus en plus ouvertement présentée comme la nouvelle technologie révolutionnaire. Un parallèle est du reste souvent fait avec l’avènement d’internet. Mais lorsque dans les années 90, des entreprises internet furent massivement créées, leur impact fut surestimé au début, après quoi la bulle internet éclata. Tout comme internet, la chaîne de blocs est probablement soumise à la loi d’Amara: nous avons tendance à surestimer à court terme l’impact de la nouvelle technologie, et à le sous-estimer à long terme.

En témoigne par exemple le fait que cette année, des tas d’entreprises clamèrent subitement vouloir faire ‘quelque chose avec la chaîne de blocs’, parfois purement pour donner un coup de fouet à leur valeur boursière. Et en général, cela marchait. C’est ainsi que l’entreprise internet britannique On-line Plc a vu le cours de son action grimper directement de 394 pour cent, après qu’elle ait annoncé sa nouvelle appellation: ‘On-line Blockchain Plc’. De même, l’action de l’entreprise biotech américaine Bioptix enregistra un doublement de sa valeur, lorsqu’elle annonça vouloir s’appeler ‘Riot Blockchain’. Et récemment, même le fabricant de boissons Long Island Iced Tea fit changer son nom en ‘Long Blockchain‘. La direction du producteur de thé glacé annonça à cette occasion vouloir simplement rechercher des ‘opportunités liées à la technologie de la chaîne de blocs’, mais cela suffit pour que sa valeur boursière grimpe en flèche.

Il est par conséquent sensé de garder à l’esprit que quasiment tous les projets blockchain se trouvent actuellement encore dans une phase de ‘preuve de concept’. Il est cependant intéressant d’observer l’intérêt accordé par différents secteurs et les nombreuses expérimentations mises en oeuvre en la matière, ce qui nous permet de dire que nous connaissons une période captivante. Mais quant à savoir si ces projets-pilotes apporteront à court terme effectivement une valeur ajoutée, on le verra en 2018 (voire ultérieurement).

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