Des entreprises technologiques du sexe protestent contre les règles publicitaires de Facebook
Deux jeunes entreprises dans le secteur ‘sex tech’ lancent une campagne, par laquelle elles veulent passer en revue la double moralité dont font preuve Facebook et d’autres plates-formes publicitaires.
‘Sex sells’ (le sexe fait vendre): tel est le slogan, mais qui ne s’applique généralement qu’à ce qu’on appelle les ‘bikini babes’. La double moralité présente dans les règles appliquées par les plates-formes publicitaires fait en sorte que les annonces en faveur des accessoires sexuels pour hommes, comme les pilules combattant les problèmes d’érection, sont assez aisément publiées, alors que les annonces similaires visant les femmes, les transsexuels et les personnes ne se conformant pas à un sexe spécifique éprouvent plus de difficultés. Telle est l’idée sous-jacente à une campagne initiée par deux startups de l’industrie de la technologie du sexe, Unbound et Dame.
Comme pour y donner plus d’intensité encore, elles ont démarré un site web, Approved, Not Approved, sur lequel il est possible de participer à un mini-quiz et où l’on peut soi-même tenter de deviner les annonces qui transgressent ou non les règles de Facebook et des autres géants publicitaires. Les annonces mettant en scène un homme à demi-nu pour vanter les mérites d’un médicament contre les problèmes d’érection, semblent par exemple être facilement publiables (pour des raisons de ‘santé’), alors que des annonces similaires montrant une femme entièrement vêtue et renvoyant à un site de conseils en matière sexuelle, sont censurées (en raison de leur ‘connotation sexuelle’).
Selon les startups, les règles appliquées par Facebook, l’une des principales plates-formes publicitaires au monde, bénéficient surtout aux produits qui intéressent les hommes, alors que le même genre de produit ciblant les femmes, et surtout le plaisir sexuel de celles-ci, est considéré de manière nettement plus stricte.
Rester sage
Dans ses règles, Facebook interdit les publicités en faveur des produits et services sexuels, sauf s’il s’agit de contraception ou de planning familial. Les problèmes d’érection et les produits pour la libido y sont tout juste acceptés aussi, mais pas les petits appareils vibrants. “Facebook ne considérera jamais le plaisir sexuel comme quelque chose de nécessaire, car seule la fonctionnalité du produit est jugée nécessaire”, déclare Alexandra Fine, CEO de Dame Products, au site technologique TechCrunch. “Et comme cette fonctionnalité n’est importante que pour un des deux sexes, nous en sommes réduits à ne promouvoir que du ‘mauvais’ sexe ou à tout le moins du sexe partial.”
“Nous en sommes réduits à ne promouvoir que du ‘mauvais’ sexe ou à tout le moins du sexe partial.”
Facebook, devant le siège de laquelle les startups ont également organisé une protestation de rue cette semaine, déclare continuer de communiquer avec les entreprises à propos de ses règles. Reste à savoir si cela va faire changer les choses. “Je pense que beaucoup d’entre nous se sentent muselés par ces plates-formes, surtout parce qu’elles contrôlent une tellement grande partie d’internet”, affirme Polly Rodriguez, CEO de la startup Unbound, à Techcrunch. “Facebook, Instagram, Pinterest, ce sont les canaux où les jeunes entreprises doivent trouver leurs clients. […] Or si nous ne pouvons pas y faire de la publicité, nous avons un gros problème.”
Pour lui et pour elle
La technologie du sexe, des produits spécialisés aux rythmes programmables menant au plaisir sexuel jusqu’aux jeux IoT, est en train d’effectuer une solide percée, mais elle n’a pas encore trouvé sa place dans l’industrie en général. Les publicités en la matière, surtout celles qui ciblent les femmes, tombent souvent dans une catégorie, selon laquelle elles peuvent être considérées par d’aucuns comme relativement innocentes ou de bon goût, comme les annonces Durex, alors qu’elles seront toujours tabous pour d’autres.
Les entreprises elles-mêmes vont toujours plus souvent protester contre cette dissension. Si des chaînes de restauration rapide sont autorisées à promouvoir leurs hotdogs au moyen d’images à caractère sexuel à peine voilé, une publicité subtile pour un vibrateur peut l’être aussi. Dans ce style.
La difficulté de leur démarche a déjà été mise en évidence en janvier au CES, le grand salon technologique organisé à Las Vegas, où un petit jeu de l’entreprise ‘sex tech’ Lora DiCarlo provoqua l’émoi. C’est qu’il avait remporté un prix de l’innovation, qui lui fut retiré par la suite, parce que le produit serait ‘immoral’. Une idée idiote pour un salon qui, jusqu’il y a peu, regorgeait de ‘booth babes’ et de porno VR. En mai, l’entreprise se vit de nouveau décerner la récompense. “On ne parle que rarement d’une telle victoire, qui n’a été du reste rendue possible que parce que la presse y a accordé de l’attention”, prétend Polly Rodriguez. Tout semble donc indiquer que les femmes appliquent une seule et même stratégie durant la campagne qu’elles mènent.
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