Bram Vromans

La bataille est engagée dans le secteur télécom

Bram Vromans Country Digital Manager IKEA Belgique, professeur à la KU Leuven, mentor chez Startit@KBC et Ambits.

Dans cette opinion, Bram Vromans donne sa vision personnelle de la façon dont le secteur télécom pourrait évoluer à brève échéance. Sur ce marché aussi, tout comme par exemple dans le secteur énergétique, de grands acteurs (internationaux) se bousculent pour conclure un contrat lucratif avec le client final.

Actuellement, il y a 402(!) opérateurs télécoms reconnus par l’IBPT actifs sur le marché belge. Certains n’opèrent que sur le marché B2B ou B2C, alors que d’autres s’activent sur les deux. Je me focaliserai ici uniquement sur le marché B2C où sont présents des noms aussi connus que Proximus, Telenet, Orange Belgium, Voo,… Plusieurs d’entre eux possèdent diverses marques dans leur portefeuille – pensons à Telenet (Base, Tadaam) et à Proximus (Scarlet, Mobile Vikings).

Outre les produits commodity tels les abonnements téléphoniques (mobiles), internet et TV, de préférence vendus sous forme de packs, les acteurs sur ce marché tentent de se diversifier en proposant des services (payants) connexes. Je distinguerai sept domaines:

  • La vente de matériel, subsidiée ou non par la souscription d’un abonnement: smartphones, montres connectées, tablettes, TV intelligentes, consoles de jeu, boosters wifi.
  • La réparation des appareils en dehors de la période de garantie.
  • Du contenu payant supplémentaire: loisirs (Streamz, Netflix, Disney+), chaînes sportives et canaux érotiques.
  • Smarthome: sonneries de porte intelligentes avec ou sans caméra, boîte à colis connectée.
  • Sécurité: protection d’appareils contre les cyber-menaces.
  • Formation: travail avec le smartphone, modification des paramètres mail, etc.

Tout comme dans le secteur de l’énergie, il existe des comparateurs de prix en ligne, tels Mesfournisseurs.be, Test Achats et Montelco.be. Leur succès est cependant nettement inférieur, parce qu’il est moins facile de changer d’opérateur. Et ce, du fait que souvent, une installation doit avoir lieu physiquement et/ou du matériel doit être changé. Tel n’est pas le cas dans le secteur de l’énergie, où on peut changer virtuellement tout. De temps à autre, on voit bien apparaître une tentative d’achat groupé, mais sans grand succès jusqu’à présent par manque de fournisseurs à bas prix.

Que se passerait-il si un puissant acteur décidait prochainement de regrouper le gaz, l’électricité et les produits télécoms en un seul et même pack?

Contrairement à d’autres secteurs, comme le rail ou le secteur de l’énergie, la propriété du réseau n’est pas (encore) obligatoirement dissociée des services qui y sont proposés. Quelques acteurs en vue dominent la tarification. Il en résulte que les prix et les marges sont relativement élevés en général, ce qui n’empêche pas qu’il y ait encore des synergies possibles dans le support, les systèmes IT et/ou les installations. Il est malaisé pour un nouvel acteur de démarrer, parce qu’il est de toute façon dépendant du réseau des acteurs dominants et doit donc s’acquitter de prix de gros régulés qui, malheureusement – comme on peut le deviner – ne sont pas bon marché. Les investissements permettant de développer un réseau ou de l’amplifier sont évidemment à l’avenant.

Qu’est-ce que cela pourrait donner à l’avenir? Je vous soumets ci-après quelques pistes de réflexion:

  • Que se passerait-il si les pouvoirs publics décidaient de dissocier complètement le développement et la gestion du réseau des services qui y sont proposés?
  • Que se passerait-il si le régulateur réduisait sensiblement les tarifs de gros régulés?
  • Que se passerait-il si un puissant acteur d’énergie/télécom décidait prochainement de regrouper le gaz, l’électricité et les produits télécoms en un seul et même pack?
  • Que se passerait-il si des détaillants proposaient (de nouveau) les produits télécoms comme des produits de base à leurs clients?
  • Que se passerait-il si des comparateurs de prix ou des achats groupés s’imposaient vraiment? Peut-être en proposant un service supplémentaire afin de soulager l’utilisateur final d’un échange à cent pour cent?
  • Que se passerait-il si je vous proposais l’internet gratuitement ou à prix avantageux en échange du droit sur toutes vos données? Un certain nombre d’entre nous y semblent prêts.
  • Que se passerait-il si un nouvel acteur pouvait se procurer des licences 5G et parvenait ainsi à proposer des produits comparables à ceux des acteurs traditionnels? Le futur consommateur aura-t-il vraiment besoin d’autre chose encore qu’une connexion mobile à plusieurs appareils intelligents?

Est-ce là une réflexion trop lointaine? Oui et non. Aujourd’hui déjà, il y a des acteurs en Australie qui proposent l’énergie et les télécoms en un même pack exhaustif (AGL, Dodo, Sumo). Au moment d’écrire ces lignes, la Corée du Sud, la Chine et le Japon déploient respectivement des réseaux 5G nationaux et urbains. La bataille est engagée.

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