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Que se passe-t-il chez Intel?

Pat Gelsinger, CEO Intel © Getty Images
Els Bellens

La semaine dernière, Intel a supprimé 15.000 emplois et suspendu le versement de dividendes aux actionnaires. Ceux-ci ont réagi en vendant massivement leurs actions, ce qui a entraîné l’une des plus fortes chutes boursières jamais enregistrées par l’entreprise. Que se passe-t-il réellement là-bas?

Les choses ne vont pas très bien pour Intel. Après un trimestre décevant, l’entreprise souhaite économiser une dizaine de milliards de dollars, afin de faire face aux tempêtes financières actuelles (et à venir). Les 15.000 licenciements sont une tentative pour y arriver, mais cela ne suffit clairement pas à apaiser les actionnaires. La valeur boursière d’Intel Corp. a connu vendredi son plus net recul depuis plus de 40 ans, avec une perte de 26 pour cent à la clé.

A la traîne

Cette situation financière a plusieurs causes. Primo, Intel a rencontré quelques problèmes techniques ces dernières années. C’est ainsi qu’on a recensé des erreurs dans certaines séries de processeurs desktop Gen Core. L’entreprise a donc dû étendre la garantie de ses puces PC Raptor Lake de trois à cinq ans. Secundo, la production de puces 10 nm a également connu des retards importants, il y a quelques années, ce qui a impacté les livraisons et causé une certaine perte de réputation.

Dans la pratique, Intel est en outre actuellement considérée comme une entreprise à la traîne par rapport à la technologie actuelle. Le géant technologique a pu s’appuyer pendant des années sur sa position de principal développeur de puces américain, mais a vu son image se ternir quelque peu ces dernières années et a perdu quelques clients importants.

Apple, par exemple, a été l’un des principaux acheteurs de puces Intel pendant de nombreuses années, mais elle s’est mise il y a quatre ans à développer ses propres puces basées sur l’architecture ARM. L’Apple Silicon s’est désormais imposée, et Intel se rend compte qu’Apple ne fera pas son retour dans l’immédiat. Ces rentrées sont donc perdues.

Par ailleurs, un autre géant technologique, Microsoft, s’est également tournée vers la concurrence pour certains de ses PC. Les nouveaux appareils Surface de Microsoft tournent par exemple sur des puces Qualcomm. Intel développera certes à l’avenir de nouvelles puces d’IA en collaboration avec Microsoft , mais c’est pour demain et pas à présent.

Nouvelle branche en plein démarrage

Tout cela signifie que pour l’instant, l’entreprise voit ses chiffres stagner. Là où Intel dominait autrefois en tant que développeur de puces, AMD, Qualcomm et surtout Nvidia ont conquis des parts de marché au cours des deux dernières années avec de toutes nouvelles puces d’IA. Pat Gelsinger, CEO d’Intel, tente de redresser la barre depuis un certain temps, mais il s’agit là d’un processus de longue haleine, alors qu’Intel s’était jusqu’à présent surtout occupée à renforcer ses fondations.

L’entreprise a consenti d’énormes investissements dans de nouveaux secteurs d’activité et dans de nouvelles usines ces dernières années, y compris en Europe. Parallèlement, Intel continue de se tourner vers un nouveau rôle de ‘Foundry’, par lequel elle va fabriquer des puces pour des tiers. Intel Foundry Services est ainsi devenu une nouvelle branche encore en plein démarrage. Ce sont donc surtout des investissements d’avenir, qui ne rapportent pas encore grand-chose.

Panique sur le marché

Il n’est donc guère surprenant qu’Intel affiche une perte pour ce trimestre. L’entreprise avait précédemment déjà prévenu à ce sujet. Une perte de chiffre d’affaires est plus durement ressentie, et les pertes d’emplois sont également affolantes, surtout quand on sait qu’Intel avait déjà licencié 5 pour cent de ses effectifs l’année dernière. Intel reste cependant une entreprise gigantesque occupant plus de 100.000 employés.

Le fait qu’elle soit à présent si sévèrement punie, est dû en partie à ces pertes, mais aussi à une panique un peu plus profonde sur les marchés boursiers après des rapports selon lesquels moins d’emplois auraient été créés l’année dernière aux Etats-Unis par rapport aux prévisions initiales. Cette reprise économique en demi-teinte entraîne désormais un recul des marchés boursiers dans le monde entier. Pour Intel, cela va désormais de pair avec une solide atteinte à sa valeur boursière.

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