” On a besoin de quelqu’un qui remarque son talent “

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Une carence de modèles féminins à suivre, des différences salariales et des possibilités de croissance inégales sont les principaux obstacles à surmonter pour les femmes dans l’IT, comme il ressort d’une étude effectuée par l’association technologique ISACA. Data News a demandé à Giselle Vercauteren, CEO de Sirus, et à Agnieszka Kosna, active dans la cyber-sécurité, ce qu’elles pensaient de ces obstacles.

Dans le secteur technologique, les femmes sont sous-représentées dans le monde entier. D’une étude réalisée par l’ISACA, il apparaît que les femmes dans l’IT doivent vaincre plusieurs obstacles. Les cinq principaux sont le manque de mentors, les préjugés vis-à-vis de la gent féminine, une carence de modèles féminins à suivre, les possibilités de croissance inégales et les différences salariales. Giselle Vercauteren, CEO de Sirus, explique avoir également rencontré ces obstacles durant ses 28 ans de carrière, mais qu’ils ne sont pas uniquement liés au fait d’être une femme.

Mentor senior

Le manque de mentors est un gros problème, selon Giselle Vercauteren. ” On a besoin de quelqu’un qui remarque votre talent, qui ne se sent de ce fait pas menacé et qui vous tire vers le haut. Durant ma carrière, j’ai eu quelquefois la chance d’avoir un mentor à mes côtés, et cela fait toute la différence. Le mentor ne doit pas forcément être une femme. Dans mon cas, il s’agissait souvent d’hommes disposant d’une grande expérience, d’un réseau étendu et d’une fonction supérieure. Jusqu’à aujourd’hui, ce sont surtout les hommes qui occupent des fonctions élevées. Il leur appartient donc d’endosser le rôle de mentor pour le jeune talent. ” Lorsque Giselle Vercauteren travaillait chez Volvo, son mentor de la direction suédoise libérait chaque semaine une heure de son temps pour la coaché. ” Il m’a appris divers trucs et astuces : par exemple la façon de se préparer pour une réunion stratégique, le type d’information à y présenter et comment, … Il est important de rencontrer quelqu’un qui vous fait confiance. ”

Giselle Vercauteren a trouvé en Belgique des modèles féminins à suivre, comme Martine Tempels et Saskia Van Uffelen. Lorsqu’elle travailla comme consultante en gestion pour une entreprise d’énergie dans notre pays, le CIO était un mentor actif. ” L’approche de la gestion d’exploitation pour quelques centaines d’employés m’ouvrit les yeux sur le plan de la structure et de l’autodiscipline. Cela aide, lorsqu’un mentor veut vous introduire dans son réseau et ainsi vous aider à progresser. ”

Voyage passionnant

Agnieszka Kosna, active dans la cyber-sécurité et membre du comité exécutif de l’ISACA, regrette que le sujet – les femmes dans l’IT – soit souvent abordé au départ d’un problème. En tant que femme dans le secteur IT, elle n’a que des expériences positives. Elle considère la diversité surtout comme une opportunité. ” Tant les hommes que les femmes, qui apprennent à connaître un domaine technique, doivent se focaliser sur les possibilités et pas sur les préjugés ou les problèmes. Si on ne se concentre que sur les aspects négatifs, on passe à côté et on est limité dans sa vision, explique Agnieszka Kosna. Dans ce domaine en évolution constante, il faut avoir un fort désir d’apprendre, d’être flexible et de s’adapter continuellement. ” Lorsqu’elle voulut se lancer dans la cyber-sécurité, elle ne connaissait dans son environnement immédiat personne qui travaillait dans ce domaine. ” Je n’avais pas non plus de réseau, déclare Agnieszka Kosna. Je ne considérai toutefois pas cela comme un frein, mais bien comme un point de départ pour mener ma propre recherche. ” C’est pourquoi elle se tourna vers l’ISACA et fut la première étudiante à en devenir membre. ” Grâce aux événements organisés par l’ISACA, j’appris à connaître non seulement des personnes intéressantes, mais cela étoffa aussi ma connaissance. Il est important d’être proactif et de rechercher soi-même des opportunités. Pour moi, il s’agit là d’un voyage passionnant. Trouver un mentor ou un modèle à suivre, ce n’est du reste pas le propre des femmes, mais de tout un chacun qui désire progresser dans un domaine déterminé. ”

Peu de cadeaux

Giselle Vercauteren, elle, s’est tracé son chemin toute seule et a gravi les échelons de programmeur à analyste, puis cheffe de projets, program manager, unit manager et à présent CEO de l’éditeur Sirus et présidente d’ISACA Belgique. ” On ne m’a guère fait de cadeaux, mais cela vaut pour pratiquement tout un chacun qui désire évoluer de ses propres forces, que l’on soit un homme ou une femme. ” Elle ne souhaite pas non plus se plaindre de son salaire. Elle a certes l’une ou l’autre fois été frapper à la porte directoriale, lorsqu’elle gagnait trop peu en comparaison avec un collègue ou pair. ” Il faut oser se faire entendre. ”

Elle confirme qu’il existe bien sur le lieu de travail des préjugés, qui font qu’une femme y est moins écoutée, mais elle constate aussi qu’il y a plusieurs façons sensées de s’en accommoder. ” Lorsque vous voulez qu’on vous prête l’oreille lors d’une réunion, tout est dans votre préparation. Ici aussi, c’est un conseil qu’on m’avait prodigué au siège central de Volvo : si vous venez avec des arguments et une vision claire, on vous écoutera et vous vous distinguerez. En tant que femme, il faut parfois en faire plus. On a besoin d’une culture d’entreprise ou d’organisation aspirant à une égalité des sexes, pas seulement en paroles, mais aussi en actes. ”

Inspirer

Giselle Vercauteren souhaite elle-même être un modèle à suivre et inspirer surtout les jeunes femmes. Car elle distingue une évolution négative. ” Dans mon orientation scolaire, on était 30 % de filles. Or à présent au niveau des bacheliers et des masters en informatique, on ne dépasse plus les 10 %. Ma fille adolescente aime les sciences et les mathématiques, mais elle a été confrontée à l’école primaire à une image de la société qui était assez partiale et qui donnait l’impression qu’il y avait encore des professions pour les femmes et pour les hommes. ” Giselle Vercauteren souhaiterait militer pour attirer davantage de filles vers les études technologiques. Lors de congrès internationaux, elle lance, là où c’est possible, un appel aux personnes présentes. ” Lorsque je demande qui a eu le courage ou qui a pensé à emmener une jeune collègue talentueuse, personne ne lève la main. Une fois que vous occupez une position spécifique ou que vous disposez d’un puissant réseau, cela peut se faire à chaque occasion. Cela permet d’introduire de la diversité dans les réseaux, et les femmes aboutissent plus rapidement à des postes-clés. Voilà ce qui fait la différence entre soutenir quelque chose par des paroles et agir effectivement. ”

Agnieszka Kosna n’est active que depuis deux ans dans l’IT, mais grâce à diverses opportunités, elle a pu entrer en contact avec des personnes de qualité. La chance s’est accumulée en ce qui me concerne, selon elle. ” De par mon travail – stagiaire en gestion chez Proximus et membre du comité exécutif de l’ISACA -, j’ai pu exercer plusieurs fonctions. En outre, j’ai été également assistante à l’université, où je coachais des étudiants en master dans leurs projets axés sur la cyber-sécurité. Et j’ai fait du bénévolat dans deux événements destinés à promouvoir la technologie chez les enfants. ” Elle croit fermement dans des initiatives qui éveillent l’intérêt pour la technologie et ce, dès le plus jeune âge. ” C’était non seulement un boulot agréable, mais aussi tout à fait fondé dans la mesure où on veut ainsi démontrer l’importance de la technologie. Partager une aptitude ou une expérience avec d’autres, je trouve cela très enrichissant et valorisant. Ces diverses expériences m’aident à aller de l’avant et contribuent à mon évolution personnelle. “

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