La diversité d’entrée de jeu

Sara Mathijs est cofondatrice et CEO d'UPEO, bureau de consultance spécialisé en Salesforce.

Vous arrive-t-il également parfois de ne pas vous sentir confortable avec une appli? Que tout foire ou n’est pas intuitif? Peut-être l’appli a-t-elle été développée par une personne qui se voyait elle-même comme utilisateur plutôt que vous. Trop souvent, le logiciel n’est pas adapté à un groupe cible censé utiliser l’application. D’où ce plaidoyer en faveur de la ‘diversity by design’.

Les exemples de manque d’empathie de la part d’un concepteur sont légion. Un seul exemple suffit à s’en convaincre: au début de ce siècle, les femmes avaient 47% plus de risques d’être gravement blessées dans un accident de voiture. Un pourcentage qui n’est nullement dû au hasard ou à une mauvaise con- duite: les sièges et les ceintures de sécurité des voitures étaient conçus pour des conducteurs hommes et il faudra attendre 2011 pour utiliser des mannequins femmes lors d’essais de collision.

Cela étant, la diversité ne se limite pas uniquement au sexe, mais couvre aussi la culture, l’âge ou l’origine. Ainsi, nous savons que les systèmes de reconnaissance faciale éprouvent d’énormes difficultés à reconnaître les personnes ayant la peau sombre. Supposez que demain, une voiture autonome ne considère qu’un blanc comme une personne devant laquelle il faut freiner…

Lorsque l’on sait que 92% des programmeurs sont des hommes, faut-il s’étonner que les femmes éprouvent des difficultés à maîtriser un logiciel? Malheureusement, trop peu d’études sont menées sur ce thème. Cela étant, plusieurs études à petite échelle montrent que les femmes réagissent autrement que les hommes aux couleurs et aux structures de menu d’un site web. Et ceci sans parler des daltoniens et des malvoyants qui sont souvent oubliés lors de la conception d’interfaces utilisateur.

Pour ma part, peu importe qu’un homme de n’importe quel âge développe une appli pour de jeunes patients anorexiques. Ou qu’une jeune fille de 16 ans conçoive des outils pour des mécaniciens automobiles. En soi, peu importe la personne qui écrit le logiciel. Mais j’aimerais que le groupe cible concerné soit impliqué dès le début du développement de l’appli, que ce soit dans des groupes de discussion ou en mettant en place des testeurs d’usabilité. Avec comme but de prendre en compte leur feedback et de ne pas partir du principe que les utilisateurs n’ont pas d’autre choix que d’utiliser le programme. Toute idée, utopie ou considération pertinente doit être intégrée dans la méthodologie, l’environnement de travail, la prise de décision, les choix professionnels et les relations humaines. Elles doivent être présentées dès le début du processus et non pas être ajoutées en fonction de la tendance du moment.

Quid si une jeune fille de 16 ans conçoit des outils pour des mécaniciens automobiles?

Certes, les entreprises consacrent d’importants montants à des cycles de changement, afin d’améliorer l’acceptation d’un nouveau logiciel par les utilisateurs. Mais la gestion du changement ne peut être une façade pour un logiciel qui, dès sa conception, n’a pas tenu compte de la diversité du groupe cible. Ecrire un logiciel de qualité sous-entend de considérer les utilisateurs comme une priorité dès l’entame du développement. Sans doute faut-il y mettre le temps et les moyens. Mais le succès sera alors plus rapidement au rendez-vous. Trop souvent, la diversité n’est pas considérée comme prioritaire dans un projet. Or si les concepteurs n’envisagent pas la diversité comme essentielle, structurelle et fonctionnelle, il ne pourra jamais être question de ‘diversity by design’.

Il a fallu des années avant de se rendre compte qu’une mauvaise conception des sièges de voiture coûtait la vie à des femmes. Quid si l’on constate demain qu’un logiciel ne tenant pas compte de la diversité coûtera également des vies? Ne faudrait-il pas mettre dès aujourd’hui tout en oeuvre pour éviter une telle situation?

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