Formation à l’attitude dans le sport et au bureau

Ellen Schouppe. © Carline Vandercruyssen
Melanie De Vrieze Freelance

La manière d’exploiter ses talents et ses compétences est plus importante que le talent lui-même. Du moins selon Ellen Schouppe. “Les exemples du sport doivent inspirer davantage le monde du travail.”

La psychologue du sport Ellen Schouppe propose des formations à l’attitude à des équipes telles que les Belgian Cats ou les Belgian Cheetahs, mais également à des sportifs de haut niveau des Belgian Lions et des Belgian Red Panthers. Elle encadre également des joueurs des Diables Rouges et des jeunes d’Anderlecht. Par ailleurs, elle est depuis peu nommée officiellement psychologue du sport du Team Belgium. “Le talent constitue certes la base du sport, mais il ne s’agit là que d’un début, explique-t-elle. Sans les bonnes attitudes, impossible de réussir des performances de haut niveau.”

Ce n’est pas parce que vous identifiez un haut potentiel parce qu’il a les bons diplômes que celui-ci va vraiment performer.

Pour étudier ce qui caractérise les sportifs de haut niveau – quelle que soit leur discipline – au-delà de leur talent, Schouppe a interviewé 40 sportifs en vue. Dans son modèle, elle distingue 7 attitudes différentes, dont le leadership, la motivation, la force mentale, l’énergie et la créativité. “Le problème avec le terme attitude est qu’il est devenu un concept fourre-tout. Je veux à tout prix m’en distancier. En effet, on entend souvent dire qu’avec une telle attitude, impossible d’y arriver. Une telle affirmation n’aide personne, que ce soit dans la vie professionnelle ou dans le sport. Mais si vous dites à la personne qu’elle joue avec trop de fougue, ce qui met en danger son équipe aux moments clés d’un match, le message est nettement plus clair que cette personne. C’est pourquoi nous avons cherché à décrire très précisément ces 7 attitudes.”

Durant les sessions de coaching individuel, elle apprend aux sportifs de haut niveau différentes techniques comme la visualisation ou la respiration, et leur enseigne la manière de définir leurs objectifs. “Si vous pensez qu’échouer est la pire chose qui puisse vous arriver ou si vous considérez la concurrence comme une menace, nous vous apprenons à remettre en perspective de telles attitude, enchaîne-t-elle. Chaque attitude peut être développée, par exemple en montrant plus d’audace ou à réagir plus rapidement après une défaite, mais il faut comprendre pourquoi vous ne réussissez pas à faire telle chose.”

Ouvert au coaching

L’une de ces 7 attitudes est l’ouverture au coaching, qui constitue la base du développement des autres attitudes. “Si vous n’êtes pas réceptif à l’expertise de votre coach ou si vous n’êtes pas disposé à apprendre de nouvelles choses, non seulement vous mettez en danger l’ensemble de l’équipe, mais nous ne grandissez pas non plus comme individu.”

De même, le leadership est une attitude primordiale. Celui qui veut être un leader pour les autres doit d’abord être un bon leader pour lui-même. “Cela exige beaucoup de connaissance de soi, explique encore Ellen Schouppe. Savoir ce qui peut vous déstabiliser à certains moments, connaître les pensées ou les émotions qui peuvent avoir un effet négatif sur vos performances et apprendre à les transformer de manière positive. Tant dans le sport de haut niveau que dans le monde du travail, les meilleurs leaders sont ceux qui font preuve d’empathie. Ce leadership émane des collaborateurs qui sont encadrés, des personnes qui sont sous son autorité. Et il s’agit de savoir vraiment ce dont ils ont besoin pour prester au plus haut niveau. Comment puis-je adapter son style de leadership pour qu’il soit unique pour chaque collaborateur ou sportif?”

Par ailleurs, la créativité doit être une priorité pour les sportifs de haut niveau. Ceux-ci osent être eux-mêmes et sont moins conformistes que les autres. “La confiance en soi ne naît que s’il l’on connaît les limites intérieures et extérieures de sa zone de confort. Je suppose que les femmes qui sont nommées dans le cadre de She Goes ICT sont sorties à un moment ou un autre de leur zone de confort et ont ainsi connu un développement personnel intéressant.”

Enfin, Ellen Schouppe insiste sur la force mentale. “A certains moments, il peut arriver que votre supérieur ne reconnaisse pas vos talents. Il est alors important de faire preuve de force mentale. La manière de faire face à l’échec fait toute la différence. Les personnes qui affichent une force de résistance mentale sont des personnes qui ont été mises en déséquilibre ou sorties de leur zone de confort et qui parviennent à rétablir rapidement l’équilibre en gérant leurs idées et leurs émotions. Elles acceptent la situation et se focalisent sur la progression, mais pas la perfection.”

Et de faire référence au joueur de hockey Alexander Hendrickx qui avait reçu un coup de stick sur la tête et avait subi un important traumatisme crânien et qui en avait gardé une cicatrice importante. “A la suite de ce choc, il se sentait clairement diminué sur le plan physique. A partir de ce moment-là, il aurait pu ne plus être au meilleur de sa forme, mais en acceptant la chose, il est parvenu à retourner la situation pour atteindre son objectif ultime: conquérir la médaille d’or olympique avec son équipe. Finalement, il a été l’un des meilleurs joueurs, tout simplement en acceptant sa situation.”

Elargir son horizon

Toujours selon Schouppe, les entreprises n’accordent pas suffisamment d’attention aux attitudes. A l’en croire, les entreprises s’intéressent surtout au talent et aux prestations pour identifier les performeurs uniques. “Ce qui fait souvent défaut, c’est une troisième dimension, sans doute la plus importante: qu’est-ce que les gens font avec leur talent? Il ne suffit pas en effet d’avoir du talent, ce sont les attitudes qui sont importantes. Ce n’est pas parce que vous identifiez un haut potentiel parce qu’il a les bons diplômes que celui-ci va vraiment performer ou faire la carrière que vous espérez en tant qu’employeur.”

D’ailleurs, les exemples tirés du sport ne trouvent pas encore suffisamment d’écho dans les entreprises, estime encore Schouppe. En effet, les sociétés proposent des formations pour développer les compétences de leurs collaborateurs, alors que le coaching des attitudes est moins mis à l’honneur. C’est pourquoi Schouppe espère que les entreprises apprendront à leurs collaborateurs quelles attitudes sont importantes pour le développement de leurs talents et faire ainsi vraiment la différence. “En adoptant la bonne attitude, il est possible de passer de ‘high potential’ à ‘high performer’. En étant formé et coaché aux attitudes, vous élargissez votre horizon dans l’entreprise. Certes, il existe aussi des collaborateurs qui ont trop peu de talent pour la tâche qu’ils doivent accomplir. Aidez alors ces personnes à identifier leur talent et à les faire évoluer vers une fonction pour laquelle elles ont plus de talent. Les collaborateurs qui ont les bonnes attitudes, mais qui n’ont pas les compétences nécessaires ne doivent pas être mis sur la touche. Si quelqu’un a la bonne attitude, il s’agit d’un collaborateur de qualité.”

Schouppe a notamment coaché des équipes d’Euroclear et de Liantis au niveau des attitudes. “Nous avons travaillé sur des équipes qui étaient bonnes, avaient le potentiel nécessaire, mais qui sont parvenues à mieux performer grâce à notre programme. Toutes les 6 semaines, nous abordions une nouvelle attitude. C’est ainsi que nous avons organisé un atelier sur la formation à l’attitude. Quelle est l’importance à donner et à recevoir du feedback et du ‘feed forward’? Nous avons comparé le processus de feedback au passage de relais des équipes en athlétisme? Lors de la transmission du relais, le risque existe que l’athlète qui le reçoit le laisse tomber. Avec le feedback, c’est la même chose. Beaucoup de personnes craignent de donner du feedback, ne sachant pas la manière dont le message sera reçu ou estimant que la relation avec cette personne pourra devenir plus difficile. C’est pourquoi il est crucial de se former à la manière de donner et de recevoir un message, tout comme les athlètes le font sur la piste. En traçant constamment des parallèles entre le monde du travail et le sport de haut niveau, les deux mondes peuvent apprendre l’un de l’autre.”

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