Orange veut mettre à niveau le réseau de VOO à la vitesse gigabit l’année prochaine
C’est comme si le mariage avait été préparé depuis des années déjà, voilà comment Orange qualifie le tout récent rachat de VOO. L’union va immédiatement de pair avec plusieurs annonces stratégiques pour le groupe, mais surtout aussi pour le réseau câblé qui sera amélioré.
Le mariage repose sur un certain nombre de piliers, dont le plus important est le réseau fixe qu’Orange possède désormais. D’ici le milieu de l’année prochaine, l’entreprise entend pouvoir proposer à 95 pour cent des Belges une vitesse d’1 Gbps. En Flandre et dans certaines portions de Bruxelles, cela se fera via le réseau de Telenet, qui offre déjà cette vitesse depuis peu. Orange proposera en l’occurrence non seulement le coax, mais aussi la fibre optique de Telenet (là où elle est disponible).
Modernisation du réseau câblé de VOO
En Wallonie et dans de grandes porties de Bruxelles, Orange pourra y arriver via le réseau de sa toute nouvelle filiale VOO, mais cela nécessitera aussi une mise à niveau de ce réseau. Le réseau Hybrid Fiber Coax (HFC) sera profondément modernisé pour pouvoir offrir cette vitesse. Concrètement, cela signifie que le réseau sera adapté à la norme Docsis 3.1. Cet ajustement n’exigera (dans la plupart des cas) pas de rénovation du coax, mais bien des interventions techniques dans les nœuds et les fréquences utilisés.
Mais cela ne s’arrêtera pas à 1 Gbps. L’ambition d’Orange est en effet de proposer à terme 10 Gbps. D’ici 2040, l’opérateur entend proposer cette vitesse sur deux tiers au moins de son réseau FTTP (fiber to the premise), mais contrairement à Proximus et à Telenet ce ne sera pas avec un réseau propre. Il n’y aura donc pas de troisième réseau à fibre optique national. Au bas de cet article, découvrez l’interview de Philippe Toussaint, Chief Fixed Network Officer d’Orange, pour en savoir plus sur la mise à niveau et les ambitions à propos de la fibre optique.
Davantage de services
Mais la fusion avec VOO est aussi l’occasion d’affûter les ambitions générales d’Orange. C’est ainsi que l’entreprise aspire à la ‘customer experience excellence’. Il s’agit là d’une expression de marketing pour dire que l’entreprise veut aussi miser sur les services. Notamment en amplifiant l’offre TV grâce à des contrats et des plates-formes de VOO/BeTV. Pour le marché professionnel, Orange compte entre autres sur l’expérience SoHo de VOO, et sur des combinaisons avec Orange Cyberdefense et le réseau 5G notamment.
5G autonome
À propos de ce réseau 5G, Orange Belgium déclare vouloir atteindre d’ici la fin de cette année quarante pour cent de la population belge. Pour les clients professionnels, l’entreprise entend miser sur 5G Core SA (autonome). Aujourd’hui, la 5G utilise encore souvent des composants de la 4G, alors qu’avec la 5G autonome, tel n’est plus le cas, et davantage de services seront aussi directement possibles pour les clients professionnels. ‘Nous allons mettre en œuvre plusieurs 5G use cases à la mesure de nos clients professionnels’, explique le CEO Xavier Pichon à ce propos. En outre, un accord conclu avec Proximus porte sur des pylônes d’antennes partagés, ce qui devrait améliorer le taux de couverture générale.
Local
Lors de la présentation de la nouvelle stratégie, Pichon a aussi abordé la durabilité au sens large du terme. Un étonnant changement de cap ici, c’est le souhait pour les clients ‘retail’ de négocier de manière entièrement locale avec le service à la clientèle. Pas d’externalisation donc vers des pays (bon marché), mais bien des centres d’appels en Belgique, avec l’ambition de maintenir la qualité à un niveau élevé.
En matière d’ICT aussi, on resserre davantage les rangs, puisque l’ambition est de déplacer les compétences IT de l’extérieur vers l’intérieur.
Moins d’émissions, plus d’inclusion
En outre, l’entreprise déclare vouloir d’ici 2040 réduire à zéro ses émissions nettes de carbone. A court terme, d’ici 2025, les émissions devront diminuer de 22 pour cent aux niveaux 1 et 2. Le niveau 1, ce sont les sources d’émission directe, comme les voitures de société, alors que le niveau 2 couvre les émissions indirectes, comme par exemple l’énergie achetée.
Une plus grande focalisation sera placée aussi sur la diversité et l’inclusion. Orange Belgium entend miser sur le développement des talents internes et se dit ambitieuse au point de devenir l’employeur technologique par excellence.
‘Nous n’avons pas besoin du réseau à fibre optique de toute urgence’
Le choix d’Orange de ne pas sauter directement sur la fibre optique semble étrange dans la mesure où c’est quand même l’objectif final. Philippe Toussaint, Chief Fixed Network Officer et CTO de VOO, explique à Data News la raison de ce choix.
Si le réseau doit être modernisé, pourquoi n’optez-vous pas directement pour la fibre optique en Wallonie?
Philippe Toussaint: ‘Parce que le réseau que nous possédons à présent, est parfaitement capable de fournir une vitesse d’1 gigabit. C’est un réseau robuste que nous devrons moderniser quelque peu, mais par la suite, nous pourrons offrir la vitesse d’1 gigabit mi-2024, comme Telenet le fait à présent dans le nord du pays.’
‘Nous n’avons pas besoin du réseau à fibre optique de toute urgence. Nous allons évidemment le moderniser au fil du temps. Supposons qu’Orange n’ait pas racheté VOO, il aurait alors fallu envisager la fibre optique, mais sur base d’un nombre de clients très limité. Il s’agissait alors de déployer la fibre optique avec dix pour cent du marché comme clients. A présent, nous pouvons combiner les clientèles d’Orange et de VOO, ce qui fait que la mise à niveau vers un ‘full gigabit network’ sera rapidement faisable. Il sera plus efficient de moderniser d’abord nos clients actuels.’
Donc la mise à niveau actuelle ne passera pas par la fibre, mais un jour, ce sera quand même nécessaire, non?
Toussaint: ‘Notre ambition est de la proposer d’ici 2040 dans deux tiers de notre réseau FTTP (fiber to the premise, ndlr). La façon de s’y prendre n’a pas encore été complètement déterminée. Nous en discutons avec différents acteurs sur le marché.’
‘On veut évidemment éviter de superposer des choses (comprenez: déployer un troisième réseau à fibre optique national). Cela coûte surtout de l’argent au client, sans que cela ne représente une franche plus-value. Il s’agit d’une tâche très ardue que de déployer un troisième réseau à fibre optique. Il faut alors avoir suffisamment de clients. Nous allons donc faire le pas vers la fibre optique, mais conjointement avec d’autres acteurs, peut-être même des futurs acteurs. Il s’agit d’une décision ‘make or buy’. Si nous pouvons conclure un bon accord pour partager un réseau, pourquoi pas. Cela ne pourra que profiter au client.’
‘Dans le nord du pays, nous appliquerons la même stratégie. Telenet a l’ambition d’équiper une grande partie de la Flandre de la fibre optique et nous pourrons donc conclure des accords avec elle à ce propos.’
Orange n’est donc pas pressée, parce qu’il y a encore des possibilités au niveau du coax?
Toussaint: ‘Nous progressons à notre rythme. Contrairement au titulaire (Proximus, ndlr) qui dispose d’un réseau cuivré, nous ne sommes pas si pressés. DSL2 court vraiment à sa fin. Il nous faudra donc mettre assez rapidement à niveau afin d’atteindre la vitesse d’1 gigabit. Dès à présent, nous pouvons la proposer en Flandre grâce aux accords conclus avec Telenet. Tel sera aussi le cas d’ici mi-2024 dans le reste du pays.’
‘Ne me comprenez pas mal: la fibre optique est essentielle pour nous à longue échéance. Mais ce qui nous importe, c’est connecter le client et lui offrir une bonne vitesse au lieu de rester à nous demander ‘avec quelle technologie spécifique peut-on y arriver?’. N’oublions pas non plus que la plupart des réseaux coax sont en fait de la fibre optique avec du coax en dernière extrémité. Nous allons toujours plus implémenter la fibre optique pour en avoir quasiment fini dans vingt ans.’
Que doit-on concrètement comprendre par moderniser le réseau coax de VOO?
Toussaint: ‘Proposer une vitesse d’1 Gigabit, on y arrive avec une combinaison de facteurs. Nous passons à la norme Docsis 3.1, ce qui signifie qu’il faut agencer autrement le spectre sur le câble avec davantage de canaux. Une partie du travail consistera donc aussi à supprimer les chaînes TV analogiques, car elles encombrent la connexion. On libèrera ainsi de l’espace pour des canaux supplémentaires (des zones se voyant attribuer des vitesses de chargement/téléchargement, à ne pas confonde avec les canaux TV, ndlr).’
Il s’agit surtout de jouer sur le spectre, mais le coax physique peut-il rester en place?
Toussaint: ‘Oui, sauf dans des conditions très spécifiques, des endroits où le câble n’est qualitativement pas assez bon pour accepter les hautes fréquences. Il faut opter pour une qualité très élevée car plus haute est la fréquence, plus il faut de précision.’
‘Enfin, il y aura aussi à terme de l’espace qui se libèrera sur ce câble de par l’arrivée de FTTP en certains endroits. S’il y a aujourd’hui un nœud accueillant davantage de clients et/ou de trafic de données, il s’agira ensuite de scinder ce nœud, afin de réduire le nombre d’utilisateurs par nœud. Mais à l’avenir, des groupes de clients se trouveront sur la fibre optique, et de l’espace se libèrera de nouveau sur le coax. Considérez le coax comme un arbre, dont nous allons à terme couper des branches, afin que ces clients puissent migrer vers la fibre optique.’
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