Où Dell va-t-elle puiser les 67 milliards de dollars?

Michael Dell © Reuters
Pieterjan Van Leemputten

Michael Dell avait à l’époque racheté ‘son’ entreprise Dell pour 25 milliards de dollars et deux ans plus tard, il met 67 milliards sur la table pour acquérir EMC. Comment cela va-t-il se passer exactement?

La réponse est étonnamment simple: en en discutant avec les banques. Au moment d’écrire ces lignes, l’on ne connaît que peu de détails précis sur l’accord intervenu, mais le spécialiste du marché Tom Simonts de Bolero, la plate-forme d’investissement de KBC, nous explique que dans la pratique, il s’agit souvent d’un risque partagé. Dans les grandes lignes, l’opération diverge peu d’un autre rachat, sauf que celui-ci est à nettement plus grande échelle.

“La banque va mettre à disposition une grande partie du montant, mais à des conditions très strictes. Ex exigeant par exemple que Dell même renforce une partie de son capital, afin que ce soit un risque partagé.”

Chez Dell, ce n’est pas une seule banque, mais neuf grandes banques qui se retrouvent autour de la table. Elles posent toutes leurs conditions destinées à limiter le risque, ou exigent des garanties en vue de pouvoir récupérer leur argent. “Il peut s’agir d’accords de ne pas verser de dividendes par exemple dans les premières années, ou en cas de vente éventuelle d’une division de rembourser immédiatement une partie du prêt avec l’argent ainsi obtenu.”

Avant que Dell puisse disposer de ses milliards, il lui faut donc négocier en profondeur avec les banques. En outre, ces banques auront aussi leur mot à dire, si Dell entreprend certaines choses dans un futur proche, comme la vente d’un département ou de nouveaux rachats.

Il nous faut cependant faire observer qu’il ne s’agit pas là d’une situation inédite. Lorsque Michael Dell retira son entreprise de la Bourse, cela se fit conjointement avec le fonds d’investissement Silver Lake. Ce dernier n’est évidemment pas assis autour de la table, quand Dell doit prendre une décision sur le nombre de pixels de l’écran d’une tablette, mais bien, lorsqu’il est question de gros sous.

“Les banques vont imposer des limites en matière de cash flow, afin d’être sûres de revoir leur argent. Ce genre d’acteur est au taquet, ce qui n’est pas illogique dans la mesure où il s’agit d’exclure le risque que quelque chose cloche dans un prêt de dizaines de milliards de dollars. Nous avons vu ce que cela a déjà donné”, affirme Simons en faisant référence à la crise financière de 2008.

Dell + EMC = risque plus faible

La question est de savoir si un méga-rachat comme celui-là rend par définition une entreprise plus stable. Alors que la tendance actuelle est que les géants veulent se scinder, Dell va, elle, à contre-courant. Mais sous l’angle des risques, l’entreprise devrait mieux s’en tirer dorénavant. “Dell était active dans les ordinateurs et les serveurs, et elle étend à présent ses activités au stockage. Or le stockage est encore et toujours un marché en croissance. Le fait donc de racheter EMC va diversifier les activités de Dell et diluer les risques.”

Enfin, il y a aussi les extras, dans ce cas ce qu’on appelle les ‘tracking stocks’ (actions sans droit de vote) de VMware, qui devraient veiller à ce que Dell puisse conserver virtuellement une partie du montant à payer. “Personne n’aime vendre en espèces, Dell non plus, et donc, l’accord est amplifié par les ‘tracking stocks’. Voilà qui devrait surtout convaincre les acheteurs.” Ces ‘tracking stocks’ sont des espèces d’actions virtuelles liées à la valeur de VMware, une filiale d’EMC. Elles ne donnent pas un droit de vote et rapportent aussi moins de parts du gâteau, mais en compensation, il s’agit donc d’actions virtuelles liées à la valeur de VMware.

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