Matthias Dobbelaere-Welvaert

Microsoft contraint les utilisateurs à une mise à jour vers Windows 10. En a-t-elle le droit?

Matthias Dobbelaere-Welvaert Matthias Dobbelaere-Welvaert est fondateur de lesJuristes et supporte les entreprises en matière de droit internet.

Windows 10 a représenté l’un des plus importants lancements de ces dernières années. C’était la première fois que Microsoft proposait gratuitement sa nouvelle version à ses utilisateurs. Et ce, même si ce n’est évidemment jamais entièrement gratuit.

C’est au cours de l’été de 2015 que Windows 10 a été officiellement lancé. Cette toute nouvelle version de Windows est pour l’entreprise l’une des plus importantes de ces dernières années et a dès lors été présentée en grande pompe. Avec Windows 10, il est possible de connecter plus facilement divers appareils, afin de pouvoir basculer entre un smartphone, une tablette et un PC par exemple.

En outre, Microsoft y a ajouté une foule de spécifications destinées, selon elle, à améliorer l’expérience de l’utilisateur. C’était aussi la première fois que Microsoft proposait gratuitement sa nouvelle version à ses utilisateurs. Et ce, même si ce n’est évidemment jamais entièrement gratuit. Il est bon pour les utilisateurs d’être conscients qu’en l’occurrence, ils paient avec leurs données personnelles et fournissent donc ainsi leur contribution financière.

Microsoft contraint les utilisateurs à une mise à jour vers Windows 10. En a-t-il le droit?

Les tactiques agressives par lesquelles Microsoft entend ensuite fournir Windows 10, restent cependant en travers de la gorge de nombreux utilisateurs. Comme jamais auparavant, l’entreprise a fait l’impossible pour inciter ses utilisateurs à migrer vers la toute nouvelle version.

Alors qu’au début, il était encore possible, mais pas vraiment évident, d’enrayer la mise à niveau, l’on apprend de plus en plus ces dernières semaines que des ordinateurs ont été mis à niveau vers la nouvelle version, malgré le fait que les utilisateurs l’aient refusé en supprimant la mention avec la petite croix.

Cette façon de faire irait aussi à l’encontre de la propre politique interne de Microsoft. Et Microsoft de signaler ici que cliquer sur la croix ne peut jamais avoir la même valeur qu’une confirmation d’accord.

Le fait que cette politique de mise à niveau porte ses fruits, est corroboré par la hausse de la part de marché de Windows 10. Reste à savoir si cela va profiter aussi à la réputation de Microsoft.

Le fait que cette politique de mise à niveau porte ses fruits, est corroboré par la hausse de la part de marché de Windows 10. Reste à savoir si cela va profiter aussi à la réputation de Microsoft.

La question que l’on se pose aujourd’hui, est de savoir si Microsoft peut recourir à ce genre de tactique. Pour le comprendre sur le plan juridique, il convient en effet de séparer le hardware du software. Le hardware – votre PC – est votre propriété. Vous l’achetez dans un magasin, vous payez le prix et vous pouvez ensuite en faire ce que bon vous semble. Mais si vous effectuez des adaptations, c’en est fini de la garantie. Voilà tout.

Il en va autrement pour le software. Vous n’achetez en effet absolument rien. Disons que vous louez quelque chose. En échange de votre argent, vous recevez tout simplement une licence logicielle, sur laquelle vos droits de souscripteur de licence sont réduits à leur plus simple expression.

Une licence logicielle est souvent l’exemple d’école d’une prison juridique.

Une licence logicielle est souvent l’exemple d’école d’une prison juridique, où vos droits sont généralement strictement limités à l’utilisation normale du logiciel. L’ingénierie à rebours, la location à d’autres ou la revente sont d’origine bloquées juridiquement.

Est-ce permis?

Reste la question délicate de savoir si Microsoft peut imposer sa volonté comme elle le fait. La réponse juridique est sans aucun doute affirmative. Le fournisseur de licence peut lui-même spécifier dans quelle mesure et pendant combien de temps une ancienne version de son logiciel peut encore être supportée. Il peut déterminer lui-même de l”imposer’ à ses utilisateurs, d’autant plus s’il ne demande aucune indemnisation. Quant au fabricant de votre PC, il ne vous proposera, lui, jamais d’échanger gratuitement votre vieil ordinateur contre un nouveau. C’est là toute la différence entre les deux.

Il ne peut évidemment pas y avoir de pertes de données, comme il en a été question dans quelques cas. Le fournisseur de licence court alors le risque de se voir réclamer des dommages et intérêts, étant donné que les données personnelles – à savoir ce que l’on stocke sur un disque dur via le système d’exploitation – sont séparées de ce dernier. De plus, l’on en arrive ici dans le sillage du droit au respect de la vie privée, quelque chose qu’une entreprise préfère éviter au vu de la réglementation toujours plus stricte.

Il est à coup sûr coûteux de continuer de supporter d’anciens systèmes d’exploitation. Garantir la sécurité est aussi problématique avec toutes les nouvelles technologies qui sont mises au point. Quant à savoir si cela justifie ce genre de tactique agressive, c’est une question éthique et non pas juridique.

Microsoft affirme en tout cas que les utilisateurs disposent toujours du contrôle complet du processus de mise à niveau et qu’après l’installation de Windows 10, il leur reste encore un mois pour revenir à l’ancienne version sur leur ordinateur.

Nombre d’utilisateurs ont exprimé leur mécontentement à propos de la façon d’agir de Microsoft, ce qui fait que la réputation parfois déjà douteuse de l’entreprise est de nouveau remise en cause.

Cet article a été écrit par Matthias Dobbelaere-Welvaert, managing partner de lesJuristes Europe, en collaboration avec Shay Danon, head of legal chez lesJuristes Amsterdam.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire