Le vent tourne pour l’industrie technologique, qui craint des pertes d’emplois en 2023

Bart Steukers (Agoria). © DN

L’industrie technologique belge se trouve actuellement sur une ligne de crête entre croissance et recul de l’activité et redoute même des pertes d’emplois en 2023, a mis en garde mercredi la fédération sectorielle Agoria.

Si l’industrie technologique est traditionnellement un secteur en croissance en Belgique -hors parenthèse du Covid- les derniers mois ont changé la donne. La flambée des prix de l’énergie, consécutive à la guerre en Ukraine, s’est ajoutée aux pénuries de composants électroniques et au manque de main-d’oeuvre (21.370 emplois vacants, un record) qui sévissaient déjà. Le choc énergétique, avec des prix du gaz hallucinants durant l’été, est lui-même en train de se répercuter sur les salaires et pèse sur des entreprises très tournées vers l’export.

“La hausse des prix de l’énergie et des coûts salariaux va coûter au secteur 10 milliards d’euros”, prévient le CEO d’Agoria, Bart Steukers. La hausse des coûts salariaux est en effet estimée à 18% pour les années 2022 et 2023, soit 5,8 milliards d’euros. Auxquels s’ajoute une facture énergétique alourdie de 4,2 milliards d’euros. Le handicap salarial des entreprises technologiques par rapport à nos principaux voisins se creuserait, de 9,8% en 2021 à 13,9% en 2023. Agoria s’inquiète dès lors que les entreprises belges ne perdent des parts de marché à l’exportation.

Dans ce contexte, l’emploi dans l’industrie technologique devrait encore augmenter de 3.100 unités en 2022, mais Agoria avait tablé début février, avant l’invasion russe, sur une croissance de 7.000 emplois cette année. Surtout, en 2023, l’emploi dans le secteur reculerait même de 2.000 unités, selon Agoria qui craint que le secteur soit tout simplement à l’arrêt, de même que ses investissements. En 2021, 8.500 emplois supplémentaires avaient été pourvus, dans l’industrie technologique belge.

Et le taux d’utilisation des capacités de production, qui avait atteint un niveau quasi-record de 83% au premier trimestre, risque de passer sous le seuil de 80% en dessous duquel, habituellement, les entreprises cessent d’investir. Un nouveau point de basculement, aux yeux d’Agoria.

Au cours d’une conférence de presse, la fédération sectorielle a avancé trois conditions essentielles pour assurer l’ancrage de l’industrie en Belgique: un environnement et des infrastructures compétitifs, la disponibilité d’employés talentueux, et la proximité de pôles de recherche et de développement. Or, “ces trois éléments sont sous pression”, alerte Bart Steukers.

Agoria plaide en outre pour “une adaptation structurelle du système d’indexation automatique” des salaires, souhaite une baisse du prix de l’énergie, par le biais notamment d’accords à long terme avec des pays exportateurs de gaz (Norvège, États-Unis, Qatar), et demande le maintien du régime fiscal belge en matière de recherche et du développement, qualifié de véritable atout pour le secteur. Il est aussi demandé aux différents niveaux de pouvoirs de s’abstenir de toute nouvelle augmentation des charges imposées aux entreprises.

Le secteur des technologies emploie 324.000 personnes en Belgique, en sus d’un nombre équivalent d’emplois indirects.

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