‘Il faut une législation sur les crypto-monnaies’

André Henkes, avocat générale près la Cour de Cassation © BELGA

Il est urgent que les autorités belges et européennes élaborent une législation et une réglementation à propos du bitcoin et des autres crypto-monnaies. Voilà ce qu’a déclaré l’avocat général près la Cour de Cassation, André Henkes, ce lundi dans son discours marquant le début de la nouvelle année judiciaire.

Selon l’avocat général Henkes, les crypto-monnaies sont des espèces anonymes, décentralisées et virtuelles, qui ne sont pas supportées par un état, un gouvernement ou une autre entité juridique et qui ne sont pas échangeables contre de l’or ou toute autre matière première. “L’idée de base est que des personnes puissent s’échanger de l’argent, sans intervention de tiers telles des autorités et des institutions financières”, a-t-il déclaré.

“Dans ce sens, l’existence des crypto-monnaies concurrence en quelque sorte le monopole gouvernemental sur la politique monétaire et la réglementation financière. La confiance de la société dans l’utilité du contrôle public sur le monde financier a ces dernières années été, il est vrai, fortement ébranlée par la crise financière. Il est probable que cela explique en partie la popularité de mécanismes décentralisés.”

Même si ces crypto-monnaies ne deviendront probablement jamais de nouvelles unités monétaires mondiales, leur pertinence juridique ne fait cependant que grandir, ce qui accroît du coup le besoin d’une législation et d’une réglementation en la matière, selon le haut magistrat: “L’étendue des crypto-monnaies concerne plusieurs domaines juridiques.”

Les crypto-monnaies doivent-elles être considérées comme de l’argent?

Pour l’avocat général Henkes, il ne fait aucun doute que les crypto-monnaies sont bien des espèces et sont en tant que telles liées au concept ‘argent’, mais d’un point de vue économique, elles ne peuvent être considérées comme de l’argent, selon le magistrat. Pour servir de monnaie de compte ou de moyen fiable de stockage financier, leur valeur est encore trop volatile.

Par ailleurs, elles peuvent servir de moyen d’échange ou de paiement d’une dette. Cela ne va pas sans poser différentes questions en matière de droit des contrats. Voilà pourquoi, selon le magistrat, il faut une vision d’avenir claire et légalement ancrée sur le rôle à réserver aux crypto-monnaies.

Incertitude juridique

Dans une perspective de régulation financière, les crypto-monnaies semblent temporairement légitimes, mais il manque, au niveau tant belge qu’européen, une réglementation claire et cohérente. Il en ressort une incertitude juridique, selon le magistrat, surtout en raison des nombreuses plaintes relatives à des pratiques d’escroquerie et à d’autres mécanismes de fraude aux crypto-monnaies.

En outre, les crypto-monnaies sont certes des biens virtuels, mais elles peuvent tout aussi bien être considérées comme des créances. Sur le plan du droit à la propriété, il manque donc un encadrement légal et une certitude juridique, selon Henkes.

Enfin, il y a encore le droit fiscal. Au niveau de la TVA, le récent phénomène des crypto-monnaies peut certes se voir appliquer les règles légales existantes, mais pour ce qui est des impôts sur les revenus, la situation est nettement moins évidente. Des interventions légales semblent opportunes ici également, conclut Henkes.

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