Et maintenant, que va faire Elon Musk de Twitter?
A présent qu’Elon Musk se qualifie lui-même de nouveau ‘Chief Twit’, la question se pose de savoir ce qu’il envisage de faire avec Twitter.
Soyons clairs avant tout: pour pouvoir répondre à cette question, on ne peut que s’appuyer sur les quelques conseils que Musk a lui-même distillés ces derniers jours, semaines et mois via principalement… Twitter et quelques interviews et déclarations dans les médias essentiellement américains. Et s’il y a une chose qui caractérise Musk, ce sont bien ses déclarations rapides et évasives, mais aussi son inconstance et son imprévisibilité.
1/ Changer l’équipe en place
Il était évident qu’Elon Musk allait intervenir dans l’équipe directoriale en place chez Twitter, dès que le rachat serait entériné. Cela ne s’est pas fait attendre, puisque notamment le CEO Parag Agrawal, le CFO Ned Segal, le conseiller général Sean Edgett, et Vijaya Gadde, la responsable des affaires juridiques, ont été licenciés séance tenante. C’est surtout le limogeage de Gadde qui a tout d’un règlement de compte après la brève, mais douloureuse bataille juridique qui opposa Twitter à Musk à propos du rachat. Musk annonça en avril qu’il voulait s’emparer de Twitter pour 44 milliards de dollars, avant de revenir sur sa décision, après quoi Twitter lui intenta un procès afin que la procédure de rachat puisse se poursuivre. Finalement, Musk changea une nouvelle fois d’avis – serait-ce parce qu’il n’est pas très doué sur le plan juridique? – et décida quand même de s’emparer de Twitter pour le montant convenu.
Ces licenciements suffiront-ils? Probablement pas. On s’attend en effet à ce que de nombreux membres du personnel de Twitter voient leur emploi passer à la trappe, au fur et à mesure que Musk transformera l’entreprise. The Washington Post semblait savoir que 75% des 7.500 employés seraient limogés, mais selon l’agence Bloomberg, Musk l’aurait entre-temps démenti dans un discours prononcé devant le personnel de Twitter. Cependant, il semble inévitable que des licenciements suivront, surtout si Musk poursuit ses plans de réforme.
2/ Plate-forme de liberté d’expression
Ce que Musk a déclaré à plusieurs reprises, c’est son désir de faire de Twitter une plate-forme de liberté d’expression à part entière et absolue. Il veut moins de modération et davantage d’ouverture dans le débat, ce qui sera à coup sûr rapidement mis en oeuvre via des termes et conditions adaptés. Ce qu’il ne veut pas, c’est que Twitter soit de ce fait entièrement confiné dans une discussion faisant la part belle aux opinions et idées radicales, ainsi qu’aux fausses nouvelles.
Pour éviter cela, il va probablement davantage miser sur une authentification des comptes. Musk entend ainsi faire fi des comptes factices et s’assurer qu’il y a bien un ‘humain’ derrière chaque compte Twitter et que son identité soit vérifiée. Est-ce que cela va générer des discussions plus humaines en ligne? Cela rester à voir, mais c’est en tout cas l’espoir d’Elon Musk.
3/ Le modèle commercial
La suppression des robots et des faux comptes de la plate-forme a encore un autre objectif, assurément plus important encore: l’optimalisation du modèle commercial. L’idée est très simple: les robots et autres comptes automatisés ne cliquent pas sur les publicités. En d’autres termes, les robots ne coûtent à présent à Twitter que de la capacité et donc de l’argent, mais ne rapportent strictement rien. Musk entend revoir le modèle publicitaire, tout en soufflant le chaud et le froid ces derniers jours. Il semble vouloir proposer des annonces plus ciblées et optimaliser le modèle. Il doit aussi le faire s’il veut récupérer un jour l’investissement substantiel du rachat.
Miser davantage sur la vidéo et affronter la concurrence de YouTube ou TikTok est une autre option. Surtout si un modèle publicitaire et une piste de revenus y sont liés. Dans de précédentes interviews, Elon Musk a déjà annoncé que la vidéo est à présent un poste à perte pour Twitter: aucune rentrée.
Précédemment, Musk avait déjà aussi laissé entendre qu’il voulait bricoler l’algorithme des flux Twitter et donner aux utilisateurs une influence limitée, afin qu’ils puissent contrôler de manière plus ciblée ce qu’ils veulent voir. Cela ne pourra également que profiter au modèle commercial en matière publicitaire. Mais par ailleurs, Musk semble également croire en un modèle payant pour les utilisateurs. Aux Etats-Unis, au Canada, en Australie et en Nouvelle-Zélande, il existe déjà une formule d’abonnement Twitter Blue. Elon Musk va vouloir sans aucun doute en poursuivre l’expérimentation et en tester les limites: pour quoi les utilisateurs sont-ils prêts à payer et combien?
4/ Vers une appli exhaustive?
A plus long terme, il ne nous étonnerait pas que le nouveau patron de Twitter veuille poursuivre le développement de l’appli pour la rendre exhaustive par analogie avec l’exemple chinois WeChat. Cette appli est passée d’une simple application de clavardage (chat) en une appli avec laquelle les Chinois peuvent quasiment tout faire: achats, paiements mutuels, opérations bancaires. Alors qu’à ces fins, on utilise encore des applis distinctes que ce soit en Europe ou aux Etats-Unis. Il ne faut pas perdre de vue qu’Elon Musk a autrefois été au service de la plate-forme d’e-paiements PayPal et y a encaissé pas mal suite à la vente par eBay.
Mais si Musk veut vraiment mener à bien ce genre de transformation ambitieuse, il aura besoin de bons profils. Twitter les possède-t-elle? Tout semble en tout cas indiquer qu’il devra quasiment reconstruire Twitter de zéro, à la fois en termes de structure commerciale et de technologie. Quoi qu’il en soit, il paraît clair que Twitter, telle que nous la connaissons aujourd’hui, ne continuera plus longtemps d’exister. Mais qu’en sera-t-il vraiment? Cela reste à voir. Répétons-le: c’est l’affaire de Musk. Qui sait, il se mettra simplement à vendre des lavabos sur Twitter la semaine prochaine. Let that sink in.
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