OPINION Bart Becks – Belgium zero point, mais une haute ENB

Ces derniers jours, nous avons visité Singapour et Hong Kong. Deux villes qui m’ont fait très forte impression. Singapour en raison de ses investissements dans l’infrastructure et sa stratégie pour attirer du talent et des entreprises. Et Hong Kong en raison de l’ambiance qui me plaît énormément. Je pourrais y vivre, je pense.

Ces derniers jours, nous avons visité Singapour et Hong Kong. Deux villes qui m’ont fait très forte impression. Singapour en raison de ses investissements dans l’infrastructure et sa stratégie pour attirer du talent et des entreprises. Et Hong Kong en raison de l’ambiance qui me plaît énormément. Je pourrais y vivre, je pense.

Au cours du petit-déjeuner pris à Kowloon, l’un des 2 environnements portuaires de Hong Kong, j’ai lu une étude où l’on analysait quelle région est la plus attrayante pour les entrepreneurs débutants et où l’on peut avoir le plus de succès.

Rien d’étonnant à ce que San Francisco (Silicon Valley) domine le classement. Avec Los Angeles en sixième position, il apparaît que la Californie occupe de loin la pole position mondiale pour les entrepreneurs. J’ai aussitôt compris pourquoi Singapour y apparaît soudainement à la septième place. En Europe, il est clair que les meilleures villes pour entreprendre sont les suivantes: Londres, Paris, Madrid et Berlin. Des débouchés plus importants, une meilleure infrastructure, des acteurs plus puissants, davantage de capital, un enseignement orienté entreprise.

Malheureusement, aucune ville belge n’est mentionnée dans le top 25. Au Festival Eurovision de l’Entreprenariat, cela donnerait: Belgium zero point. Il y a évidemment plusieurs façons d’y arriver. Permettez-moi d’en aborder plusieurs où l’on pourrait s’améliorer.

Le gouvernement peut investir dans l’infrastructure. Madrid/Barcelone (même si cette dernière ne se trouve pas encore sur la liste) et Singapore en sont des exemples, mais Berlin aussi progresse nettement. Dans ce but, il faut une collaboration coordonnée dans tout le pays. Nous n’allons pas faire de différence entre la Flandre, Bruxelles et la Wallonie. Il faut se serrer les coudes. Nous avons ici encore beaucoup à faire, et tout semble indiquer qu’il n’y aura pas d’énormes moyens à y consacrer. La spécialisation serait-elle une possibilité?

Une région peut renaître grâce à des entreprises fortes. Les possibilités de croissance et de développement d’une entreprise peuvent être orientées sur une autre entreprise. Facebook par exemple offre une plate-forme de croissance pour d’autres entreprises, comme Zynga – une entreprise de jeux qui se base complètement sur Facebook et a aujourd’hui une valeur marchande de quelque 10 milliards de dollars.

A son tour, Zynga propose des possibilités notamment suite au rachat d’OMGPOP pour plus de 200 millions de dollars. Un autre exemple est Instagram, qui s’est entièrement concentrée sur le système d’exploitation mobile iOS d’Apple, puis qui a utilisé Facebook et Twitter pour du partage social (social sharing).

Ces entreprises ont été rachetées par Facebook pour pas moins d’1 milliard d’euros, 2 ans seulement après leur lancement. D’énormes montants que ceux-là reposant sur les écosystèmes de tiers.

C’est dans ce cadre que l’on peut aussi considérer le récent déménagement de Twitspark ou Storify, 2 startups belges qui se sont installées dans la Silicon Valley pour y chercher le succès. Pour avoir une chance de faire partie de cet écosystème, c’est là qu’il faut être. Des entreprises telles Twitspark ou Storify n’ont rien à faire en Belgique. Elles doivent s’en aller. Même si j’aurais préféré que les capital-risqueurs belges entrent dans ces possibles histoires à succès. Tel n’est pas le cas de Storify, alors que LRM s’est associée à Twitspark (voir plus loin). Elles me doivent toutes deux une bonne bière 🙂

Une région peut aussi s’attirer des entrepreneurs en raison de ses portes de sortie. Google, Microsoft et, dans une moindre mesure, Facebook et Twitter attirent par leur emplacement d’autres entreprises qui veulent faire parler d’elles. Ces entreprises ont conjointement repris plus de 500 autres starters ces dernières années. En Europe par contre, je ne pense pas que Google ou Microsoft aient déjà effectué un seul rachat, voire envisagé une reprise, un financement ou une participation. Je pense même qu’en Belgique, il ne faut pas aller frapper à leur porte pour un investissement. Facebook dispose chez nous d’un seul collaborateur pour l’instant (même si elle a énormément de talent, bravo Alexis).

Personnellement, j’estime même qu’il y a des ‘affaires’ à faire pour de nombreuses entreprises. Du jeune talent pour renforcer les rangs, un produit innovant, un nouvel état d’esprit pour rechercher la croissance. Lorsque je travaillais chez Skynet et ProsiebenSat1, j’ai été impliqué dans une dizaine de rachats, dont la plupart se sont avérés intéressants pour toutes les parties concernées et qui ont souvent engendré de nouvelles activités ou une nouvelle manière de penser.

Nous avons peut-être simplement besoin aussi de davantage d”intrapreneurs’, capables d’accompagner les jeunes dans des sociétés plus grandes. Je trouve même que les ‘intrapreneurs’, qui tirent à la charrette de l’innovation dans une grande société, sont généralement sous-estimés. Je sais par expérience qu’il n’est pas évident d’innover dans une grande entreprise et de changer une façon de travailler solidement ancrée. Mais j’entends en parlant avec de nombreux CEO de ces entreprises qu’il existe d’autres et de nouvelles possibilités!

Il se peut aussi qu’une région renaisse grâce à ses entrepreneurs à succès. C’est ainsi que l’on voit des entrées en Bourse réussies ou des disparitions de grandes sociétés qui génèrent une vague de nouveaux entrepreneurs et surtout d’investisseurs. Paypal en est un excellent exemple. Au terme d’une incroyable croissance, Paypal a été rachetée par eBay pour quelque 1 milliard et demi de dollars. Toute l’équipe de Paypal, a présent souvent appelée la PayPal Mafia, a ensuite engendré une énorme vague de nouveaux entrepreneurs. Différents membres de l’équipe sont impliqués dans la création de YouTube, Tesla, Founders Fund, Slide, Yammer, Kiva, Linkedin, Ning, etc., etc. Et c’est sans parler du nombre inouï d’investissements de ‘business angels’ ou – tendance importante – d’entrepreneurs à succès qui sont ensuite devenus actifs dans un fonds d’investissement.

C’est pareil avec les ex-Googlers, les ex-Yahoo’s et à présent aussi déjà avec les entrepreneurs Facebook et Twitter. En Belgique, nous avons peu d’entrepreneurs web à succès actifs au niveau international. Il y a Sébastien de Halleux (Playfish) et Stijn Bijnens (Ubizen). Et Alain de Taeye (TeleAtlas). Et Dries Buytaert (Drupal). Et quelques autres encore. S’ils lançaient un fonds comme, disons, Peter Thiel, cela pourrait créer une énorme impulsion. Sébastien a commencé, Stijn est en train de faire de LRM quasiment la société d’investissement flamande la plus puissante, mais malheureusement, il n’a pas tout entre les mains. Alain de Taeye, un investisseur dans ma propre entreprise et qui, après la vente de sa TeleAtlas à TomTom, en est encore et toujours le COO, m’apporte quelque chose à chacun de nos entretiens. Et il y en a d’autres encore.

Mais il existe aussi une foule d’excellents ‘business executives’ qui se distinguent ou se sont distingués au niveau international et qui veulent faire de l’entreprenariat. J’y consacrerai une opinion séparée, car il y a là beaucoup de possibilités. L’actuel CEO de l’IBBT en est un bon exemple, mais nombre de très bons ‘executives’ du secteur technologique, des médias, des agences, voire de la politique internationale peuvent et doivent assumer un autre rôle, du moins s’ils le veulent.

Peut-être devons nous rendre l’entreprenariat plus attrayant? Il est agréable d’entendre qu’environ un tiers des Belges actifs travaillent dans les pouvoirs publics et qu’ils estiment que ceux-ci sont l’employeur le plus attrayant. Mais c’est aussi représentatif de la mentalité de notre politique de travail. En soi, entreprendre, c’est peut-être facile en Belgique. Si l’on échoue, l’on est couvert par une solide sécurité sociale. Mais l’on tombe alors tout en bas de l’échelle. Il est interdit d’échouer en Belgique. Avoir du succès non plus d’ailleurs. Nos entrepreneurs ne sont pas des héros. Au contraire même parfois. Le succès n’est pas cultivé. La meilleure carrière se fait dans la consultance ou dans le monde financier, ou au terme d’un mandat politique dans l’industrie. Peut-être deviendrez-vous-même alors baron! Mais stimuler l’esprit d’entreprise, non ce n’est pas vraiment le cas.

L’Union fait la force, alors? En Belgique, nous disposons de pas mal d’organisations qui peuvent solidement aider l’entreprenariat. Des initiatives gouvernementales ou privées, peu importe après tout. Qu’il s’agisse de Betagroup ou de l’IBBT, d’UNIZO, de l’IWT ou de la VOKA, de WebMission ou de Belfius ou de KBC, Telenet ou Belgacom. Tous ensemble. Et là, je vois que nous connaissons une concertation toujours meilleure, où tout le monde tire à la même corde.

Je ne peux donc qu’espérer que nous soyons présents le plus possible lors de startups.be, un premier événement commun d’une foule d’organisations le 19 avril à The Egg de Bruxelles.

Comme vous le voyez, je suis un ardent défenseur du progrès dans toutes ces choses. Entreprendre et innover, ce n’est malheureusement pas une science exacte. Mais je vois chez les gouvernements flamand, bruxellois et wallon une ouverture aux idées. Je vois une nouvelle vague d’entrepreneurs. Je reconnais l’empressement des organisations qui veulent réaliser quelque chose. J’entends et je vois des managers ici et à l’étranger qui en veulent aussi. Et j’espère qu’il y aura une nouvelle vague d’investisseurs. Les actuels capital-risqueurs plus traditionnels, mais aussi une nouvelle vague de ‘business angels’ et de personnes ayant l’expérience de l’entreprise.

Et aussi de nouveaux concepts, comme peut-être ma propre angel.me, où ‘le public’ pourra faire ses propres choix via le ‘crowdfunding’ (dont Obama a fait une priorité pour davantage d’entreprenariat). A terme peut-être une alternative intéressante pour investir des taxes directes ou attribuer des subsides. J’aimerais payer un peu moins d’impôts, mais choisir moi-même dans quels projets culturels ou initiatives innovantes ‘mon’ argent sera investi. A méditer!

Mais une chose est sûre: l’on peut mieux faire. Et nous devrons faire mieux, si nous voulons générer du changement et de nouveaux emplois. Ce ne sera pas facile. Mais une haute Envie Nationale Brute existe à coup sûr! Et c’est là la première exigence.

Bart

Bart Becks est co-fondateur de SonicAngel, FilmAngel.TV et Angel.ME. Il est aussi président du conseil d’administration de l’IBBT et administrateur de la RMB/RTBf. En outre, Bart est et a été impliqué dans plusieurs startups telles Storify, Netlog, Mobile Vikings, Zamante et InThePocket. Dans le passé, il fut CEO de Belgacom Skynet et Vice-President Innovation & New Media du groupe de médias paneuropéen SBS/ProSiebenSat1. Il habite en alternance en Belgique et à Los Angeles avec son épouse et son fils Charlie. Pour le joindre: @bartbecks – bart@sonicangel.com – www.flyingchaz.com

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