Analyse | Juridique

Google devra-t-elle se scinder suite à sa récente condamnation?

. © Getty Images
Els Bellens

Après une condamnation cette semaine, Google est désormais officiellement un monopoliste aux Etats-Unis. Encore une condamnation, penseriez-vous, mais celle-ci pourrait être lourde de conséquences.

La récente condamnation de Google porte spécifiquement sur le moteur de recherche. Google a payé des milliards à Apple et Mozilla, entre autres, pour que son moteur de recherche soit le moteur de recherche par défaut des navigateurs Safari et Firefox. Les utilisateurs pourraient certes changer cela, mais dans la pratique, presque personne ne le fait, et Google a pu ainsi acquérir et conserver une énorme part de marché, du moins selon la sentence rendue. Et ce faisant, l’entreprise a réussi à obtenir un avantage injuste, déclare aujourd’hui un juge de Washington.

Ce n’est pas la première fois que Google est condamnée. Rien qu’au sein de l’UE, suite à toute une série d’enquêtes, des méga-amendes ont été imposées au géant technologique pour des pratiques anticoncurrentielles. Depuis le DMA, l’entreprise a également dû adapter toutes sortes de fonctionnalités pour ne pas privilégier ses services. Serait-ce différent cette fois? Peut-être bien.

Google est en effet une entreprise américaine. L’UE peut par exemple pousser à sa scission, mais elle n’en a pas vraiment le pouvoir. Dans la pratique, la Commission peut infliger des amendes, mais même des méga-amendes ne représentent qu’une petite partie des revenus d’un géant comme Google.

Deux Google?

Ce que le tribunal américain peut demander, serait plus impactant. Dans le pire des cas, Google pourrait même être scindée. Ce serait là le même scénario que Microsoft a évité de justesse dans les années 2000. Pour rappel, Microsoft était alors assignée en justice pour sa position de monopole avec Windows. Pour en sortir, il avait été demandé à l’entreprise de se scinder en une branche Windows et une autre qui gérerait les logiciels, dont Office.

Un juge sévère pourrait exiger quelque chose de similaire de Google, comme par exemple séparer la branche publicité du reste des logiciels. Il est cependant quelque peu plus réaliste que le juge demande à Google de mettre fin aux actions pour lesquelles elle est actuellement condamnée. Google ne pourrait donc plus payer Apple et consorts pour privilégier son moteur de recherche. En pratique, cela aurait surtout des conséquences pour Mozilla. L’association sans but lucratif perdrait ainsi une grande partie de ses revenus. Pour les utilisateurs, cela signifierait probablement que lorsqu’ils réinstalleraient le navigateur, ils devraient d’abord choisir un moteur de recherche à paramétrer par défaut. Dans l’UE, cet écran est connu depuis un certain temps déjà.

En appel

Quoi qu’il advienne, Google a déjà indiqué qu’elle ferait appel. On verra donc prochainement ce que décideront les hauts tribunaux américains. Et ensuite, cela prendra probablement une tournure politique. Le fait qu’il existe encore actuellement une firme Microsoft unique, est en effet à mettre au compte de l’administration du président Bush Jr. qui, dès son entrée en fonction, a traité l’affaire Microsoft sans qu’il soit question de scission.

Cependant, la politique américaine actuelle se montre moins positive à l’égard des géants technologiques que ne l’était Bush il y a vingt ans. L’affaire Google est la première d’une longue série, puisqu’Apple, Amazon et Meta doivent également être jugées aux Etats-Unis pour comportement anticoncurrentiel. C’est l’administration Biden, dont fait partie la candidate présidentielle Kamala Harris, qui a lancé cette procédure contre Google et souhaite donc clairement des ajustements. L’autre candidat à la présidence, Donald Trump, avait précédemment déjà déclaré qu’il souhaitait paralyser Google. Affaire à suivre sans nul doute.

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