Kristof Van der Stadt

‘En 2015, le mobile n’est plus mondain, mais modal’

Kristof Van der Stadt Rédacteur en chef chez Data News

‘Nous n’évoluons pas vers une réalité ‘mobile first’ qui va beaucoup plus loin que le tout nouveau Galaxy ou iPhone, mais nous y sommes déjà pleinement’, affirme Kristof Van der Stadt, rédacteur en chef de Data News, présent au Mobile World Congress de Barcelone. ‘Il résulte de cette tendance que ce congrès est devenu un véritable salon IT.’

Je m’en souviens très bien. Nous étions en 2003. En tant que jeune journaliste technologique, j’étais descendu à Cannes pour couvrir pour la première fois le 3GSM Congres, comme on disait à l’époque. Promenade sur La Croisette, du salon organisé dans le Palais des Festivals et des Congrès – connu pour son fameux festival du cinéma – jusqu’aux hôtels Martinez, Splendid et Majestic aux magnifiques façades, aux lobbys glamour, mais aussi aux étages à la couleur décrépite et aux salles de réunion qui avaient déjà connu leurs heures de gloire. Régler les rencontres dans des tentes à party, réaliser des interviews sur les petits bateaux des starters ambitieux et s’enfiler une petite coupe sur des yachts bien rangés devant la plage des multinationales du mobile. Et ce, sous un soleil printanier au beau milieu de dames âgées, lunettes de soleil sur le nez et caniche en laisse.

A cette époque, le mobile était mondain, mais un an plus tard, il était déjà manifeste que Cannes était trop petite pour accueillir Le Mobile du Monde. Et la grande fête déménagea alors vers la ville plus spacieuse de Barcelone. Où brillait le même soleil, où le champagne français cédait la place au cava espagnol, La Croisette à l’Avinguda de la Reina Maria Cristina entre la Plaza Espanya et les fontaines face au Palau Nacional. Autre langue, mais même message. Décor plus imposant, mais mêmes acteurs.

Année après année, j’ai vu le congrès grandir en nombre d’exposants et de visiteurs, mais aussi comment le 3GSM s’est transformé en un salon à haute valeur technologique – oui, nous étions alors encore frémissants d’enthousiasme devant un GSM WAP capable pour la première fois d’afficher trois lignes de texte au lieu de deux, ainsi que devant le concept du standard 3G – en un événement de marketing. Le changement d’appellation en Mobile World Congress a ensuite clairement souligné le changement de cap amorcé. Quel fabricant de smartphones – exception faite d’Apple, mais c’est là une toute autre histoire! – peut-il encore se permettre de ne pas y être présent? Et qui oserait ne rien y annoncer?

Le Mobile World Congress est devenu un salon IT.

Depuis lors, le nombre de visiteurs et d’exposants n’a cessé de progresser et depuis 2013, le congrès a lieu dans un endroit plus vaste en dehors du centre de Barcelone. Hasard ou pas: depuis cette année-là, j’observe aussi que les acteurs IT traditionnels en vue acquièrent de plus en plus de stands et se réservent des sessions dans l’aile des conférences. Les grandes annonces de produits qui défraient la chronique, peuvent certes porter sur des smartphones, des ‘wearables’ et d’autres gadgets intelligents, la principale tendance fondamentale, à mes yeux, c’est quand même que la technologie mobile est aujourd’hui indissociable des entreprises et, dans un certains sens aussi, de la société.

Nous nous trouvons dans une réalité ‘mobile first’ qui va beaucoup plus loin que le tout nouveau Galaxy ou iPhone

Machine to machine, internet of things, cloud, big data, analytics, 4G, mobile device management, BYOD et apps: quelle entreprise ose-t-elle encore dire qu’elle n’y pense pas, ne serait-ce qu’un minimum? Soyons clairs: nous n’évoluons pas vers une réalité ‘mobile first’ qui va beaucoup plus loin que le tout nouveau Galaxy ou iPhone, mais nous y sommes déjà pleinement. Si les fournisseurs d’infrastructures, IT et software traditionnels répondent présent au Mobile World Congress, c’est parce qu’ils constatent eux aussi que nos entreprises deviennent plus mobiles que jamais. Et qu’ils ne veulent pas manquer le bateau (pardons, le yacht). Mondain comme en 2006, le mobile ne l’est peut-être plus tout à fait. En 2015, il est plutôt modal, sans que cela soit dénigrant. L’évolution vers une société ‘mobile first’ est amorcée depuis longtemps déjà, et elle est irréversible. Il résulte de cette tendance que le Mobile World Congress est devenu un salon IT. Les navires-amiraux de Samsung et consorts défraient certes encore la chronique, mais la flotte silencieuse qui les suit, a aussi de quoi impressionner.

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