Cerabyte : le stockage à long terme réinventé

Prototype de cartouche basée sur le substrat verre-céramique. © MH
Marc Husquinet Rédacteur de Data News

Face à la traditionnelle bande pour le stockage de données ‘froides’, Cerabyte met au point une technologie basée sur la céramique et le verre. Un substrat qui permettra, selon la startup allemande, de stocker de gros volumes de données sur du très long terme.

Les données ‘froides’, entendez les données qui sont stockées mais qui ne sont que rarement consultées après 90 jours dans une organisation, représentent 70% de la capacité de stockage utilisée. Or ces données sont souvent stockées pour plusieurs décennies. Jusqu’à présent, les entreprises optaient pour la bande magnétique, ou plus rarement pour le disque magnétique, comme support de stockage. Avec des défis liés à l’explosion des volumes à stocker, au coût de ce type de stockage (en termes de consommation d’énergie et d’empreinte carbone notamment), sans oublier la nécessité de migrer régulièrement les données (tous les 5 à 7 ans environ) pour garantir la lisibilité des données.

Procédé révolutionnaire

« Notre ambition est de permettre aux organisations de stocker leurs données à tout jamais sur un support à haute capacité », résume d’emblée Christian Pflaum, CEO et fondateur de Cerabyte, dans le cadre du récent IT Press Tour organisé en Californie. Il faut dire que le marché est gigantesque puisque les analystes évoquent désormais la taille du marché du stockage en ‘yottabytes’ (soit un septillion d’octets), du fait notamment de l’émergence de l’IoT (l’internet des objets), mais aussi de la numérisation et de l’intelligence artificielle. De plus, le marché actuel du stockage, que ce soit la bande, le disque dur ou le disque SSD, ne connaît plus guère d’évolution technologique majeure.

Face à ces constats, Cerabyte a mis au point un nouveau support basé sur un verre ultra-fin (100 microns) recouvert d’une couche de céramique. Une baie de lecture/écriture permet d’enregistrer les données sur le support et de les lire directement après pour vérification. Le processus d’écriture utilise des faisceaux laser nanoscale qui créent un motif semblable à un code QR, mais d’une taille nettement inférieure par la production de trous microscopiques sur la surface de la couche de céramique. Ce support carré d’environ 15 cm est ensuite intégré dans une cartouche qui renferme pour l’instant 3 disques, mais Cerabyte prévoit à terme de glisser jusqu’à 100 disques dans une cartouche.

Toujours selon Cerabyte, ce procédé permettrait de stocker jusqu’à 1 Go par face de disque dans la version actuelle – pas encore en phase de production, mais des brevets ont été déposés sur la technologie.

Durée illimitée

Dans la version actuelle, Cerabyte propose jusqu’à 1 Po dans une baie, avec un débit de 100 Mbit/s, mais envisage dès 2025 d’atteindre 5 Po par baie avec un débit de 500 Mbit/s, et même de 10 à 30 Po par baie avec débit de 1 Gbit/s en 2026/2027, pour arriver à 60 à 100 Po par baie et plus de 2 Gbit/s de débit en 2028-2030.

Cerabyte affirme encore que le substrat résiste à des températures jusqu’à – 273 ° C, à 300°C durant 3 jours à l’air notamment. De même, le disque serait résistant aux champs électromagnétiques, aux UV et aux radiations.

« Nous avons développé ce disque en 12 mois sur la base de technologies existantes. Il s’agit à présent de l’industrialiser. Mais notre feuille de route de développement prévoit déjà des évolutions comme l’épaisseur de la feuille de verre (qui pourrait passer à 5 microns) ou encore le remplacement d’une ‘laser beam matrix’ par une ‘particle beam matrix’ (certes d’ici 2045).

Commercialisation

Au-delà de la durée de conservation des données – Christian Pflaum évoque 5.000 ans de durée de vie du substrat -, Cerabyte insiste sur la consommation énergétique moindre de ce type de stockage, sur le recyclage du substrat et sur la diminution de 100% des déchets. « Nous proposons un coût total de propriété ou TCO de 75% moindre par rapport à la bande ou au disque », ajoute-t-il.

Évoquant les projets de stockage de données sur ADN ou Silica proposés par les labos de Microsoft, Cerabyte estime que ceux-ci offrent des débits plus lents, des capacités inférieures, des échéances de commercialisation plus tardives ou encore un TCO supérieur. « Nous dépassons de loin les technologies de stockage actuelles et émergentes », prétend-il.

Cerabyte envisage trois types de marchés pour sa solution : les archives des organismes publics, le secteur de la santé, du spatial ou des banques, ainsi que les hyperscalers. « Rien ne remplacera rien », ajoute Steffen Hellmold, directeur de Cerabyte Inc. « Nous sommes en mesure de prédire l’évolution technologique à 20 ans au moins, mais encore faut-il la rendre économiquement intéressante. »

D’où l’ambition de créer un écosystème réunissant les fournisseurs de technologie, les spécialistes de l’archivage ainsi que les constructeurs de plateformes et de clouds. « Cet écosystème permettra aussi de garantir la pérennité de l’offre », ajoute-t-il.

Reste à présent à convaincre le marché, à la fois les clients et les investisseurs…

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