Pourquoi Apple Pay rencontre (pour l’instant) un succès mitigé

Ça y est : Apple Pay part à la conquête de l’Europe. Au Royaume-Uni, vous pouvez désormais payer avec votre iPhone au lieu de votre carte bancaire, et ce mode de paiement ne devrait pas tarder à faire son entrée en Belgique. Même si la méthode est simple et très rapide, Apple Pay semble toutefois avoir du mal à décoller pour l’instant. Il faut dire que pour percer, ce service de paiement mobile doit être soutenu par les petits commerçants.

Apple Pay a débarqué cette semaine au Royaume-Uni. Le système fait fureur aux États-Unis, et Apple espère bien entendu exporter ce succès en Europe. Payer sans devoir sortir votre portefeuille, ni mettre votre carte dans un appareil : il faut avouer que l’idée a de quoi séduire. Vous tenez votre smartphone contre un terminal de paiement… et le tour est joué. L’argent est transféré sur le compte du commerçant. Simple et très rapide, car la plupart des utilisateurs de smartphone ont généralement leur fidèle compagnon à portée de main.

Pourquoi Apple Pay rencontre (pour l’instant) un succès mitigé

Les organisateurs de Tomorrowland ont également opté pour un paiement sans contact, mais d’un tout autre genre. Ils ont intégré un système de paiement dans les bracelets portés par tous les festivaliers. Vous chargez le bracelet au préalable et il vous suffit de le tenir devant un capteur pour payer. C’est le même principe que les cartes d’étudiant ou du personnel utilisées pour la cafétéria ou la machine à café.

La facilité d’utilisation du paiement sans contact est un atout absolu. Mais toute médaille a son revers. Dans le cas présent, la sécurité. Pour vous en convaincre, recherchez sur YouTube des vidéos sur la fraude NFC –near field communication, la technologie qui permet le paiement sans contact. Grâce à un petit appareil caché dans un porte-documents, les pirates subtilisent 25 euros à tous les utilisateurs de la technologie NFC. Et vous ne le remarquez que lorsque vous consultez le solde de votre compte. Avec Apple Pay, ce type de fraude est toutefois impossible : vous devez autoriser chaque transaction via le capteur d’empreinte digitale sur votre appareil. Un petit pas en arrière pour la facilité d’utilisation, mais un grand pas en avant pour la sécurité.

Même si l’engouement pour ces nouvelles technologies est important, j’ai quand même quelques réserves. Les serveurs de Keyware sont déjà compatibles avec Apple Pay, mais le lancement du système en Belgique ne devrait pas provoquer de raz-de-marée. Ce sera un mode de paiement parmi les autres. Ni plus, ni moins. La carte de banque n’est pas parvenue à faire disparaître l’argent liquide, alors pourquoi Apple Pay détrônerait-il les autres modes de paiement ?

La carte de banque n’est pas parvenue à faire disparaître l’argent liquide, alors pourquoi Apple Pay détrônerait-il les autres modes de paiement ?

N’oublions pas non plus qu’un commerçant sur trois n’accepte pas encore les cartes bancaires. Les boulangers et les bouchers arrivent en tête des commerçants qui ne veulent pas entendre parler des paiements par carte. Il n’y a aucune raison pour qu’Apple Pay les persuade de se lancer du jour au lendemain dans l’univers du paiement électronique.

Premièrement, le groupe cible est assez réduit : le système est uniquement accessible aux possesseurs du dernier iPhone ou d’une Apple Watch qui doivent par ailleurs être clients d’une banque compatible avec Apple Pay.

Deuxièmement, et c’est certainement le point le plus important : les commerçants seront-ils prêts à accepter cette méthode de paiement ? Ils devront en effet investir dans un terminal compatible avec la technologie NFC et céder un pourcentage de leur marge pour chaque transaction. Pour les cartes bancaires classiques, ce coût est minime et tout à fait acceptable, mais si les tarifs pour Apple Pay sont élevés… Les marges bénéficiaires seront tellement réduites qu’aucun commerçant ne sera prêt à rogner sur son bénéfice pour vendre une bouteille d’eau ou une viennoiserie.

La solution n’est pas évidente. Faut-il supprimer l’argent liquide ? Les mentalités ne sont pas encore prêtes pour cette éventualité, même si ce serait un bon moyen de lutter contre l’économie souterraine. Cela reviendrait à mettre les (honnêtes) commerçants qui n’acceptent que l’argent liquide devant le fait accompli, alors qu’il serait préférable de les convaincre de la valeur ajoutée du paiement électronique. En limitant les frais de transaction, par exemple. Un objectif que devrait notamment se fixer Apple Pay.

Stéphane Vandervelde est CEO de Keyware et spécialiste en paiements électroniques.

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