Que pouvons-nous apprendre du micro-style chinois ?
L’une des grandes forces des entrepreneurs chinois est leur croyance dans les réseaux et les plates-formes. Ceux-ci ont conscience que les plus grands systèmes ne fonctionnent bien que comme un ensemble de petits éléments dynamiques interconnectés. Et que le succès – et cette rapidité légendaire – de leurs macro-systèmes dépend des (micro-)actions de leurs éléments.
Depuis les années 1980, les entreprises chinoises nous imitent. Nous parlons de vol, car elles emportent nos créations. Mais en Chine, les concepteurs s’attendent à voir leurs produits copiés et améliorés, avant d’être ensuite partagés avec eux. En somme, la Chine est depuis pas mal de temps un centre d’innovation ouverte. Les Chinois échangent plus facilement leurs idées et créent ainsi des réseaux de micro-collaboration d’experts qui s’entraident pour créer le puzzle complet. Des entreprises comme Huawei et ZTE le font depuis des décennies, et s’imposent avec cette vitesse d’innovation de produit collaborative en Europe.
Ce qui incite les Chinois à collaborer, c’est la concurrence intense sur le marché chinois et l’impatience des consommateurs chinois ; ceux-ci veulent un produit de qualité, mais à un prix nettement moins élevé qu’en Occident. La Chine est un marché de ‘winner takes it all’. Il faut donc devenir – et rester au plus vite leader du marché pour subsister. C’est ainsi que les Chinois sont devenus maîtres dans l’abaissement constant du coût de chaque composant, tout en améliorant la qualité.
La Chine planche par ailleurs sur un modèle de micro-innovation où les améliorations incrémentales rapides sont plus importantes que des innovations de rupture comme chez Google. Tel est le cas chez DJI, où 2 équipes séparées travaillent sur le même développement de produit pour accroître les contraintes de temps. En Occident, nous sommes davantage intéressés par la création de valeur conceptuelle et moins par le coût ou la rapidité. Mais à présent que les Chinois viennent en Europe, nous ne pourrons plus nous permettre d’avoir le temps.
Les entreprises technologiques chinoises opèrent comme des ruches de start-up, avec une couche de middle management particulièrement mince : tout manager doit fournir des résultats directement et créer rapidement de la valeur pour les clients. Tencent compte plus de 500 groupes de produits qui sont structurés chacun comme une division séparée avec ses propres moyens. Si une entité réussit, elle reçoit davantage de moyens. WeChat est ainsi devenu la réussite la plus importante de Tencent, tout en ne comptant que 5 % de collaborateurs ‘internes’. Un demi-million d’utilisateurs par collaborateur de Tencent : voilà qui est vraiment ‘lean and mean’.
Des géants tels qu’Alibaba, Lenovo, Huawei et Geely vont-ils conquérir le monde ? Après 30 ans, ces marques sont prêtes à percer en Europe. Mais le véritable tsunami d’innovation devrait surtout venir des nombreuses jeunes pousses. Des entreprises comme DJI et ses drones, Mobike et ses vélos partagés, NIO qui entend s’imposer face à Tesla, UBTech et ses robots, ou encore les applis intelligentes de Toutiao et de SenseTime.
Ces entreprises sont totalement différentes de leurs prédécesseurs. Leurs fondateurs ont été formés techniquement en Occident, ils ont acquis de l’expérience en gestion auprès d’Alibaba, Baidu ou Uber China, et mettent en place une équipe d’experts à travers le monde. Ils se qualifient de start-up globales et comptent sur l’IA pour conquérir le monde. Pas en fanfare comme Alibaba ou Huawei, mais à petits pas, marché par marché. Par rapport aux ‘whizzkids’ de la Silicon Valley, ils peuvent faire valoir comme atout supplémentaire de continuer à appliquer le modèle de leurs prédécesseurs : micro-collaboration, micro-innovation et micro-entreprise.
est China Evangelist chez Nexxworks.
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