Pourquoi le secteur technologique émigre vers le Texas

S’il faut en croire les nombreux visiteurs internationaux du salon technologique annuel South by Southwest, Austin est en passe de supplanter définitivement la Silicon Valley. Mais en quoi la capitale du Texas est-elle vraiment attractive pour les start-up, et surtout les jeunes pousses belges ?

Le fait qu’Austin soit considérée depuis longtemps comme la nouvelle Silicon Valley ne doit rien au hasard. En effet, voici plus de 10 ans que les fondateurs de Twitter, Jack Dorsey, Biz Stone, Noah Glass et Evan Williams, y lançaient leur version bêta. Et aujourd’hui, même des start-up belges leur emboîtent le pas. C’est ainsi que Pieter Van Leugenhagen, cofondateur de l’agence belge de réalité virtuelle yondr, y a dévoilé voici peu VRTL, sa 2e start-up. ” Austin apparaît en effet toujours plus comme la nouvelle Silicon Valley. C’est presque devenu La Mecque de la RV. Jan Goetgeluk, un collègue belge, a fondé ici voici 6 ans son entreprise Virtuix. Pour nous, il n’y a donc pas de meilleur endroit que cette ville pour valider notre nouveau concept et nous forger une crédibilité. ”

La culture ‘work hard, play hard’ qui règne ici est encore plus forte que dans la Silicon Valley du fait de l’émergence rapide de l’industrie technologique locale.

Certes, chaque ville affirme vouloir devenir désormais la Silicon Valley du futur. Et notamment Atlanta, capitale de la Géorgie, qui s’est profilé ces dernières années comme la ville technologique par excellence. C’est surtout la diversité qui est mise à l’honneur. Mais lorsque l’on examine les atouts d’Austin comme centre technologique, il est clair que plusieurs arguments jouent nettement en sa faveur. Par rapport à des centres comme San Francisco, le prix de l’immobilier, tant pour les entreprises que les particuliers, y est nettement inférieur – sans parler de la fiscalité. De même, la capitale du ‘Lone Star State’ est en passe de devenir un centre technologique du fait de l’arrivée d’entreprises de renom ou du moins de l’ouverture d’un 2e siège en ville. C’est ainsi qu’Apple a annoncé en décembre dernier sa volonté d’installer un nouveau grand campus à Austin, ce qui devrait se traduire par la création de pas moins de 5.000 emplois en plus des 6.200 collaborateurs existants. Le siège d’Austin d’Apple deviendra du coup le plus important site après le quartier général de Cupertino en Californie.

Pourquoi le secteur technologique émigre vers le Texas
© Getty Images for SXSW

Pour Philip Vanhoutte, qui a notamment travaillé en son temps au siège central de Dell à Austin, cette évolution est parfaitement logique. A l’en croire, Austin pourrait devenir une nouvelle mine d’or pour les entreprises du monde entier. ” J’ai habité durant 27 ans à Austin et la ville peut faire valoir un terreau universitaire particulièrement attractif. Les universités recensent quelque 100.000 talents qui décrochent chaque années leur diplôme dans de nombreux domaines technologiques. Grâce à SXSW, cette métropole est en outre idéale pour tout qui veut faire des affaires en général. Ce festival ne se contente pas d’avoir la réputation de susciter des conversations spontanées. En un rien de temps, on y rencontre une personne avec laquelle vous aimeriez collaborer à plus ou moins long terme en tant que start-up belge. ”

Outre les entreprises technologiques, la ville attire également des talents étrangers. Selon Vanhoutte, plus de 400 professionnels de la technologie s’y installeraient quotidiennement.

Rôle des géants technologiques

L’Américaine Justine Harcourt de Tourville, qui assiste depuis de longues années en Belgique des entreprises technologiques dans le domaine de la stratégie de communication, estime qu’il est temps de procéder à un ‘reality check’. A l’en croire, il ne faudrait pas se montrer trop optimiste quant au boom du secteur technologique d’Austin. ” L’arrivée de nouveaux sites de géants technologiques implique une menace pour l’emploi existant et les conditions de vie. Par ailleurs, des villes comme Austin n’ont aucune infrastructure adaptée pour faire face à cette augmentation de population et aux problèmes de mobilité. ”

Harcourt de Tourville fait référence à Amazon qui a récemment annulé son installation pour la construction d’un nouveau quartier général à New York. L’entreprise de Jeff Bezos aurait en échange reç u pour 3 milliards $ de subsides. ” Plutôt que de détruire des villes, il faut faire des entreprises technologiques une partie de la solution. Les réductions d’impôt sont un leurre. Une entreprise comme Amazon ferait mieux de mettre tout en oeuvre pour améliorer l’infrastructure existante – enseignement, mobilité et soins de santé. ”

Le revers de la Silicon Valley

Mais la médaille a son revers : la concurrence est mortelle, que ce soit au niveau des entreprises ou des talents, avec notamment une hausse des prix des loyers qui poussent les entreprises hors de la ville. Ce faisant, la ‘nouvelle Silicon Valley’ a malheureusement aussi hérité des côtés négatifs de cette réputation. Et nous n’avons même pas évoqué la culture du travail hyper-capitaliste et ultra-performante que Vanhoutte résume en ces termes : ” La culture ‘work hard, play hard’ qui règne ici est encore plus forte que dans la Silicon Valley du fait de l’émergence rapide de l’industrie technologique locale. ”

Pourtant, Nikolaas Bellens, CEO de la start-up HR anversoise Kazi, se montre pour sa part optimiste. ” Nous sommes actuellement à Austin pour South by Southwest et nous avons constaté que, contrairement au passé, il y a beaucoup plus de talents RH de haut niveau. Nos différents entretiens nous ont aussi montré que l’on ne souhaite pas laisser Austin aller aussi loin que la Silicon Valley. ”

C’est ainsi que l’on constate que des start-up belges y réfléchissent à deux fois avant de partir en masser pour le Texas. C’est ainsi que Bellens n’est pas directement enclin à installer Kazi à Austin. ” Une expansion vers les Etats-Unis est à notre programme, mais ce ne sera probablement pas Austin. Il ne faudrait pas oublier que si les opportunités paraissent ici souvent plus vastes, la concurrence y est plus rude également. “

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