Einstein retrouve la parole grâce à Siri

© Jakub Mosur Photography

L’IA, la voix et les API doivent amener Salesforce à franchir un nouveau palier : tel était le fil rouge de la conférence Dreamforce.

Le chiffre d’affaires du spécialiste américain des logiciels cloud professionnels Salesforce a pour la première fois de son histoire, franchi le cap des 10 milliards $ pour l’exercice fiscal 2018. Un exploit réalisé en moins de 20 ans, soit un record pour un éditeur de logiciels d’entreprise. Et au cours des 5 prochaines années, l’entreprise entend doubler son chiffre d’affaires à 20 milliards $. Pas étonnant dès lors que Dreamforce soit devenue la conférence technologique la plus importante de San Francisco : plus de 170.000 partenaires, développeurs, clients et prospects avaient répondu à l’appel. Tandis que la diffusion en direct avait attiré 10 millions ( ! ) de personnes.

Nous permettons aux entreprises d’avoir une vue plus précise et plus complète de leurs clients.

Durant les 3 heures de son discours, le CEO Marc Benioff a, sans surprise, évoqué les notions de ‘mindfulness’ et d’idéologie hawaïenne, sans oublier les inévitables ‘trailblazers’, ces clients qui ont été convertis. Parmi eux, on retrouvait des exemples européens, et notamment la marque de mode italienne Brunello Cucinelli, la britannique Hive (IoT appliqué au chauffage intelligent) et la multinationale Unilever. Pas étonnant, estime Scott Ivell, vp product marketing EMEA de Salesforce. ” L’Europe est une région en forte croissance au sein de Salesforce. ” Et si l’entreprise se refuse à citer le chiffre d’affaires par pays ou le nombre d’employés, les comptes annuels indiquent que Salesforce génère 18 % de ses ventes sur le Vieux Continent, soit 1,9 milliard $ exactement. Certes, il s’agit d’un résultat sensiblement moindre que les 72 % réalisés sur le continent américain (7,58 milliards $), mais une hausse de 2 % par rapport à 2017. Salesforce est particulièrement active en Europe dans le secteur public, même si les priorités varient par pays. ” C’est ainsi que nous sommes très actifs en Allemagne dans l’automobile et la fabrication, tandis que nous sommes davantage présents dans les services financiers et la distribution au Royaume-Uni. Ces derniers temps, nous constatons aussi en Europe davantage de déploiements internationaux, sachant que nous misons de plus en plus sur les multinationales. Unilever en est une belle illustration “, dixit Ivell.

Autre modèle économique

Benioff a par ailleurs consacré une large part de sa présentation à partager sa vision du secteur technologique. A l’en croire, les entreprises doivent s’intéresser beaucoup plus à l’enseignement. ” Rendez-vous dans une école de votre quartier et demandez ce que vous pouvez faire “, a déclaré Marc Benioff à l’auditoire. ” Ce n’est ainsi que les entreprises technologiques pourront attirer les bons profils “, estime-t-il. Et d’insister sur les concepts de confiance et d’éthique. ” La confiance a toujours été notre priorité n° 1 et le restera. La confiance des ‘stakeholders’, clients, partenaires et collaborateurs. Les entreprises qui ne stimulent pas cette confiance se vident : les cadres et les employés s’en vont les uns après les autres. ”

Et de s’adresser ensuite directement à l’assistance. ” Il vous appartient de décider dès maintenant. Car dans un monde en constante évolution, les gens veulent savoir s’ils peuvent avoir confiance en votre entreprise. ” Les propos du patron de Salesforce semblent directement dirigés sur Facebook, Google et Twitter notamment qui doivent constamment se défendre devant le congrès américain face à leur rôle dans l’ingérence russe et les élections américaines. Chez Facebook, de nombreux dirigeants sont d’ailleurs partis ces derniers temps. Tandis que les fondateurs d’Instagram ont récemment quitté le navire. ” Agissons-nous vraiment de manière éthique ? C’est la question que chacun devrait se poser “, note encore Benioff.

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Pas irréprochable lui-même

Reste que Benioff n’est pas personnellement exempt de critiques. Et si peu de visiteurs l’ont remarqué, une trentaine de contestataires ont installé une cage géante sur le site de la conférence, réclamant à Salesforce de renoncer à son contrat avec l’US Customs & Border Protection. La cage faisait référence à la décision de séparer les enfants d’immigrants de leurs parents et de les enfermer. ” Salesforce a l’obligation tant morale qu’éthique de résilier ce contrat si elle veut vraiment être l’entreprise philanthropique qu’elle prétend être “, a déclaré un manifestant au journal San Fransisco Chronicle.

Car Salesforce est non seulement un pionnier du modèle SaaS (Software-as-a-Service), mais aussi un exemple de philanthropie : 1 % de temps, des produits et des bénéfices et/ou du capital est consacré à une bonne cause. ” C’est grâce à ce modèle que nous pouvons connaître une telle croissance “, considère Benioff. ‘Giving back’, soutenir de nobles causes et s’intéresser aux changements climatiques constituaient d’ailleurs cette année le fil rouge des plus de 3.500 sessions proposées aux participants. A propos, nous allions presque l’oublier, des thèmes et des annonces très techniques étaient au programme.

Collaboration avec Apple

C’est ainsi que Salesforce va associer plus étroitement sa plate-forme CRM à Apple iOS. La partie la plus visible de cet accord de partenariat est incontestablement une nouvelle série d’applis iOS natives de Salesforce. L’appli mobile a été refondue est intègre de nouvelles fonctions Apple, comme les Siri Shortcuts, Face ID ou Business Chat. Pour stimuler le développement d’applis verticales, un Mobile SDK sera introduit, lequel a été optimisé pour Swift, le langage de programmation d’Apple. Avec cette annonce, Salesforce se positionne parmi d’autres géants IT comme Cisco, IBM et SAP, lesquels ont annoncé ces dernières années des partenariats étroits avec Apple dans le domaine spécifique du marché professionnel.

Agissons-nous vraiment de manière éthique ? C’est la question que chacun devrait se poser.

Les autres annonces de Salesforce s’inscrivent dans le prolongement de l’an dernier, sachant qu’une personnalisation poussée et l’IA doivent faire la différence. C’est ainsi que l’entreprise dévoilait Customer 360, une application de tableau de bord permettant aux entreprises d’avoir une vue plus précise et plus complète de leurs clients. Il s’agit d’une application transversale et capable de combiner des données de différentes sources. Elle permet d’attribuer une ‘valeur’ à chaque client, avec un score de ‘risk of churn’, à savoir le risque que le client en question de ne se décide pas à finaliser son prochain achat.

MuleSoft : à peine rachetée, déjà intégrée

L’un des nouveaux piliers importants du portefeuille est MuleSoft, une entreprise rachetée fin mars pour 6,5 milliards $. A l’occasion de Dreamforce, Salesforce a insisté sur l’importance de ce rachat. En effet, MuleSoft prend en charge l’intégration d’API existantes, permettant ainsi aux entreprises de connecter leurs API existantes à la plate-forme Salesforce. Plus les sources de données sont nombreuses, plus le tableau de bord se révèle fiable. ” Et aucun code, uniquement des clics “, insiste Greg Schott, CEO de MuleSoft pour synthétiser la stratégie de son entreprise. ” Nous nous chargeons de connecter les données au niveau applicatif, avant d’utiliser ensuite l’analytique et l’apprentissage machine. Le résultat est un réseau d’applications, une véritable approche de plate-forme “, souligne-t-il.

” Aucune donnée n’est transférée et aucune donnée n’est copiée et recopiée, fait encore remarquer Scott Ivell. Sans quoi ce serait non seulement un cauchemar au niveau du RGPD, mais poserait en outre un sérieux problème de sécurité. Tout le monde se souvient du slogan d’Apple à l’époque : ‘There’s an app for that.’ Notre leitmotiv pourrait être : ‘There’s an API for that.’ ” L’un des premiers clients de MuleSoft est Unilever, qui investit aussi massivement dans l’assistant IA Einstein. ” Nous avons mis la puissance de la technologie à la portée des utilisateurs qui ne sont pas vraiment des techniciens, mais qui en ont besoin dans leur métier. La technologie supporte désormais tous les aspects de notre métier. Nous sommes passés d’une IT à base de projets à une IT à base de plate-forme “, dixit Jane Moran, global CIO d’Unilever.

Briefings personnalisés

De son côté, Einstein devient toujours plus intelligent et est désormais doté d’une voix avec Siri – suite au partenariat avec Apple. Dans une démo, l’entreprise a expliqué comme un vendeur disposant de l’appli pouvait interroger un briefing journalier qui lui soit ensuite lu à haute voix. Après quoi il pourra prendre les décisions nécessaires. C’est ainsi qu’il est possible de dicter une liste de tâches qui sera convertie par l’appli sous forme de texte qui sera ensuite analysé par Einstein après une simple pression sur le bouton ‘Analyze’. Ce texte est ensuite traduit en actions concrètes qu’Einstein peut exécuter et qui seront stockées sur la plate-forme Salesforce. ” C’est là que réside notre véritable point fort. Certes, la reconnaissance vocale permet déjà une belle économie de temps, mais notre force réside dans l’intégration d’Einstein, explique Parker Harris, cofondateur et CTO de Salesforce au terme de la démo.

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Le client le plus surprenant ? Metallica !

Ajoutons que le coup d’envoi de la conférence avait été une interview du batteur de Metallica, Lars Ulrich. Qui aurait en effet pu imaginer que le groupe métal utilise la plate-forme Salesforce pour ” se rapprocher de ses fans “, dixit Ulrich. Metallica compte plus de 60 millions de suiveurs sur les médias sociaux. Le groupe utilise pour ce faire Social Studio, mais aussi les outils Marketing Cloud et Commerce Cloud pour supporter notamment le merchandising. ” L’une de nos priorités a toujours été d’améliorer la ‘fan experience’ “, conclut Ulrich.

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D’Ieteren : un projet CRM n’est jamais terminé

L’un des utilisateurs les plus enthousiastes de la nouvelle fonctionnalité annoncée est sans doute Béatrice Pâques, chief marketing & digital officer de d’Ieteren Auto, le distributeur belge des marques du groupe Volkswagen. C’est en 2014 que le groupe a décidé de déployer Salesforce. Aujourd’hui, les 1.200 vendeurs sur le terrain utilisent notamment Sales Cloud, même si D’Ieteren s’appuie également sur Marketing Cloud pour tout ce qui concerne l’automatisation du marketing. De même, le service à la clientèle de D’Ieteren est géré par la plate-forme Salesforce. ” L’annonce Customer 360 nous intéresse parce qu’elle peut certainement nous aider à personnaliser encore davantage le ‘customer journey’, ” explique Béatrice Pâques.

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” Veiller à ce que les clients ne reçoivent que les informations exactes et pertinentes, voilà notre objectif, ajoute-t-elle. Un projet de CRM n’est jamais totalement terminé. ” Ajoutons que D’Ieteren procède pour l’instant à la migration vers la plate-forme Lightning.

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Le groupe Volkswagen représente 1,2 million de véhicules en Belgique. ” Mais en tant que distributeur, nous ne connaissons que la moitié de nos conducteurs. Certaines bases de données sont désormais consolidées, toutes les informations étant stockées dans une seule et même solution de ‘data lake’. ” Nous avons choisi le ‘data lake’ d’Informatica “, confie encore Pâques, qui précise que le projet devrait être finalisé fin de l’année. ” Nos données seront ainsi mieux structurées et nous pourrons intégrer la fonctionnalité de prédiction d’Einstein. Par la suite, la voiture autonome sera le prochain projet majeur en termes de données. Comme je l’ai dit, le CRM n’est jamais terminé “, sourit Béatrice Pâques.

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