Cloud: Vent frais ou écran de fumée?

“Belgacom s’enfonce dans le nuage ‘davantage que Telenet”, titrait hier Data News.

Belgacom s’enfonce dans le nuage ‘davantage que Telenet“, titrait hier Data News.

Je ne peux m’empêcher d’hocher la tête en souriant chaque fois que je découvre le terme cloud. C’est qu’il est utilisé à toutes les sauces et qu’il signifie aujourd’hui ‘everything-as-a-service. Si l’on examine les dépliants et les sites web des fournisseurs cloud, le nuage est en effet la solution à tous les problèmes qui se posent dans notre société. Le terme a été tellement creusé qu’il signifie tout et rien à la fois. A plus forte raison s’il tombe entre les mains impitoyables des vendeurs et autres experts du marketing.

En soi, c’est logique. Le terme cloud a en effet été inventé par un jeune malin qui a eu l’idée d’utiliser les petits nuages employés comme noms de produit par les ingénieurs en réseaux dans leurs dessins. Nous, les ‘techies’, nous utilisons en effet dans nos schémas de réseau depuis belle lurette déjà un petit nuage, lorsque nous voulons reprendre quelque chose dans un aperçu comme sur internet par exemple. Ce sont là en effet des choses qui existent, mais dont nous ne savons pas exactement comment elles fonctionnent ou sont constituées.

Il ne fait pas de doute que tôt ou tard, les grandes organisations du genre Telenet et Belgacom ajouteront le cloud à leurs gammes de produits. Ces mastodontes voient en effet arriver la fin de leur période dorée: ils ont tiré tout ce qu’ils pouvaient au niveau de la connectivité et de la téléphonie, où les prix sont sous pression et où une véritable concurrence devra bientôt venir. Et le nuage constitue théoriquement une grande opportunité pour eux. Ils fournissent la connectivité qui est un élément-clé pour toute solution cloud et ils disposent d’un vaste portefeuille de clients avec qui ils entretiennent ce qu’on appelle en jargon une ‘billing relation’.

Mais que vendent-ils en fait? “CloudOffice” de Telenet n’a rien de nouveau ou de particulier. Il s’agit simplement d’un ensemble de produits hébergés (Exchange, Nomadesk) que Telenet propose en fait depuis des années déjà via sa filiale rachetée Hostbasket. Il ne s’agit certes pas d’un mauvais produit pour les PME, mais quant à le qualifier de révolutionnaire aujourd’hui, il y a de la marge. Et oui, toutes sortes de suppléments y seront ajoutés à l’avenir. “Je dois d’abord le voir pour le croire”, comme dirait l’autre.

Belgacom contre à présent ce non-événement avec son propre non-événement sans vraiment expliquer ce qu’elle va réellement faire. Que propose-t-elle? Office365 et le backup en ligne pour un prix compétitif. Pas vraiment un bon gros et solide nuage, mais plutôt une bruine à basse altitude. Mais Belgacom a aussi des plans et des stratégies. Elle a créé sa propre division Becloud et y a regroupé quelques personnes expérimentées. De plus, elle a consenti des investissements stratégiques dans quelques startups et a tenté de rallier en exclusivité à elle autant de parties et de revendeurs que possible. Une foison de projets, beaucoup de blabla, mais pas grand-chose de concret niveau nuage.

Je me demande d’ailleurs si les clients attendent de déposer tous leurs oeufs dans un même panier, surtout s’il s’agit de leur opérateur télécom. Tout un chacun a bien déjà eu une mauvaise expérience avec son fournisseur et dans cette histoire de nuage, l’on en dépend à 100% et il sera encore plus malaisé de s’en séparer. Ces fournisseurs vendent en effet volontiers le backup dans le nuage, mais comment allons-nous, nous, sauvegarder nos données cloud?

Il n’empêche que le nuage représente une possibilité en or pour les différents opérateurs télécoms, s’ils peuvent aller au-delà de leur réflexe traditionnel, à savoir “nous faisons tout nous-mêmes”. Orientons-les vers l’Appstore et faisons les mettre en oeuvre un écosystème pour applications cloud, dans lequel ils feront ce qu’ils ont toujours bien fait: la relation client, la facturation, la plate-forme de gestion et d’approvisionnement et, éventuellement, fournir l’infrastructure sous-jacente à des tiers plus innovants et plus flexibles. S’ils y ajoutent une bonne dose de contrôle de qualité dans le sens de la sécurité et, surtout, de la disponibilité des applications et des données connexes.

Et puisque je suis quand même en train de rêver, que ce soit un écosystème ouvert et qui porte s’il vous plait un autre nom que le cloud, car la date de péremption de celui-ci est dépassée depuis longtemps déjà.

Jan Guldentops Jan Guldentops est consultant en IT, réseaux et sécurité. Il est aussi chercheur et a un faible pour les solutions open source. Avec BA, il conçoit, crée et supporte toutes sortes d’infrastructures et de solutions de sécurité. Vous pouvez le joindre à l’adresse e-mail la plus courte au monde (j@ba.be) ou le suivre sur Twitter (JanGuldentops). Ce 28 mars 2012 (à 15H30′), il fait partie d’un open panel consacré au débat “what is the impact of cloud on storage?” regroupant différents acteurs à storage expo (http://www.storage-expo.be).

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