Proximus: “Notre réseau 5G sera ouvert à tout un chacun dès le 1er jour”
Proximus vit des moments stressants. En plaine crise du corona, l’entreprise a effectué en effet un premier déploiement 5G. Mais le chemin vers le réseau du futur est encore long, et les enchères spectrales ne constituent pas le seul obstacle à franchir.
Data News a rencontré Geert Standaert, depuis des années CTO de Proximus et récemment promu à la tête de la Network Business Unit. Sa division est chargée de mettre l’énorme réseau à fibre optique et le futur réseau 5G à disposition de chaque entreprise et de chaque consommateur. En même temps, cette nouvelle business unit représente aussi un tournant: Proximus n’est plus l’entreprise qui donne à contrecoeur un accès à ses concurrents, mais préfère voir le plus d’acteurs possibles sur ses réseaux tant fixe que mobile. Récemment, Data News a pu parler avec Standaert de la fibre optique, de la 5G, de la réglementation, d’Huawei et des normes de rayonnement.
Fibre optique
Il y a 15 ans, on serait tombé à la renverse si Proximus, à l’époque encore Belgacom, avait annoncé accepter des concurrents sur son réseau.
Standaert: “Nous sommes en train de répandre cette idée en interne et c’est généralement la première réaction qu’on obtient.
Nous allons aménager Proximus autrement: avec d’une part une branche Services et une branche Network, et d’autre part une Network Business Unit et l’envie de créer les réseaux de demain, de même que des centres de données et des centres ‘edge’. Cela ira de pair avec une accélération du déploiement de la fibre optique.
Nous serons encore la même entité légale, mais la façon de travailler, la gouvernance et les objectifs seront différents. Il s’agira d’un modèle NetCo/ServCo (entreprise de réseau et entreprise de services, ndlr). Notre business unit fournira les réseaux: fixe, mobile, de transport, centre de données, l’IT autour de ces réseaux, et par-dessus, une unité commerciale.”
Où Proximus Services sera cliente du réseau de Proximus Network?
Standaert: “En effet. Nous avons évidemment aussi d’autres clients ‘wholesale’ et avec eux, nous voulons créer une interaction proactive. Et ce, pour tout un chacun intéressé d’accéder à notre réseau. Si tout le monde le fait, nous pourrons nous élargir plus rapidement. C’est là un changement fondamental.”
Notre ambition est de connecter au minimum 400.000 habitations par an à la fibre optique
Ce changement va de pair avec le déploiement accéléré de FTTH, la fibre optique jusqu’à l’habitation ou l’entreprise. De quelle accélération parle-t-on?
Notre ambition est de connecter au minimum 400.000 habitations par an à la fibre optique. C’est là un rythme soutenu, mais si nous pouvons en connecter davantage encore, nous le ferons. Cela représente une vitesse correcte par rapport aux autres pays, mais la machine est à présent au point pour permettre cette évolution.
Il va de soi que nous avons connu cette année pas mal de désagréments, ce qui fait que nos équipes n’ont pas pu travailler en rue pendant longtemps. Nous avons donc perdu du temps, mais nous espérons pouvoir le rattraper au cours du second semestre de l’année.”
Il y eut nettement plus de marge de manoeuvre sur les câbles cuivrés que les esprits sceptiques imaginaient, mais n’avez-vous par conséquent pas débuté trop tard avec la fibre optique?
Standaert: “Pour ce qui est de la fibre optique, on arrive aujourd’hui déjà au coin de la rue, mais nous ne sommes pas les plus avancés par rapport aux pays, où le déploiement de la fibre s’est fait plus nettement dans le passé.
Une fois installé, il ne faudra plus jamais toucher au câble à fibre optique
Il faut ajouter qu’avec notre réseau cuivré, nous occupions l’une des top-positions en Europe. Nous disposons de l’un des réseaux cuivrés les plus performants. Le fait que nous avons fait la course en tête, a un peu joué un rôle. Mais désormais, l’avenir est à la fibre optique dans la maison et l’entreprise.”
Sur un plan purement technique, on entend aujourd’hui que la fibre optique est virtuellement illimitée. Quelle en est l’élasticité? D’ici 30-40 ans, ce réseau sera-t-il encore et toujours suffisant?
Standaert: “Une fois installé, il ne faudra plus jamais toucher au câble à fibre optique. Mais bien à l’équipement chez le client et dans les bâtiments techniques. Là, il y aura toujours des améliorations à terme.
Actuellement, on n’a encore rien trouvé qui soit plus rapide que la lumière. Les performances dépendront surtout de l’évolution technologique du matériel qu’on peut installer chez le client, et son ‘abordabilité’. Dans nos coeurs de réseau, on en est déjà à des liens de 400 Gbps. Tout est possible, mais c’est momentanément encore trop cher pour l’installer chez chaque client.
Aujourd’hui, 1Gbps est la ‘normalité’, alors que 10 Gbps, c’est aussi possible au sein de la zone abordable pour déployer un produit de masse. Mais les choses évoluent, puisque les prochaines versions de cartes (à installer dans des armoires en rue afin de mettre à niveau le réseau, ndlr) seront de 25 ou 50 Gbps.”
5G
Proximus a surpris tout son monde avec un premier déploiement 5G. En Wallonie, il a entre-temps été interrompu en raison d’objections locales. En restera-t-on là ou allez-vous aller de l’avant?
Standaert: “Le processus a été interrompu en Wallonie, parce qu’on nous a demandé de mieux communiquer. Il y eut une nette différence dans les réactions entre le nord et le sud du pays, y compris dans la communication, ce qui a généré plus d’inquiétude, malgré le fait que nous nous trouvions dans le même spectre que des réseaux existants, même avec des normes de rayonnement similaires (Proximus utilise le spectre du réseau 3G pour son déploiement 5G actuel, ndlr). Rien n’a changé sur le plan technologique, mais cela engendre certes de l’inquiétude.”
La forte réaction surtout en provenance du sud du pays, nous ne l’avions pas attendue
Mais Proximus – ou le secteur télécom en général – n’aurait-elle pas dû communiquer plus clairement? Il y eut subitement la 5G, alors que dans la pratique, il s’agit d’une nouvelle technologie dans un spectre existant avec les mêmes normes.
Standaert: “Les ripostes ont été très différentes dans les deux parties du pays, et la forte réaction surtout en provenance du sud du pays, nous ne l’avions pas attendue. Voilà pourquoi nous rectifions à présent complètement le tir en matière de communication, sur nos sites web, vis-à-vis des instances qui nous le demandent.”
Un fournisseur de la 5G va évidemment dire que tout est en ordre…
Standaert: “On entend parfois aussi cette réflexion, mais nous proposons par conséquent toutes les informations dont nous disposons nous-mêmes. Nous travaillons toujours dans le cadre légal.”
Par après, était-il judicieux de lancer la 5G comme une ‘surprise’? Même les licences provisoires ne sont pas encore attribuées*.
Cette interview a été réalisée, avant que l’IBPT ait attribué les droits d’utilisation provisoires. Le spectre pourra être utilisé à partir du 1er août.
Standaert: ” Nous ne pouvons pas nous arrêter là. Voyez les pays voisins: il y a la 5G en Grande-Bretagne. Aux Pays-Bas, on en est à 50 pour cent de bandes reconditionnées (avec les fréquences existantes de la 3G, ndlr), et les enchères ont entre-temps démarré. Deutsche Telekom a annoncé 13.000 sites sur 2.100 MHz. Le Luxembourg va lancer ses enchères. Et en France, les enchères sont prévues pour l’automne. Et non parle que des pays qui nous entourent, à l’exception donc des Etats-Unis, de la Corée ou de certains pays asiatiques qui sont nettement plus avancés.”
Proximus s’intéresse-t-elle aussi aux 26 GHz? Ce qu’on appelle la ‘millimeter wave’ (onde millimétrique), à savoir les extrêmes hautes fréquences de la 5G.
Standaert: “Il n’y a pas de demande pour cela. En ce qui concerne la ‘millimeter wave’, nous la considérons comme un élément prévu au plus tôt dans les cinq ans à venir. Dans un paysage évoluant rapidement, nous ne la mettons pas encore à notre agenda.
Pour tout le reste de la 5G, on en est au niveau du spectre aujourd’hui à peu près comme avec la 2G, la 3G et la 4G. C’est le spectre qu’on connaît et à propos duquel il existe des dizaines de milliers d’études. Les extrêmes hautes fréquences sont déjà utilisée ailleurs, mais elles ne figurent pas à notre agenda.”
Marché professionnel
Plus tôt cette année, je me suis déjà rendu chez Bosch, qui distingue pour la 5G surtout du potentiel sur le marché professionnel. L’imec partage cet avis. Et Proximus alors?
Standaert: “Il y a là à coup sûr une première demande, et on y voit aussi les premiers cases. Tel est le cas de Port of Antwerp, où une embarcation sans équipage examine si les quais sont endommagés, sans compter la surveillance par des drones. A la VRT, il est question de diffusion vidéo et de flexibilité dans le captage des images. Il y a aussi des exemples, où des drones transportent en urgence du matériel médical entre hôpitaux. Mais de nombreux entretiens sont en cours, ce qui démontre l’intérêt du marché professionnel.
On ne peut pas courir après les évolutions techniques, qu’il s’agisse d’un réseau fixe ou mobile
Une récente étude réalisée par Capgemini parmi des entreprises en Belgique indique que 65 pour cent d’entre elles affirment que la 5G est le deuxième plus important catalyseur pour leur numérisation.”
Et le numéro 1 était-il le Covid-19?
Standaert: “Tout en haut, on trouve le passage au nuage. Mais le Covid-19 a effectivement accéléré les choses. Si je considère comment mes enfants ont suivi les cours… Les gens ont fait incroyablement de leur mieux, l’infrastructure a tenu le coup, mais il y a moyen de faire mieux et c’est là qu’intervient la numérisation qui va à présent s’accélérer dans de nombreuses organisations. Nous estimons par conséquent que nous ne pouvons courir derrière les évolutions techniques, qu’il s’agisse d’un réseau fixe ou mobile. Voilà pourquoi nous avons continué d’oeuvrer durant cette période.”
Qu’obtiendra une entreprise avec la 5G qu’elle ne possède pas encore? On entend en général une vitesse de réaction d’1 milliseconde et une largeur de bande de 10 Gbps.
Standaert: “En 5G, il est surtout question de garanties. De certaines spécifications techniques dont on a besoin et que le fournisseur de réseaux ne peut assurer. C’est plus compliqué avec le wifi. Si on développe alors des applications industrielles basées sur un robot qui exécute quelque chose par exemple, il faut que le robot y arrive à un moment spécifique.
Comment traduire cela sur le plan des antennes? On évoque parfois l’image négative d’une ville où on trouve une (petite) antenne tous les 50 à 100 mètres.
Standaert: “La première implémentation de la 5G se fera avec les macro-antennes actuelles. La 5G y est plus efficiente, ce qui la rend intéressante pour le grand public. Le trafic augmente encore et toujours, et il convient de rechercher des solutions pour faire face à cette croissance. Contrairement aux précédentes G, la 5G est nettement plus efficiente et ce, tant au niveau des bits par seconde obtenus, du spectre, que de la consommation d’énergie,… C’est une évolution naturelle de la radio-technologie pour tout le monde.
De plus, on obtient avec la 5G tout le tralala que les entreprises attendent avant tout. Mais c’est quelque chose qu’on appliquera dans l’ensemble du réseau. Donc d’abord sur les grandes antennes existant dès aujourd’hui, puis spécifiquement dans certains parcs d’entreprises sur des antennes supplémentaires.
La Network Business Unit est indépendante et neutre. La branche Services en est vraiment un client important. Mais notre réseau 5G sera ouvert pour tout un chacun dès le 1er jour
“Si on regarde plus loin que les cinq prochaines années, durant lesquelles le trafic des données va croître, il se pourrait que dans certaines zones, s’il y a là à des moments donnés énormément de trafic (ce qu’on appelle les ‘hot zones’), on doive travailler de manière granulaire avec des cellules extra-petites (de petites antennes locales, ndlr). Mais cela dépendra de la demande dans certaines régions.”
Comment allez-vous proposer cela aux grandes entreprises? Vont-elles pouvoir mettre en oeuvre localement un réseau 5G privé sur de vastes sites? Ou un réseau virtuel sur votre réseau public?
Standaert: “Cela peut être une combinaison de tout. Nous pouvons proposer des réseaux privés mobiles ou un slice avec un break-out local sur une macro-antenne proche des entreprises.
Notre vision, c’est de créer nos réseaux mobiles pour tout le monde. Nous avons lancé la 5G, et nos MVNO peuvent en faire l’utilisation eux aussi. La Network Business Unit est indépendante et neutre. La branche Services en est évidemment un client important. Mais notre réseau 5G sera ouvert pour tout un chacun dès le 1er jour.
La gestion d’un réseau mobile est aussi une discipline en soi. Certains acteurs que nous rencontrons à présent, se focalisent davantage sur les réseaux mobiles privés (Cegeka apprécie le spectre 5G pour proposer la technologie aux entreprises, mais elle ne parle pas d’un réseau national, ndlr). Mais cela n’exclut pas qu’elle s’intéresse un jour aux interactions. Nous, nous sommes ouverts aux autres MVNO. Nous fournissons les composants d’infrastructures, mais notre business unit ne s’occupe par exemple pas de l’intégration IT et de tout ce qui en dépend. Même si, soyons clairs, notre division Services s’en charge.”
Normes de rayonnement et réglementation
Alain Maron, le ministre bruxellois de l’environnement, a récemment déclaré, selon Bruzz que la 5G peut être déployée avec les normes actuelles. Mais les opérateurs veulent qu’on les revoie à la hausse, parce que ce serait alors plus facile et plus économique. Est-ce vrai?
Standaert: “Il a aussi dit qu’un débat ouvert allait avoir lieu. Sur ce point, je suis d’accord avec lui. Nous devons discuter autour d’une table et pas via la presse.
Aujourd’hui avec les normes actuelles, il n’est pas possible de lancer la 5G à Bruxelles. Même au niveau de la 4G et de la 4,5G, on atteint nos limites
Aujourd’hui avec les normes actuelles, il n’est pas possible de lancer la 5G à Bruxelles. Même au niveau de la 4G et de la 4,5G, on atteint nos limites. Et on en supporte toutes les conséquences. Certains centres de compétences n’optent aujourd’hui pas pour la Belgique. Nous accusons du retard sur nos pays voisins. Il faut donc organiser un débat sur ce que nous voulons faire de constructif. Mais une autre réglementation doit vraiment voir le jour. Cela doit bouger et pas seulement à Bruxelles. C’est un débat pour Bruxelles, la Wallonie et la Flandre. Dans les trois régions, il faut une autre réglementation, si nous voulons déployer la 5G.”
En Flandre, c’est 20,58 V/m jusqu’à 900 MHz, et 30,7V/m jusqu’à 10 Hz. En Wallonie, c’est 3V/m par technologie. Et à Bruxelles 6V/m pour l’ensemble. Ces 30,7 V/m en Flandre, est-ce un problème?
Standaert: “C’est partout un problème pour un déploiement 5G à part entière. Il ne s’agit pas uniquement de volts par mètre, mais aussi parce que la 5G est un autre type de technologie, qui rayonne parfois oui et parfois non en raison de la formation de faisceaux.” (En formation de faisceaux, le pylône envoie le signal directement vers l’appareil de l’utilisateur, ce qui fait que le rayonnement peut être localement plus élevé, mais aussi plus réduit aux endroits où aucun appareil n’est utilisé, ndlr)
“Cela signifie que le mode de mesurage doit aussi être adapté en fonction des circonstances.”
Donc, Proximus n’attend pas seulement le spectre-test et le spectre définitif, mais aussi des normes de rayonnement actualisées. Et puis, il y a encore la décision de l’exclusion en grande partie d’Huawei – votre partenaire dans le réseau 4G – et de ZTE du réseau télécom.
Cette interview a été réalisée avant que l’IBPT ait accordé les droits d’utilisation provisoires. Ce spectre pourra être utilisé à partir du 1er août.
Standaert: “Il s’agit là aussi d’un élément important dans nos investissements. Mais ce n’est pas le seul. On pourrait le comparer à une opération mathématique. Lorsqu’il n’y a qu’une seule variable, pas de problème, mais s’il y en a trois, cela devient nettement plus compliqué. Il serait beaucoup plus simple si l’on savait quel fragment de la bande spectrale nous était attribué.”
Ce bloc de fréquences spécifique est-il si important?
Standaert: “Il l’est pour l’équipement technique. Et il serait plus aisé de connaître les variables. Nous nous trouvons dans une situation où nous devons aller de l’avant, tout en intégrant parfois certaines choses, mais à présent que la pandémie du Covid-19 nous laisse un peu de répit, nous espérons que plusieurs dossiers pourront progresser. Il est vraiment nécessaire de pouvoir déployer en Belgique aussi un réseau du futur.”
Nous avons vraiment besoin d’enchères finales
L’IPBT est sur le point de distribuer un spectre-test, notamment à Proximus. Cela vous aidera-t-il à progresser?
Standaert: “On va déjà essayer de démarrer. Mais nous ne savons pas s’il s’agit du spectre définitif.”
Mais l’équipement 5G demeure quand même le même, non?
Standaert: “Pas forcément. Nous avons vraiment besoin d’enchères finales, à moins de choisir un équipement convenant pour chaque scénario, mais ce n’est pas non plus toujours évident.”
Dons si vous, Orange ou Base se voit à présent allouer le bloc spectral A, mais que lors des enchères finales d’ici 1 ou 2 ans, cela devient le bloc C, tout devra être renouvelé?
Standaert: “Il convient surtout d’en tenir compte. Si on vous attribue sur la bande des 3,5 GHz seulement un bloc de 40 MHz, il y a le risque que pour l’opérateur que vous êtes, vous acquériez ultérieurement un autre bloc. La position exacte de ce bloc acquis peut en effet jouer un rôle. Je ne parle pas ici pour tous les acteurs, mais à coup sûr pour nous. Il en résulte que si je dois prendre des décisions maintenant en termes d’équipement, je dois choisir les appareils qui conviennent maintenant.”
(La bande des 3,5 GHz se trouve entre celles des 3,4 et 3,8 GHz. Actuellement, l’IBPT a attribué à cinq acteurs des droits d’utilisation temporaires pour la moitié supérieure – 3,6-3,8 GHz – de cette bande, ndlr)
Il faut donc travailler avec le frein à main?
Standaert: “Oui, et tel est le cas pour plusieurs choses. Quand commence-t-on à déployer pleinement l’équipement, s’il n’y a pas de transparence au niveau des normes de rayonnement? Les feuilles de route évoluent entre-temps aussi. Ce qui est disponible aujourd’hui, peut avoir énormément évolué au niveau technologique d’ici six mois. Donc si nous prévoyons à présent des choses que nous ne pourrons pas utiliser dans six mois, mieux vaut attendre davantage de transparence.”
Un pylône d’antennes ne doit quand même pas être rénové tous les six mois?
Standaert: “Ce renouvellement se fait au fil des ans. Or à présent, une explosion 5G est en cours. Et si l’on examine les feuilles de route de l’équipement, dans lesquelles il y a des prévisions sur 18 mois environ, on comprend qu’il y a encore une énorme évolution. Cette technologie se trouve dans une phase précoce et évolue donc encore, surtout sur le plan des performances.”
Dès que les variables deviendront des constantes, ce sera nettement plus simple
Supposons que demain, une main charitable vous vienne en aide avec des enchères spectrales attribuant un spectre définitif à Proximus pour le 31 décembre. Quand pourrait-on espérer un réseau 5G à part entière tel que Proximus l’imagine?
Standaert: “Nous n’allons pas encore révéler ici nos plans de déploiement. Mais nous allons jouer la carte du meilleur réseau mobile. C’est ce qui explique pourquoi nous démarrons dès à présent compte tenu de ce qui est possible. Nos clients professionnels l’attendent aussi de notre part. Ils savent que nous lancerons les premières fonctions et technologies et nous ne voulons pas les décevoir. Mais dès que les variables deviendront des constantes, ce sera nettement plus simple.”
Qu’en est-il du démantèlement progressif de la 2G/3G? Est-ce prévu au planning? Et est-ce nécessaire?
Standaert: “On peut à présent agir plus dynamiquement avec les bandes spectrales. En certains endroits, a-t-on besoin de plus ou de moins? En fait, on évolue avec ce trafic. Si à un moment donné, il se réduit tellement qu’on l’arrête, c’est possible, mais nous n’en faisons pas une obsession.
Pour les autorités, des acteurs tels Huawei ne peuvent être actifs au coeur même du réseau 5G et devraient donc se contenter d’une part de marché limitée. Est-ce aisément envisageable? Un acteur A pour le RAN, un acteur B pour le coeur et un acteur C pour d’autres éléments encore?
Standaert: “C’est faisable. Le RAN (Radio Access Network) et le coeur peuvent accueillir des vendeurs différents. Il va de soi que le choix pour le RAN est dicté par trois facteurs en particulier: l’aspect technico-économique, l’aspect sécurité et une exploitation optimale. Même au niveau du RAN, il est possible de travailler avec deux fournisseurs. Il faut examiner ces trois point lors de l’évaluation.”
Orange
Proximus va collaborer très étroitement avec Orange. Jusqu’où précisément?
Standaert: “Jusqu’à un certain niveau pour le RAN. Il sera question d’une totale flexibilité pour d’autres choses. L’intelligence du réseau se situera dans le coeur. Le réseau de transport sera différent, le spectre sera différent, de même que son utilisation.”
Donc l’émetteur du pylône sera partagé, mais dès que les données migreront sur un réseau à fibre optique, sera-ce séparément?
Standaert: “Non. Là où nous définirons le même type de besoin sur une antenne, nous agirons en commun pour des raisons d’efficience. Mais ce sera indépendamment de la capacité. Il se pourrait qu’en un endroit spécifique, nous ayons davantage de capacité qu’Orange et vice versa.
Notre bande spectrale 2.100 MHz, nous la reconditionnerons pour la 5G. Orange ne devra par conséquent pas faire pareil. Nous nous retrouverons donc avec une structure similaire en hardware, mais pour ce qui est du software, on aura des fonctions de partage du RAN permettant que la boîte physique soit scindée en deux par voie logicielle pour permettre à chaque partenaire d’agir à sa guise.
Il n’y aura aucune limitation au niveau des possibilités sur ce réseau. Mais si nous voulons faire quelque chose en un lieu X et si Orange veut faire pareil, il faudra opter pour une solution très efficiente. Et nous en arriverons à une situation, où chaque opérateur gèrera quarante pour cent de sites en moins et pourra néanmoins faire appel à une grille plus large de vingt pour cent, afin d’amplifier la couverture totale du réseau.”
Le spectre sera-t-il lui aussi partagé?
Standaert: “Non, il ne sera pas partagé, mais indépendant. Nous optons pour une collaboration, mais nous voulons continuer aussi à nous distinguer. C’est possible sur le coeur, sur le transport, sur les services, mais aussi en jouant sur le spectre. Le spectre qu’on active ou le spectre (existant) à reconditionner pour telle ou telle technologie. Ici, la flexibilité sera totale.
Tout le monde sera le bienvenu, même Telenet
Notre ADN est également autre. Proximus est très présente dans les entreprises, ce qui fait que nous avons des besoins différents selon les lieux. Nous voulons continuer absolument à nous démarquer.”
Aujourd’hui, il y a Orange et Proximus. Et si demain, Cegeka annonce qu’elle souhaite proposer la 5G, sans développer son propre réseau national, sera-t-elle la bienvenue?
Standaert: “Elle sera certes la bienvenue pour proposer ses services via le réseau Proximus. Ce faisant, elle profitera aussi directement de la couverture élargie que nous pourrons offrir grâce au réseau partagé. Mais le réseau partagé avec Orange est une pure construction de services avec laquelle nous partageons une infrastructure physique.
Cette collaboration avec Orange porte sur MWingz, qui s’occupe du développement et des services. Une entreprise comme Cegeka est la bienvenue sur le réseau Proximus. Et nonobstant cette collaboration, Proximus et Orange disposeront de fonctions et de capacités différentes. Cegeka est aussi la bienvenue dans notre Network Business Unit pour en devenir cliente, sans avoir besoin d’un spectre propre. Il s’agit là d’un appel que nous avons récemment lancé dans Trends-Tendances: tout le monde sera le bienvenu, même Telenet. Telenet veut-elle accéder à notre fibre, pas de problème. Cegeka est-elle intéressée par une partie de notre réseau mobile? Nous nous mettrons alors autour de la table.”
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