Pourquoi AT&T/Time Warner ne sera pas la dernière fusion média-télécom

Le Roi Joffrey sur le Trône de fer © GOT
Els Bellens

Le géant télécom américain AT&T fusionne avec l’entreprise de médias Time Warner dans le cadre du principal rachat de l’année. Les deux entreprises ne le font cependant pas par amour l’une de l’autre, mais par nécessité.

Le montant du rachat est de 85,4 milliards de dollars (78,4 milliards d’euros), et AT&T met ainsi la main sur un véritable géant des médias. Time Warner, c’est en effet notamment CNN, Cartoon Network, les studios de cinéma Warner Bros. et New Line Cinema, ainsi que la chaîne HBO, celle de Game of Thrones.

Le modèle Apple

Grâce à cet accord, AT&T effectue un nouveau pas en direction du monde des médias. Time Warner, de son côté, disposera en échange d’un tas de canaux en vue de ‘pusher’ ses médias vers les clients. AT&T/Warner entend diffuser des séries et des films vers les téléphones et les téléviseurs et ainsi renforcer tant sa division vidéo que ses abonnements mobiles. “L’avenir de la vidéo est mobile, et l’avenir du mobile, c’est la vidéo”, affirme-t-on chez AT&T.

Cette tendance est manifeste depuis assez longtemps déjà. Les entreprises télécoms veulent proposer à leurs clients un environnement toujours plus exhaustif. A l’instar du modèle Apple. Pensons ici à LeEco, cette entreprise chinoise qui s’est lancée aux Etats-Unis la semaine dernière en proposant une étrange combinaison de téléviseurs, abonnements de diffusion (streaming) et vélos connectés. Ou plus près de chez nous à Telenet et Proximus, qui se plongent toujours plus profondément dans le ‘contenu’ et vont négocier à propos de canaux exclusifs. Telenet produira même ses propres séries TV, comme elle l’a fait il y a quelques semaines avec Chaussée d’Amour.

L’idée, c’est que les personnes ‘modernes’ ne restent pas de 20 à 23 heures vautrées dans leur sofa devant la TV, mais regardent aussi des séries sur leur smartphone, y compris dans le train, suivent des programmes de cuisine sur leur tablette dans la cuisine et composent eux-mêmes leur marathon cinématographique le dimanche après-midi. Les loisirs doivent donc devenir portables, personnalisables et partout disponibles.

Cela signifie que tant les médias que les télécoms doivent sauter dans ce bateau. Pour les médias, il s’agit déjà d’une manière de continuer de gagner de l’argent. Les médias, surtout la télévision traditionnelle, font face à une forte concurrence d’initiatives telles Netflix et, mais oui!, le piratage. Si quelqu’un veut visionner sa série favorite sur sa tablette et qu’elle n’est pas directement disponible légalement, il lui faut bien trouver une autre solution…

Netflix et Google

Les télécoms ne sont depuis longtemps déjà plus un marché en croissance non plus. Sur la fourniture de données mobiles et de services téléphoniques, il n’y a plus qu’une faible marge bénéficiaire aux Etats-Unis, où les télécommunications sont nettement plus abordables qu’en Belgique. Et les opérateurs télécoms doivent eux-mêmes faire face à la concurrence croissante d’entreprises télécoms non-traditionnelles. Google, Facebook et Amazon sont non seulement toujours plus des entreprises de médias (pensez à YouTube), mais déploient aussi leurs ailes vers les télécoms. Facebook entend ainsi offrir le wifi gratuit dans toutes sortes de pays, alors que Google finance des centres de données, en ce compris l’infrastructure et les câbles sous-marins qui vont de pair.

Les seules télécoms ne sont plus une activité viable, alors que les entreprises de médias traditionnelles ne peuvent plus exister par elles-mêmes non plus. Il n’est donc pas surprenant que les deux gants aient fusionné. Ils en ont besoin pour prendre rapidement leurs distances vis-à-vis de la concurrence.

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