Les opérateurs télécoms belges veulent des règles plus strictes pour Google et Facebook

En haut (de gauche à droite): Jos Donvil (Nethys/Voo), Jean-Michel Adant (Brutélé), Marc Lambotte (Agoria) et John Porter (Telenet) En bas: Danny Goderis (Agoria), Michael Trabbia (Orange Belgium), Hans Witdouck (Eurofiber), Dominique Leroy (Proximus) et Peter Veenman (Colt) © PVL
Pieterjan Van Leemputten

La fédération technologique Agoria, conjointement avec les principaux opérateurs télécoms, plaide pour une meilleure réglementation. Ils voudraient continuer d’investir, mais il faudrait alors que les services ‘over-the-top’ tels Whatsapp soient logés à la même enseigne.

Vous devez savoir ce que les opérateurs télécoms en vue font pour vous, votre entreprise et vos instances publiques. La révolution numérique est entraînée et soutenue par vos fournisseurs internet fixes et mobiles. Voilà pourquoi ils injectent des centaines de millions d’euros dans la mise à niveau de leurs réseaux, qui s’appellent aujourd’hui 4G et 4,5G, demain 5G, ainsi qu’un réseau à fibre optique caractérisé par des vitesses gigabit.

Voilà en résumé le ton qui prévalait lors de la conférence de presse organisée par Agoria conjointement avec Brutele, Colt, Eurofiber, Nethys/Voo, Orange, Proximus et Telenet/Base. On n’y a relevé aucune remarque déplacée, mais bien un message très clair: à chacun son dû. Même s’il ne s’agit pas là d’un témoignage en vue d’une hausse des tarifs.

4G et 5G

C’est ainsi que les acteurs télécoms signalent que la couverture 4G a augmenté radicalement par rapport à 2012, maintenant que les normes de rayonnement bruxelloises ont été assouplies, ce qui fait que notre pays possède aujourd’hui un taux de couverture (extérieure) de quasiment 100 pour cent. Mais pour la 5G, les normes bruxelloises sont encore et toujours trop sévères. La 5G a en effet besoin pour certains aspects de nettement plus d’antennes, ce qui fait que les normes de rayonnement sont plus rapidement dépassées.

Tout le monde égal devant le règlement, y compris Facebook

Mais ce sont surtout ce qu’on appelle les acteurs ‘over-the-top’ (OTT) tels Facebook/Whatsapp, Google, Amazon, Microsoft et Apple qui sèment la zizanie au sein du secteur télécom. Ils proposent en effet aujourd’hui des communications (vidéo) et des services de messagerie qui concurrencent les fournisseurs télécoms belges. Le hic, c’est qu’ils ne doivent pas se plier aux règles en vigueur en Belgique.

Pensons ici notamment à l’accessibilité obligatoire du numéro d’urgence 112. Mais aussi à l’interopérabilité avec d’autres réseaux. Autrement dit: une poignée d’entreprises technologiques californiennes (et progressivement aussi asiatiques) gagnent chez nous de l’argent, mais sans devoir respecter les mêmes règles. Or ces règles coûtent très cher aux opérateurs belges.

Dominique Leroy, CEO de Proximus, insiste sur le fait que le secteur télécom belge aspire surtout à ce que tout le monde soit traité sur un pied d’égalité: “Il s’agit d’un ‘level playing field’. Pas de problème pour nous si personne n’est régulé, mais ce qui nous dérange, c’est que les grands acteurs du paysage numérique viennent surtout des Etats-Unis ou d’Asie, alors qu’on ne voit aucun acteur européen se distinguer. Il convient alors de se demander comment et dans quelles conditions ils arrivent à prospérer.”

Leroy nuance ses propos sans pour autant manier la langue de bois: “La fragmentation dans 28 pays européens jouera un rôle à coup sûr. Mais la réglementation peut aussi jouer les trouble-fête. Nous ne pouvons pas faire n’importe quoi avec les données des clients, nous devons offrir de l’interopérabilité, donner un accès aux services d’ordre (‘legal intercept’),… Whatsapp pas.”

“Nous sollicitons surtout l’application de règles égales pour tous. Nous plaidons depuis assez longtemps déjà pour moins de réglementation. Mais s’il y quand même des règles à respecter, il faut les appliquer à tout un chacun, afin que tous les acteurs soient égaux dans le monde numérique.”

La 4G rapporte surtout à Google et à Amazon”

John Porter, CEO de Telenet, partage cet avis: “Nous avons à présent une meilleure infrastructure LTE+ par tête d’habitant que la plupart des pays. Mais la piètre combinaison de la réglementation et de la rapidité que connaît l’évolution globale, fait en sorte qu’aujourd’hui, ce sont surtout Google, Amazon, Facebook et d’autres qui gagnent de l’argent avec la 4G.”

L’appel lancé par les opérateurs n’est pas – il faut que cela se sache – une attaque lancée contre la neutralité du net. “Les services des acteurs technologiques en vue se trouvent sur l’infrastructure des opérateurs locaux et ce, sans que ces derniers en profitent. Mais tel n’est pas le sujet d’aujourd’hui”, déclare Jos Donvil de Nethys/Voo.

“Nous demandons surtout un cadre réglementaire qui soit stimulant, viable et prévisible. Nous possédons actuellement une position de leader en Europe, et il est important de la conserver”, ajoute Donvil qui se réfère entre autres aux efforts consentis par son entreprise pour couvrir ce qu’on appelle les ‘zones blanches’, à savoir les régions wallonnes, où l’on n’atteint pas 30 Mbps avec une connexion internet fixe.

Silence radio

Qu’en pensent Facebook, Google, Microsoft? Data News a aujourd’hui pris aussi contact avec les acteurs ciblés par les acteurs télécoms, mais à une exception près, ce fut le silence radio.

“Microsoft est évidemment ouverte à des discussions avec les différentes autorités et régulateurs. En outre, nous espérons que la législation européenne en matière de communications électroniques, qui sera finalisée bientôt, apportera la transparence nécessaire en la matière”, telle est en teneur le contenu d’un communiqué que Microsoft nous a fait parvenir.

Chez Google, on n’a pas souhaité réagir. Quant au porte-parole pour le Benelux de Facebook, il nous a simplement signifié que son entreprise ne peut (encore) rien communiquer.

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