Les fournisseurs internet réclament une sécurité juridique après le retrait de la loi sur la rétention des données

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Pieterjan Van Leemputten

La Cour Constitutionnelle a sonné pour la sixième fois le rappel de la loi sur la rétention des données concernant la conservation d’informations liées aux trafics téléphonique et internet. Voilà qui met les opérateurs télécoms dans une situation difficile et entraîne du travail de rafistolage de la part du gouvernement.

La loi sur la rétention des données est le cadre légal dans lequel les acteurs internet et les opérateurs télécoms peuvent et doivent conserver pendant une année les métadonnées de leurs utilisateurs, à savoir à qui vous téléphonez, envoyez des sms, des courriels et quand. Le contenu n’est pas concerné.

Hier, la Cour Constitutionnelle a décidé dans un arrêt que l’obligation de conservation est abolie. L’arrêt stipule que la loi du 29 mai 2016 ne correspond pas aux exceptions permises par la Cour européenne de Justice. Autrement dit, la loi va trop loin dans la sape du respect de la vie privée individuelle.

Cette loi permet aux services de police et à la Justice de pouvoir examiner de près le comportement numérique des citoyens, s’il y a suspicion de graves méfaits. En l’abolissant, la base légale de la collecte et de la conservation d’informations est remise en cause.

Tout un chacun aspire à la sécurité

Les opérateurs eux-mêmes se déclarent déçus de l’arrêt. L’association sectorielle ISPA fait observer qu’il s’agit là déjà de la sixième version adaptée de la loi qui ne respecte pas les droits fondamentaux. Mais le secteur aspire surtout à une sécurité juridique. Les opérateurs sont en effet contraints de collaborer avec la Justice. Or la loi qui doit le permettre, contredit la Constitution.

‘Nos membres veulent certes collaborer avec la Justice et avec les services de renseignements, mais aussi protéger les droits de leurs utilisateurs. Il y a donc besoin à brève échéance d’un cadre légal hermétique’, déclare le porte-parole d’ISPA, Lawrence Kerknawi.

Droits de l’Homme

L’affaire a été intentée par l’Ordre des barreaux francophones et germanophone, l’Académie fiscale, la Liga voor de Mensenrechten, la Ligue des Droits de l’Homme et par plusieurs particuliers.

La Liga voor de Mensenrechten est satisfaite de cette démarche, comme elle l’a déclaré à l’agence Belga. Sa présidente, Kati Verstrepen, évoque en effet un piètre travail législatif, où le délai de douze mois est trop long et où la collecte d’informations est trop volumineuse. Pour elle, le fait que chaque service de police ou autre service de sécurité ait un accès facile à ces données et puisse les partager avec des services étrangers, constitue également un problème.

‘Si on avait écouté les organisations des droits de l’Homme, nos aurions à présent déjà une loi sur la rétention des données conforme à la Constitution et aux traités internationaux et permettant de combattre sérieusement les délits.’

Loi de réparation

Les ministres impliqués, à savoir Petra De Sutter (Télécoms), Vincent Van Quickenborne (Justice) et Ludivine Dedonder (Défense) déclarent dans un communiqué commun qu’ils respecteront l’arrêt.

Mais cet arrêt force aussi le gouvernement à présenter rapidement une alternative temporaire. Pour conserver le cadre légal, il faut dans les plus brefs délais une loi de réparation qui tienne compte des remarques de l’arrêt.

Même si la loi enfreint nos droits fondamentaux, sans elle, il s’avère nettement plus compliqué pour la police et la Justice d’appréhender et de condamner les criminels. ‘Dans 90 pour cent des dossiers pénaux, la Justice et la police utilisent des données téléphoniques pour résoudre les affaires. C’est précisément la raison pour laquelle ces données représentent une arme cruciale pour nos services de renseignements et de sécurité dans la lutte contre le crime organisé et le terrorisme’, déclare le ministre de la Justice Vincent Van Quickenborne.

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