Le corps améliore-t-il l’AI?
Une expérience réalisée par l’université de Stanford porte sur la façon dont l’intelligence et le corps sont liés. L’objectif est de créer une AI pour robots, qui évolue par elle-même.
Les animaux et autres êtres possèdent une intelligence corporelle. Que se passerait-il si on dotait l’intelligence artificielle d’un corps (virtuel)? Telle est l’idée sous-jacente à l’étude effectuée par l’équipe du professeur Agrim Gupta à l’université de Stanford. Les êtres exécutent des tâches pour lesquelles ils (et leur corps) ont été créés. Cela est dû à l’évolution et à la façon, dont l’intelligence co-évolue avec le corps. Pensons aux araignées qui tissent une toile sur laquelle elles peuvent facilement se mouvoir grâce à leur longues pattes fines, mais aussi aux léopards qui profitent de leur vitesse d’exécution pour chasser leur proie, parce qu’ils sont ainsi conçus, ou aux personnes qui peuvent utiliser toutes sortes d’outils avec leurs mains adaptées. Or les mains et l’intelligence pour les utiliser évoluent conjointement.
Pour élaborer l’AI, les chercheurs et les développeurs travaillent cependant souvent sous vide. L’intelligence artificielle existe sur un serveur quelque part, mais est dépourvue de ‘corps’. Les chercheurs de l’université de Stanford ont par conséquent examiné l’importance du corps et/ou si ce dernier pouvait contribuer à améliorer l’AI.
Tournoi évolutionnaire
Pour réaliser leur étude, les chercheurs ont créé un monde virtuel, dans lequel une série de petits êtres, appelés ‘unimals’ (l’abréviation d”universal animals’) pouvaient élargir leurs connaissances et être soumis à une sorte de sélection et d’évolution naturelles. Les chercheurs ont ici tenu compte de différents environnements de formation et ont utilisé une espèce de tournoi évolutionnaire en vue de permettre à plusieurs sortes de corps d’être transmis à une nouvelle génération. Au départ, il y avait en tout 576 mini-êtres, chacun avec sa propre structure corporelle, qui pouvaient ressentir l’environnement virtuel, apprendre à naviguer et qui devaient assimiler de petites choses comme ‘envoyer une balle dans une cible’. Une fois l’entraînement terminé, les unimals durent participer à une course, dont le vainqueur pouvait fournir la prochaine génération, plus une mutation. En tout, trois fois 4.000 morphologies furent ainsi étudiées, dont les meilleures s’affrontèrent à la manière des gladiateurs et furent testées sur de nouvelles tâches.
L’étude suggère déjà que les êtres virtuels à la morphologie la plus réussie pouvaient aussi apprendre plus rapidement à effectuer des tâches que les générations précédentes, selon les chercheurs dans la revue Nature Communications et dans un message posté sur le site de l’université. ‘A ce que nous sachions, il s’agit là de la première simulation dans laquelle il est démontré que ce qu’on apprend, peut être accéléré en changeant de morphologie’, explique le professeur Surya Ganguli. Il apparaît ainsi entre autres que les unimals les plus réussis ont été formés dans des environnements plus variables et pas sur un terrain plat. Au fur et à mesure de chaque mutation fructueuse, ils devinrent aussi plus rapides, de telle sorte qu’au bout d’une dizaine de générations, les meilleurs unimals pouvaient apprendre une même tâche en quasiment la moitié du temps mis par la première génération.
L’évolution des robots
L’étude aura probablement un impact sur la conception des robots. L’algorithme utilisé par l’équipe pourrait ainsi permettre la création de robots ayant la forme adéquate pour effectuer des tâches spécifiques. Selon les chercheurs, l’idée qu’on forme une meilleure AI dans des environnements plus complexes signifie également qu’on puisse peut-être aussi utiliser ce genre d’environnement complexe pour faire évoluer les robots capables d’apprendre des tâches dans le monde réel, particulièrement compliqué. Autre découverte passionnante: il serait peut-être aussi intéressant de ne pas essayer en tant qu’homme de créer des robots spécifiques pour des tâches complexes que nous ne voulons nous-mêmes pas faire comme ramper dans des souterrains. ‘Peut-être est-ce là la seule voie de progression pour permettre une évolution dans la conception des robots,’ conclut le professeur Ganguli.
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