La loi de censure allemande opérationnelle: les premiers tweets déjà mis hors ligne
Twitter et Facebook suppriment des messages islamophobes de politiciennes du parti AfD et ce, après que quelqu’un ait fait savoir qu’ils contrevenaient à la nouvelle loi allemande sur les messages haineux.
Depuis le 1er janvier, l’Allemagne cible plus strictement les messages de haine sur les médias sociaux. Beatrix von Storch et Alice Weidel sont les premiers exemples connus de politiciennes à avoir vu leurs messages supprimer.
Il était question ici de voeux de Nouvel An adressés par la police de Cologne sur Twitter. Le tweet, dans lequel la police invitait également à fêter la nuit de la Saint-Sylvestre ‘avec respect’, avait été envoyé en allemand, en anglais et en français, mais aussi (tout comme l’année dernière) en arabe. Cela n’a pas plu à Beatrix von Storch. “Que se passe-t-il donc dans ce pays?”, a réagi la vice-présidente d’Alternative für Deutschland (AfD). “Pourquoi un site web officiel de la police tweete-t-il en arabe? Pense-t-il ainsi plaire à ces groupes de musulmans barbares qui violent les femmes?”, a-t-elle dénoncé en se référant aux viols en groupe ayant eu lieu à Cologne lors de la nuit du réveillon il y a deux ans – qui avaient été principalement commis par des jeunes migrants.
Le message fut rapporté par des utilisateurs anonymes de Twitter, à la suite de quoi le réseau social le supprima. En outre, le compte Tweeter de von Storch fut bloqué environ douze heures durant. Lorsque la parlementaire AfD répéta son message sur Facebook, il fut également supprimé.
“Facebook ma censurée: c’est la fin de l’Etat de droit”, a répliqué la femme politique, lorsqu’elle eut de nouveau accès à Twitter. La cheffe de fraction AfD Alice Weidel la conforta par un tweet, dans lequel elle fustigeait la nouvelle loi allemande. “Ce début d’année est placé sous le signe de la censure. Notre gouvernement se soumet à ces bandes de migrants importés, armés de couteaux qui passent leur temps à piller et à ne rien respecter chez nous. Ma collègue Van Stroch critique à juste titre un tweet de la police en arabe et quel est le résultat? Elle est bannie!”, écrit-elle. Ce tweet fut lui aussi rapporté, puis supprimé. La police de Cologne a entre-temps déposé une plainte à l’encontre de von Storch pour ‘incitation à la haine’.
La Netzwerkdurchsetzungsgesetz (NetzDG) est la première loi en Europe qui combat strictement les messages haineux sur les médias sociaux. Les entreprises internet sont désormais tenues de supprimer dans les 24 heures les messages qui enfreignent la constitution allemande. Si elles ne le font systématiquement pas, elles encourent une amende pouvant s’élever à 50 millions d’euros. Un délai plus long s’applique aux commentaires moins durs, même s’ils sont considérés également comme inacceptables.
La loi a été approuvée en juin 2017. Un mois plus tard, cinq cents collaborateurs de Facebook se sont mis à passer au crible les messages rapportés. Depuis le 1er janvier, ils examinent aussi si la loi est vraiment bien respectée. Quiconque choisit ‘Allemagne’ comme pays dans les paramètres de Twitter, puis veut rapporter un message, se voit proposer l’option supplémentaire de l’infraction à la loi NetzDG. Facebook ne fait pas encore explicitement référence à cette loi, lorsque quelqu’un rapporte un message.
Dans les milieux d’extrême-droite, chez les activistes internet et auprès des entreprises technologiques, les critiques ne manquent pas vis-à-vis de la nouvelle loi. L’une des difficultés est de déterminer si un message incite véritablement à la haine. On craint par conséquent que Facebook et Twitter appliquent une interprétation très large des messages pour des raisons subjectives et les considère dès lors vite comme ‘injurieux’ ou ‘offensants’. Voilà qui pourrait renforcer encore le climat de censure.
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