Interview – Cegeka et Citymesh: ‘Notre objectif est de devenir le quatrième opérateur sur le marché professionnel.’

Stijn Bijnens et Mitch De Geest © Cegeka
Pieterjan Van Leemputten

L’un des principaux acteurs ICT belges unit ses forces avec l’une des plus importantes firmes télécoms professionnelles. La limbourgeoise Cegeka et la brugeoise Citymesh se sont en effet mutuellement trouvées sur un marché qui, selon elles, deviendra plus grand que celui des télécoms classiques.

Data News a rencontré Stijn Bijnens, CEO de Cegeka, et Mitch De Geest, CEO de Citymesh. Cegeka a en décembre pris une participation majoritaire dans Citymesh et a fait directement comprendre que les activités télécoms débutantes de la multinationale limbourgeoise navigueront désormais sous pavillon Citymesh. Mais il ne s’agit pour autant pas d’un rachat. ‘C’est l’union de nos forces’, précise Stijn Bijnens.

Cegeka s’intéressait-elle depuis longtemps déjà à Citymesh? Ou était-ce Citymesh qui recherchait depuis quelque temps un investisseur supplémentaire ou un repreneur?

Stijn Bijnens: Ce genre de collaboration revêt deux aspects. Cela fait deux ans que je suis chez Cegeka, mais j’ai toujours fermement cru en une convergence entre les télécoms et l’IT. Grâce à la 5G, d’énormes opportunités se présentent désormais. Le protocole permet cette collaboration, afin de considérer les télécoms comme une application dans le nuage. Et en Belgique, il y avait une opportunité de proposer des solutions ‘cloud’ assez disruptives au départ d’une application.

Dans ce cadre, nous voulions nous positionner avec Cegeka. Nous nous distinguons au niveau des applications et ce, tant dans notre propre nuage que dans le nuage public. En Belgique, il y avait aussi de la place pour un quatrième opérateur B2B. Nous avons donc décidé de tenter notre chance, mais il existait d’autres candidats, et Citymesh était, selon nous, le principal challenger. Si nous voulions défier les trois opérateurs existants, mieux valait unir nos forces.

C’était soit fusionner, soit concurrencer. Cela a-t-il pris beaucoup de temps pour vous trouver?

Bijnens: Nous allions devenir des concurrents, une fois que le marché de la 5G allait exploser ou prendre une forme plus stratégique. Mieux vaut que deux challengers ne se concurrencent pas, afin de proposer autrement de nouvelles solutions plus rapidement. Nous nous étions déjà rencontrés il y a deux ans déjà. Au début, on tâte le terrain, mais à un moment donné, on remarque qu’on a la même vision.

Toutes les études au niveau mondial montrent que le marché des réseaux privés mobiles va exploser et devenir plus important que le marché télécom traditionnel.

Mitch De Geest: En 2019, nous avons pu mener à bien plusieurs projets dans le port de Zeebrugge et à Brussels Airport, où nous nous étions positionnés comme challenger des trois grands opérateurs. Mais nous sommes purement un acteur télécom. Si on veut assumer le rôle de quatrième opérateur – un plan que Cegeka avait aussi -, il faut avoir les moyens de ses ambitions.

Toutes les études au niveau mondial montrent que le marché des réseaux privés mobiles va exploser et devenir plus important que le marché télécom traditionnel. Cela n’a pas échappé

non plus à de nombreux investisseurs. Nous avons donc négocié avec pas mal de capital-risqueurs en Belgique, à Londres, à Paris et aux Etats-Unis. En fait, nous n’avons débuté les tractations avec Cegeka qu’assez tard, mais à ce moment-là, son ambition 5G était encore plus manifeste.

En fait, nous n’avons débuté les tractations avec Cegeka qu’assez tard.

Le coeur de métier de Cegeka est l’IT, alors que le nôtre est les télécoms. Ce que nous possédons en spectre et en expérience avec des réseaux privés, le déploiement, la mise en oeuvre, Cegeka l’a un peu moins. Par contre, il nous manquait le côté IT: virtualisation, data science, analytique, car il faut aussi pouvoir faire quelque chose de ces données pour le client. Il fut dès lors rapidement évident pour nous, mais aussi pour Stijn et André (Knaepen, le président de Cegeka, ndlr) qu’il valait mieux poursuivre conjointement.

Peut-on qualifier l’opération de rachat ou pas? Nous ne le considérons pas ainsi, parce que nous continuons d’exister en tant que Citymesh, notre direction reste aussi actionnaire, mais notre vision du marché est en très grande partie identique, renforcée encore par la connaissance que nous avons chacune séparément. Nous sommes très complémentaires. Cegeka cible entre autres les hôpitaux, l’agriculture, la logistique, des marchés dont nous sommes absents. Mais où le réseau mobile-privé jouera un rôle important, ce qui fait que là aussi, nous nous complétons parfaitement.

Zeebrugge
Zeebrugge© Belgaimage

Et cette branche télécom professionnelle deviendra, selon vous, plus importante que le paysage télécom actuel?

Bijnens: Certainement. Cela dépend évidemment de ce que vous y placez. Mais nous sommes onze millions de Belges, et il y aura nettement plus de dix millions d’appareils 5G. Cela offrira aussi plus de valeur qu’un abonnement en B2C. Nous proposerons une solution dans le nuage, une plate-forme de données: il faut considérer le volet intégration.

De Geest: Voilà précisément ce que nous pourrons proposer en collaborant. Regrouper toute la chaîne des valeurs autour de la 5G.

Le wifi sera encore utile en certains endroits. La 5G portera sur la fiabilité, la sécurité, les applications ‘mission critical’. Là, le protocole wifi ne convient pas.’

La 5G va-t-elle aussi cannibaliser à terme les use cases pour le wifi?

Bijnens: Non. Les réseaux mobiles privés vont pouvoir reprendre une partie de ces use cases, mais le wifi sera encore utile en certains endroits. La 5G portera sur la fiabilité, la sécurité, les applications ‘mission critical’. Là, le protocole wifi ne convient pas.

Quand verra-t-on les premiers projets communs?

De Geest: Nous nous efforçons à présent surtout d’apprendre à connaître les différents départements de Cegeka et vice-versa. Ces dernières semaines, nous avons beaucoup appris l’un de l’autre, mais nous constatons aussi que la complémentarité, dont nous parlions, existe bel et bien.

Là où nous nous arrêtons ou où nous éprouvons des difficultés pour aller de l’avant, Cegeka prend parfaitement le relais et vice-versa. Cegeka devient peut-être quelque peu nerveuse au fur et à mesure qu’elle se rapproche des ‘devices’, nous pas. Mais lorsqu’il est question de lacs de données, nous nous sentons moins à l’aise, tout le contraire de Cegeka.

Les premiers projets concerneront surtout nos clients mutuels.

Bijnens: Ce sont souvent des dossiers IoT dans de grandes firmes industrielles ou organismes publics. Ils se trouvent progressivement dans une situation, où le wifi ne suffit plus pour leurs projets IoT, mais bien la 4G ou la 5G. Surtout lorsque l’analytique des données vient s’ajouter, nous pourrons désormais élaborer une proposition concrète.

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.© Cegeka

Un rachat complet est-il une option à terme?

De Geest: Tout est possible. Nous examinons ce qui est préférable pour l’entreprise et pour l’instant, c’est cette solution que nous avons choisie.

Bijnens: Cette structure n’est pas nouvelle pour Cegeka. Au sein du groupe, nous avons des filiales qui possèdent chacune des actionnaires, des clients, du personnel et des partenariats. Tel est le cas par exemple de nexuzhealth en matière de soins de santé. L’avenir de ces filiales évolue en fonction de la dynamique du marché et de ce qui est le mieux pour elles. Citymesh est à présent notre branche pour les télécoms, mais on pourrait envisager à terme des rachats ou d’autres trajets en finance d’entreprise.

Nous effectuons des rachats sur base de notre cash flow. Cela nous rend précautionneux, car c’est de l’argent qu’on a gagné en équipe.

Il ne s’agit sans doute pas là du dernier investissement télécom de Cegeka?

Bijnens: Rien n’est jamais fini. Cegeka est une entreprise très saine. Nous effectuons des rachats sur base de notre cash flow. Cela nous rend précautionneux, car c’est de l’argent qu’on a gagné en équipe. Mais cela nous permet aussi de continuer de croître en externe et de poursuivre le financement de Citymesh, s’il se présente de bons projets.

Nokia restera-t-elle le principal fournisseur de matériel télécom? Citymesh collabore étroitement avec elle, mais dans une précédente interview, vous indiquiez aussi ne pas être chaud à l’égard de partenaires chinois.

Bijnens: Nous nous positionnons comme une entreprise européenne ciblant des firmes et des pouvoirs publics européens. En matière de nuage et de télécoms, on se dirige vers plus de réglementation axée sur la gouvernance des données et donc, en tant qu’acteur européen ayant des clients européens, il convient d’en tenir compte aussi sur le plan géopolitique. En outre, nous travaillons avec des fournisseurs qui s’avèrent les meilleurs pour nos clients et qui souscrivent à notre vision d’un environnement ‘cloud’ défini par logiciel et virtualisé.

De Geest: Du point de vue télécom, il faut faire preuve de réalisme. Si on regarde la réglementation et tous les conseils en la matière, on sait aussitôt qu’il serait très malaisé de travailler avec certains acteurs dans des environnements ‘mission critical’, dans des aéroports ou au sein de pouvoirs publics. Voilà pourquoi nous avons toujours aspiré à une relation avec un acteur européen. Nous entretenons en effet une bonne relation avec Nokia qui possède de belles solutions en matière de réseaux privés autonomes.

Un opérateur classique recherche un seul coeur pouvant accueillir des millions de gens. Nous, nous recherchons des centaines de coeurs où ne se retrouveront peut-être que cent ou mille utilisateurs par coeur.

Mais comme le dit Stijn, nous avons une vision selon laquelle les télécoms vont s’orienter de plus en plus vers l’IT, et nous sommes occupés à effectuer un assez vaste sondage du marché, y compris auprès des nouveaux acteurs dans le paysage télécom, pour être sûrs que nous pouvons être disruptifs pour tous les use cases, lignes de fabrication, campus, hôpitaux, etc. par rapport à un opérateur traditionnel.

Un opérateur classique recherche un seul coeur pouvant accueillir des millions de gens. Nous, nous recherchons des centaines de coeurs où ne se retrouveront peut-être que cent ou mille utilisateurs par coeur et pouvant de préférence dialoguer aussi avec les coeurs publics. C’est une toute autre expérience, et on observe que les vendeurs traditionnels tels Nokia ou Ericsson éprouvent du mal à être à la hauteur.

En même temps, on voit des firmes comme Mavenir et Microsoft, qui a récemment racheté des acteurs ‘core’ (Affirmed Networks et Metaswitch, ndlr), y réagir. Donc dans le courant de 2021, on verra conjointement avec les ingénieurs IT de Cegeka ce qui est possible et quel sera le meilleur trajet vers la 4G et la 5G. Pour beaucoup de clients, le LTE privé est aujourd’hui encore plus intéressant que la 5G privée. Mais il faut pouvoir évoluer. Peut-être ce choix ne se limitera-t-il pas à un seul vendeur, mais portera plutôt sur des modules de différents vendeurs.

Citymesh a aussi conclu un accord avec Proximus pour les services fixes et mobiles. Est-ce pour pouvoir faire de l’itinérance en dehors des réseaux d’entreprise ou faut-il y voir autre chose?

De Geest: L’objectif ici, par exemple pour un réseau mobile privé d’un hôpital, est d’utiliser une seule carte SIM dans l’appareil et de permettre à ce dernier d’accéder au réseau privé. Mais dès que le client sortira de cette ‘bulle’, l’appareil migrera vers le réseau de Proximus.

Ce faisant, il sera également possible d’adapter toute une série de paramètres de sécurité, mais aussi adopter un autre mode de facturation, prendre même à terme peut-être une portion (‘slice’) et l’intégrer dans le réseau national. Il y a des opérateurs qui proposent aux clients une portion sur leur réseau. Nous, nous proposerons une infrastructure complète pour une usine ou un campus pour y utiliser différentes portions permettant par exemple d’accorder la priorité à certaines choses.

Dans ce genre de bulle, l’entreprise exerce un contrôle total. Qui s’y trouve et ce qui s’y passe, que faire en cas de problème ou de catastrophe? Comment maintenir le réseau opérationnel? Ce marché s’ouvre maintenant complètement, parce qu’il existe beaucoup plus de modules permettant de développer des solutions pour un use case spécifique.

Mitch De Geest et Stijn Bijnens
Mitch De Geest et Stijn Bijnens© Cegeka

En raison du rachat, toutes les activités télécoms de Cegeka rejoindront Citymesh. Cela va-t-il permettre à Cegeka de se focaliser davantage sur ses activités IT et que pourra faire Citymesh en plus que ce qu’elle pouvait faire sans Cegeka?

Bijnens: Absolument. Nous sommes un externaliseur IT, ce qui inclut parfois le réseau, et Citymesh aura à présent un grand rôle à jouer. Nous pourrons nous concentrer également davantage sur cette couche réseautique. Nous voyons croître la gestion des postes de travail en tant qu’activité. Aujourd’hui, il n’est pas uniquement question de faire fonctionner un ordinateur portable, mais aussi tout un réseau à partir de n’importe quel endroit. Mais nous pourrons aussi assumer une responsabilité complète en cas de problème chez un client.

Dans le nuage, on pourra également tout mieux organiser via la 5G, mais en recourant aussi à la containerisation et à de nouvelles techniques logicielles. On pourra effectuer du traitement d’image AI dans un nuage public, mais en partie aussi en périphérie (‘edge’), par exemple dans une caméra. Faire tourner tout cela de manière optimale représente un parcours très passionnant et avec Citymesh, nous serons plus proches de la périphérie et du côté réseau. Gartner appelle cela le nuage distribué, et nous sommes curieux de voir comment cela va se développer en Europe.

De Geest: La 5G permettra aussi de travailler avec des modules et de les faire évoluer en fonction de l’objectif. Chez Citymesh, on pourra à présent aussi utiliser les centres de données de Cegeka en Belgique et aux Pays-Bas. On pourra alors placer des choses chez le client, mais éventuellement avec un système de sauvegarde dans le nuage privé ou public. Il sera possible de procéder à des combinaisons pour proposer la meilleure solution possible.

Donc sous Cegeka, il y aura aussi pour Citymesh d’autres projets possibles que ce que vous avez fait jusqu’à présent?

De Geest: Assurément. Pour ce qui est d’implémenter le volet télécom, mais aussi de le rendre abordable financièrement et paré pour le futur. C’est surtout au niveau des données que Cegeka s’avère très forte.

Si on voit ce que nous transférons déjà comme données, cela aboutit dans une base de données ou un lac de données, mais il convient alors de les interpréter et d’optimaliser ainsi l’activité. Or cette connaissance, nous ne la possédons pas en interne chez Citymesh, mais Cegeka bien. Cela veut dire que la valeur de notre réseau s’amplifiera, parce que nous pourrons combiner cette connaissance.

Comment cela va-t-il se traduire au niveau des licences spectrales que Citymesh et Cegeka possèdent à présent conjointement?

Bijnens: Tout le spectre que nous détenons ensemble, passera chez Citymesh.

Avec la combinaison de ces fréquences y aura-t-il plus de possibilités qu’avec les licences individuelles séparées?

De Geest: Expliquons les choses très simplement: nous disposons toutes deux d’un fragment du spectre 5G, Cegeka grâce au rachat de Gridmax. Citymesh a en 2020 aussi acheté le dernier fragment du spectre 4G. Le tout sera désormais regroupé, ce qui fait que nous pourrons élaborer une stratégie et une feuille de route claires.

Nous possédons le spectre 5G jusqu’à la mi-2025. Pour ce qui est de la 4G, nous disposons par exemple de la bande 2,6 GHz que nous pourrons utiliser durant les 15 prochaines années, mais on voit qu’on mise aussi sur le 5G aux Pays-Bas. Nous nous attendons donc à ce qu’il en soit ainsi ici également.

Citymesh a précédemment déjà eu de la chance, lorsque vous avez subitement pu utiliser aussi le spectre Wimax pour la 5G.

De Geest: C’était un pari raisonné. Nous avions acheté un fragment de la bande Wimax, laquelle fut ultérieurement re-destinée à la 5G par l’Europe. Cela a eu un impact sur la façon dont notre entreprise a crû par la suite. En regroupant cela avec le spectre de Cegeka, nous aurons assez de poids face aux opérateurs traditionnels.

Sera-ce pleinement pour la 5G ou êtes-vous encore ‘accrochés’ à la 4G?

De Geest: Pour les appareils de l’utilisateur final, le support de la 5G semble à présent être mis en branle. Pour les appareils industriels, comme les ‘rugged devices’ ou le ‘push-to-talk’, il s’agira d’attendre encore un peu.

Entre-temps, nous sommes déjà occupés sur des réseaux privés 4G, ou 4,9G comme l’appelle Nokia. Mais avec une feuille de route claire pour une mise à niveau vers la 5G dès la sorte de ces appareils. Ce genre de chose, nous pouvons à présent le planifier à long terme pour les 15 prochaines années. La consolidation y convient très bien.

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Quelle est la place réservée à Gridmax? Elle possède également un spectre 5G. A-t-elle encore une plus-value, maintenant que Citymesh appartient aussi à Cegeka?

Bijnens: Cegeka est une entreprise belge. Nous sommes donc également actifs sur le marché wallon, où nous nous profilons comme un acteur local. Nous le faisons depuis assez longtemps déjà avec NSI en tant qu’intégrateur, alors que pour Citymesh vient maintenant s’ajouter Gridmax (lors de la transaction entre Cegeka et Citymesh, Gridmax a rejoint Citymesh, ndlr). Donc indépendamment de la position spectrale, Gridmax s’avère importante pour la présence locale en Wallonie.

Citymesh est-elle actuellement très active sur le marché wallon?

De Geest: Pas énormément, mais sur base de notre passé wifi, nous commençons à y décrocher plusieurs contrats ‘smart city’, notamment à Marche-en-Famenne et à Wavre. Voilà pourquoi, nous apprécions aussi Gridmax, puisque cette filiale nous permet de renforcer notre position en Wallonie.

Vous voyez-vous aussi louer du spectre à d’autres acteurs sans licences propres? Avec la 5G, ce sera possible en des endroits spécifiques.

De Geest: C’est là l’affaire du courtier en spectre, mais la demande sur le marché est plutôt limitée. Les entreprises veulent une solution, et on y observe une plus forte demande de Network as a Service, où nous prenons pour elles le contrôle du réseau et de la pile IT, sans qu’elles doivent posséder un savoir-faire en interne pour maintenir tout cela opérationnel. Moi-même, je ne peux que difficilement m’imaginer que dans les grandes entreprises, il y ait une demande d’achat de spectre.

Mais qu’en sera-t-il des autres intégrateurs télécoms – vos concurrents – qui ne concourent pas pour le spectre, mais qui proposent des services télécoms, tels E-bo?

Bijnens: C’est permis juridiquement, mais je n’en vois pas l’utilité. Un Network as a Service est nettement plus économique.

De Geest: En outre, ce n’est pas toujours évident. En Allemagne, le régulateur autorise la fragmentation du réseau et sa location au niveau local. Mais dans ce cas, il faut aussi contrôler qu’il n’y ait pas de perturbation, lorsque l’acteur A travaille avec un vendeur et que l’acteur B travaille avec un autre. Ici en fin de compte, nous sommes responsables du spectre vis-à-vis de l’IBPT. Si on traduit cela dans un environnement comme le port d’Anvers, où il y a plusieurs parcs d’entreprises, il faut vérifier en permanence qu’il n’y ait pas de litiges.

Avec autant de possibilités pour la 5G, reste-t-il encore de l’espace pour des projets sur 4G ou wifi?

De Geest: A court terme certainement. Pour des choses comme wifi 6, je m’attends aussi à ce qu’un rôle incombe encore au wifi dans les dix, voire dans les vingt prochaines années. A long terme, tout va évoluer vers la 5G. Mais nous aurons le choix, car nous avons acquis de l’expertise en wifi et nous possédons notre spectre pour la 4G et la 5G. Voilà pourquoi nous ne devons pas imposer de solution aux clients. Nous écouterons leurs desiderata et nous y adapterons la solution.

Nous avons vu un terminal de containers qui entend relier toutes les grues sur base du wifi. Dans ce but, il convient d’entretenir septante émetteurs wifi pour obtenir une durée de fonctionnement (‘uptime’) de 96 pour cent. Nous l’avons déjà fait avec la 4G, où on utilise deux émetteurs pour atteindre une durée de fonctionnement supérieure à 99 pour cent.

Dans les hôpitaux, on constate souvent que tout passe par le réseau wifi. Cela marche, mais on constate aussi que le réseau est mis sous pression, car les patients amènent eux aussi leurs propres appareils pour la diffusion vidéo, alors que des applications pour missions critiques tournent également sur ce réseau. Les hôpitaux ont alors tendance à mettre à niveau vers wifi 6 pour leurs patients. Mais il y a en plus un réseau privé mobile sur lequel tournent des capteurs, services vocaux et applications critiques.

Il y a peut-être la perception que nous prenons nos distances par rapport au wifi, mais tel n’est pas le cas. Nous avons des équipes pour le wifi et d’autres pour les réseaux mobiles. Le tout est à présent complété par Cegeka qui peut se charger de tout au niveau des données.

On distingue une voie menant vers le futur: actuellement, c’est le wifi, la 4G et la 5G, mais à terme, il s’agira d’une technologie où le wifi et la 5G se rapprocheront davantage l’un de l’autre.

Et pour le wifi?

De Geest: Il existe tout un marché pour les écoles, les halls d’exposition, les hôtels, etc. où le business case de la 4G privée est moins judicieux aujourd’hui. Il y a peut-être la perception que nous prenons nos distances par rapport au wifi, mais tel n’est pas le cas. Nous avons des équipes pour le wifi et d’autres pour les réseaux mobiles. Le tout est à présent complété par Cegeka qui peut se charger de tout au niveau des données.

Il va de soi qu’on fait plus rapidement la une des médias avec la 5G. Si j’envoie demain un communiqué de presse pour signaler que nous allons déployer un réseau wifi à Bruxelles, la nouvelle sera peut-être relayée dans un journal, mais si nous annonçons que nous allons mettre en oeuvre un réseau 5G, nous figurerons à coup sûr sur la première page de De Tijd.

Qu’en est-il des ambitions internationales de Citymesh? Seront-elles accélérées par la participation de Cegeka, qui est déjà active dans de grandes parties de l’Europe?

De Geest: Notre tâche principale est de devenir à présent le quatrième opérateur en Belgique sur le marché professionnel.

De plus, il existe des critères que nous utiliserons pour nous tourner vers l’international. Dans un premier temps, s’il y a des questions posées par des entreprises faisant partie du groupe Cegeka, il est logique que nous, en tant que centre de la connaissance, nous proposions nos services en matière de réseaux mobiles privés. Nous voulons aussi suivre nos clients au niveau mondial. Nous faisons beaucoup pour les parcs éoliens belges et nous les suivons toujours plus souvent dans d’autres pays.

C’est ce que nous sommes en train de faire aux Pays-Bas et aussi en Grande-Bretagne, où un deuxième projet se profile. Il y a aussi plusieurs offres en cours pour des parcs éoliens sur la côte est des Etats-Unis, autour de New York. Nous nous attendons là à une accélération après l’élection du nouveau président. Mais c’est actuellement surtout grâce à nos clients locaux, tels Jan De Nul, Boskalis, DEME, etc., que nous allons de l’avant.

Ce que nous voulons faire activement au cours des années à venir, c’est convertir un beau cas de référence dans d’autres pays. Nous fournissons à présent le réseau de Brussels Airport et nous recevons des demandes d’autres aéroports pour montrer ce que nous y avons fait exactement. Tout cela fait en sorte que nous voulons croître à l’étranger, mais aujourd’hui, nous nous focalisons très nettement sur la Belgique.

Bijnens: C’est pareil avec notre connaissance du nuage distribué avec lequel nous voulons également gagner d’autres pays.

Cegeka envisage-t-elle des projets télécoms similaires dans d’autres pays où elle est active?

Bijnens: Pour les télécoms, la question est évidemment de savoir comment se présentera le spectre. Si nous voyons des opportunités au niveau du spectre, nous les examinerons, mais le fait est que chaque pays connaît une situation particulière. En Belgique, il était assez unique qu’il y ait d’un coup de l’espace pour un quatrième opérateur avec aussi l’appui du politique. Mais cela passera également via Citymesh.

De Geest: S’il est question de télécoms, nous serons plutôt l’acteur qui effectuera les rachats.

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