5G: Doit-on se faire du souci à propos du rayonnement?
Quel est le degré de nocivité des signaux de nos GSM? Et cela va-t-il changer avec la 5G? Data News a rencontré Eric van Rongen, président d’ICNIRP, l’organisation qui fixe les normes de rayonnement électromagnétique.
Eric van Rongen travaille depuis 27 ans dans la recherche sur le rayonnement non-ionisant. Il est le secrétaire scientifique de la Commission des Champs Electromagnétiques du conseil de la santé néerlandais. De plus, il est aussi président d’ICNIRP, l’International Commission on Non-Ionizing Radiation Protection. Au sein des cette commission, des scientifiques déterminent jusqu’où on peut s’exposer aux appareils à rayonnement (pylônes d’antennes, fours à micro-ondes, écoutes bébé,…) avant de subir des dommages. Ce sont entre autres ces normes que l’Organisation Mondiale de la Santé et l’Union européenne utilisent lorsqu’il est question de rayonnement des pylônes d’antennes.
Depuis peu, l’organisation a publié de nouvelles normes. Elles ne diffèrent guère des précédentes, mais reposent sur une recherche scientifique plus fouillée et plus récente.
Votre organisation présente actuellement de nouvelles normes. Dans quelle mesure se différencient-elles des précédentes et pourquoi ont-elles été renouvelées?
VAN RONGEN: “La raison en est que les anciennes normes datent de 1998, ce qui veut dire que plus de vingt années se sont écoulées. Entre-temps, il y a eu un tas de développements scientifiques. Il convient donc de les revoir et éventuellement de les adapter.”
Les esprits sceptiques disent que les directives d’ICNIRP datent d’avant 2000 et se concentrent sur des appareils comme les fours à micro-ondes, mais pas sur les GSM et certainement pas sur les smartphones. Est-ce exact?
VAN RONGEN: “Non. Il est exact qu’elles datent pas mal, mais il est faux de dire qu’elles ne s’appliquent pas aux applications actuelles. Les normes de 1998 couvrent toute la bande des fréquences allant de tout juste au-dessus de 0 hertz jusqu’à 300 Gigahertz. Les nouvelles normes ciblent le spectre compris entre 100 KHz et 300 GHz, à savoir le domaine des fréquences radio, mais les deux normes couvrent la zone où opèrent les applications de télécommunications mobiles.
L’ensemble du spectre va de 0 Hz jusqu’à la radiation nucléaire. Le rayonnement non-ionisant est le rayonnement allant jusqu’à une fréquence déterminée, après quoi il devient ionisant et endommage les cellules notamment. Est-ce vrai?
VAN RONGEN: “Si on va des fréquences basses aux fréquences élevées, on débute avec des fréquences extrêmement basses telles 50 Hz du réseau d’électricité, puis on passe aux ondes radio (dont dépendent aussi les pylônes d’antennes, ndlr). Ensuite, on arrive aux rayons infrarouges, puis à la lumière visible, aux rayons ultraviolets et enfin seulement aux rayons ionisants telles les rayons X, gamma, etc.”
“De la lumière hautement ultraviolette, on sait qu’elle est nocive, qu’elle provoque le cancer de la peau, mais de la lumière visible et du rayonnement infrarouge, on n’en sait rien. Trop de lumière peut endommager les yeux, parce qu’ils en traitent trop à la fois, mais pour la peau, cela ne provoque pas d’ennuis de santé.”
Les gens restent préoccupés par le fait qu’une exposition permanente peut entraîner le cancer. Mais rien ne l’indique.
Nous ne nous exposons pas toute la journée au soleil, mais nous sommes continuellement proches d’un pylône d’antennes. Nous ne le savons pas, nous ne le sentons pas, mais c’est bien là. Devons-nous en avoir peur?
VAN RONGEN: “Non. Sur ce qu’on sait d’une exposition de longue durée aux niveaux auxquels les gens sont normalement exposés, on ne peut pas s’attendre à des effets sur la santé.”
“Si on est exposé pendant longtemps à des valeur élevées, supérieures aux normes appliquées aujourd’hui, la température du corps ou de parties de ce dernier peut grimper, ce qui peut avoir un impact sur la santé. Mais les normes y sont basées, afin de l’éviter. Pourtant, les gens continuent d’être préoccupés par le fait qu’une exposition continue peut provoquer le cancer. Mais rien ne l’indique.”
A en croire les groupes d’action anti-5G, cela provoque aussi l’insomnie, la migraine, l’infertilité, des dommages aux embryons et aux bébés,…
VAN RONGEN: “Si tout cela était vrai, une grande partie de l’humanité ne serait plus en vie aujourd’hui.”
“Pas mal d’études ont été effectuées à propos du cancer. Les résultats ne sont malheureusement pas uniformes. Il y en a certaines qui établissent un lien entre un risque accru de cancer et une exposition au rayonnement, alors que d’autres ne l’établissent pas.”
“Mais si l’on prend en compte les statistiques sur le cancer, on pourrait s’attendre à ce qu’il y ait aujourd’hui une hausse des cas de tumeurs cérébrales, surtout parce que la technologie existe depuis le milieu des années nonante et est utilisée depuis le changement de siècle par quasiment tout le monde. On pourrait croire qu’au bout de vingt années d’utilisation massive, on puisse observer une différence dans les statistiques, mais tel n’est pas le cas. Cela continue de croître de la même manière que durant la période précédant l’introduction du GSM.”
Qu’est ce que le spectre électromagnétique?
Le rayonnement électromagnétique se présente sous plusieurs formes ou, mieux, fréquences. Des ondes électromagnétiques existent dans notre environnement tant à cause des lignes à haute tension que des smartphones. Mais les radios, l’infrarouge, le soleil, les rayons X et la radiation nucléaire en sont responsables aussi.
Cela ne signifie cependant pas qu’elles soient toutes nocives. C’est ainsi que les lignes à haute tension et les ondes radio des émetteurs AM et FM exploitent plutôt des basses fréquences et que les signaux des GSM tant 2G, 3G que 4G se situent sur des fréquences aux environs de 700 MHz à 2,6 GHz (avec de légers écarts par continent). Quant au wifi, en fonction du type et du paramétrage, il oscille entre 900 MHz et 5,9 GHz.
Si l’on grimpe encore dans ce spectre, on arrive, à partir de 300 GHz, dans le domaine de la lumière infrarouge et à partir de 400 térahertz (THz), soit 4.000 gigahertz ou GHz, à la lumière visible. Ce n’est qu’ensuite qu’on aboutit dans le spectre de l’ultraviolet (entre autres de la lumière solaire), qui s’avère nocive en cas d’exposition prolongée.
A partir de 3 pétahertz (PHz), soit 3.000.000 GHz, on aboutit au rayonnement ionisant capable d’endommager les cellules en cas d’exposition intensive.
(Source: Nasa)
Le fait est que l’utilisation des téléphones mobiles n’a pas d’effet sur le nombre de cas de cancer.
“Il y a une légère hausse, mais elle est surtout due au fait que les gens vieillissent et que le cancer est une maladie qui touche plutôt les personnes plus âgées. Et le diagnostic est aussi meilleur aujourd’hui Le fait est que l’utilisation des téléphones mobiles n’a pas d’effet sur le nombre de cas de cancer.
La 5G générera davantage d’appareils (IoT), le Beamforming (filtrage spatial ou formation de faisceaux) et des connexions ultrarapides dans le spectre 26 GHz, lequel n’a pas encore fait l’objet d’un important de travail de recherche. Cela ne semble pas très rassurant.
VAN RONGEN: “Le Beamforming a surtout pour but de traiter l’énergie de manière nettement plus efficiente. Cela ne va pas provoquer une augmentation de l’exposition, au contraire.”
Ne sera-t-on pas alors soumis à une dose supérieure en présence de ce genre de rayonnement?
VAN RONGEN: “Non, non, ces doses pour l’utilisateur ne changeront pas par rapport à la situation actuelle. On n’a besoin que d’une quantité déterminée pour établir et maintenir une connexion, et cela ne changera pas. Ce qui changera par contre, c’est que ce rayonnement ne sera ainsi dirigé que sur l’utilisateur et pas sur les personnes autour de lui. On pourrait dire que sur l’ensemble de la population, l’exposition diminuera en raison du Beamforming.”
“Comme la technologie se présente aujourd’hui, on émet dans un cercle, et chaque antenne assume sa part. Mais c’est dans toutes les directions. Avec le Beamforming, on ciblera uniquement la partie nécessaire et dans les endroits, où il n’y a pas d’utilisateurs, il n’y aura pas de rayonnement.”
La plus haute fréquence utilisée pour la 5G est 26 GHz et ne pénètre pas sous la peau.
Comment traduit-on l’écart en rayonnement entre la 4G et le 5G? Y a-t-il vraiment une différence?
VAN RONGEN: “Ce qui est surtout important, c’est la façon dont les différentes fréquences pénètrent dans le corps. Plus haute est la fréquence, moins elle pénètre profondément dans le corps.”
” La plus haute fréquence utilisée pour la 5G est 26 GHz et ne pénètre pas sous la peau. Les fréquences 5G plus basses de 3,5 GHz ou de 700 MHz pénètrent nettement plus avant dans le corps et peuvent donc y causer des effets plus profondément. Donc si les fréquences plus élevées causaient déjà un effet, ce serait uniquement sur la peau. (La 4G utilise le spectre compris entre 700 MHz et 2,6 GHz, ndlr).
Y a-t-il une forte différence par rapport au ‘simple’ rayonnement qui existe aujourd’hui?
Celui à 26 GHz se rapproche un peu plus du rayonnement infrarouge, mais dans ce cas, on sait seulement que cela provoque un réchauffement. Or un réchauffement trop intense peut causer des dommages.”
Mais la 4G et les autres fréquences de la 5G ne se situent-elles pas nettement en-dessous?
VAN RONGEN: “En effet.”
Au niveau de la recherche, on n’a jamais pu établir un lien causal entre l’exposition au rayonnement et les griefs (des personnes qui se prétendent électro-sensibles).
Qu’en est-il des griefs tels les troubles du sommeil, l’infertilité, l’impact sur les bébés,…?
VAN RONGEN: “Il n’y a aucun indice démontrant que tel soit le cas. Je ne connais pas la situation en Belgique, mais aux Pays-Bas, tout le débat est stimulé par des gens qui se prétendent électro-sensibles. Aucune recherche scientifique n’a jamais démontré que tel est le cas. Les personnes qui affirment avoir différents griefs, les ont certes, mais au niveau de la recherche, on n’a jamais pu établir un lien causal entre l’exposition au rayonnement et les griefs. Si on les expose à leur insu, ils ne réagissent pas. Et s’ils pensent qu’ils sont exposés, alors ils ont des griefs à formuler.”
Néanmoins, l’une de mes collègues, quelqu’un qui, au demeurant, fait généralement tout à fait confiance à la science, affirme ressentir quelque chose, lorsqu’elle passe sous des lignes à haute tension. Est-ce un non-sens?
VAN RONGEN: “Cela peut être vrai. Surtout les pylônes à haute tension porteurs de 380 kilovolt sont particulièrement puissants, et le champ électrique situé à leur base peut soumettre le corps à de petites décharges. C’est comparable à l’électricité statique.”
Mais ce n’est pas nocif?
VAN RONGEN: “Pas du tout. S’il fait très humide, on peut parfois entendre des crépitements produits par ces pylônes à haute tension. C’est pareil. Mais il y a aussi des personnes qui prétendent qu’ils peuvent ressentir des ondes radio, ce qui n’a jamais été démontré.”
Un autre exemple: dans la notice de mon babyphone (écoute bébé), il est indiqué qu’il est préférable de l’installer à un mètre de distance au moins du bébé. Cela laisse quand même supposer que ce genre d’appareil n’est pas trop sûr, non? En outre, on entend aussi des avertissements, selon lesquels il ne faut pas rapprocher trop le parc du bébé du routeur wifi.
VAN RONGEN: “Je pense que les fabricants indiquent surtout cela comme une décharge de responsabilité générale au cas où des problèmes surviendraient. Or comme ce genre d’appareil fonctionne aussi bien à un mètre de distance, pourquoi ne pas suivre les recommandations données?”
Donc si je le fixe sur le dos de mon fils, cela ne peut lui faire de tort?
VAN RONGEN: “En soi pas. Mais le fait est qu’à proximité immédiate d’un babyphone ou d’un routeur wifi, un champ relativement intense est présent, qui peut même être supérieur aux recommandations d’ICNIRP. Mais cela ne signifie pas encore que cela représente un danger direct car les recommandations intègrent une grande marge de sécurité.”
Quelle est donc la distance à respecter pour rester en dehors de ce champ intense? Un mètre?
VAN RONGEN: “Pour les routeurs wifi, il s’agit d’une distance de cinq à dix centimètres.”
Il ne faut donc pas l’installer sous l’oreiller, mais au bord du parc, pas de problème donc?
VAN RONGEN: “Pas du tout.”
Le type d’appareil est-il important? Le routeur émet sur wifi, le babyphone sur DECT, à propos duquel toutes sortes d’histoires circulent.
VAN RONGEN: “C’est vrai, à en croire certains, DECT serait mortel (ironique). A proximité d’un babyphone, le champ est assez intense, sans dépasser les normes pour autant. Mais ce genre d’appareil fonctionne tout aussi bien à un mètre de distance. Ne vous faites donc aucun souci et pour être rassuré, placez-le un peu plus loin du bébé.”
Malgré les preuves scientifiques, supposons que je ne sois encore et toujours pas convaincu. Mais je ne peux pas non plus me permettre d’habiter dans une maison dans les montagnes, à l’écart de la majeure partie du rayonnement. Que puis-je encore faire pour limiter l’impact, si je n’ai pas confiance?
VAN RONGEN: “Peut-être existe-t-il encore quelques coins privilégiés dans les Ardennes… Vous pouvez aussi prendre quelques mesures. La première consiste à ne pas utiliser un téléphone mobile. Le GSM est la source la plus importante si l’on considère l’intensité absolue du champ électromagnétique. Privilégiez le téléphone à fil et demandez peut-être aux voisins de ne pas utiliser d’appareil DECT (téléphone fixe sans fil). Pas de router wifi, mais uniquement l’internet par câble.”
“Il y a aussi des gens qui vont encore plus loin et qui protègent leur domicile au moyen d’une peinture spéciale à particules de fer. On obtient ainsi une sorte de cage de Faraday.”
Est-ce utile?
VAN RONGEN: “Cela protège dans une certaine mesure du rayonnement.”
Et est-ce plus sain?
Van Rongen: “Non, mais si des gens se sentent mieux ainsi, il faut les laisser faire.”
Lors d’une récente audition au Parlement fédéral, Test-Achats a déclaré que la plupart des études consacrées à ce sujet signalent qu’il n’y a aucun danger et que les études faisant état de risques possibles sont souvent de piètre qualité. Comment un néophyte en la matière peut-il séparer le bon grain de l’ivraie? Car on peut toujours trouver une étude qui prétend démontrer telle ou telle chose.
VAN RONGEN: “En tant que néophyte, vous ne pouvez vous fier à l’une ou l’autre étude, mais prendre en compte ce qu’un collège de scientifiques déclare sur le sujet. Mais il est évidemment aussi malaisé de vérifier quel collège d’experts est le plus spécialisé.”
Si des gens lisent que plus de 200 scientifiques mettent en garde contre les dangers de la 5G dans un courrier, ils paniquent. (…) Ce sont certes des scientifiques, mais pas des experts dans le domaine des champs électromagnétiques, qui est un domaine très spécialisé.
“On entend à présent divers appels émanant de groupes de scientifiques qui affirment que tout cela est incroyablement dangereux et qu’il faut fixer des limites. Si des gens lisent que plus de 200 scientifiques mettent en garde contre les dangers de la 5G dans un courrier, ils paniquent.”
(En 2017, de nombreux scientifiques du monde entier, 171 pour être précis, ont effectivement signé une pétition en vue de stopper la 5G. Le seul nom belge dans la liste était celui d’un biologiste à la retraite, spécialisé dans les fourmis, ndlr).
“C’est un problème. Ce sont certes des scientifiques, mais pas des experts dans le domaine des champs électromagnétiques, qui est un domaine très spécialisé. On y trouve aussi divers spécialistes capables d’interpréter correctement les études. Si on envisage le lien avec le cancer, il convient de se pencher sur des études épidémiologiques. On y fait vite état du risque que des facteurs perturbateurs viennent jouer un rôle, surtout si l’impact n’est pas tout à fait clair.”
“C’est par exemple nettement plus manifeste d’établir un lien entre le cancer des poumons et le fait de fumer. Dans le cas du rayonnement, il s’agit, pour autant qu’on trouve quelque chose, de hausses relativement faibles du risque. Il est alors malaisé de vérifier s’il s’agit d’un effet de l’exposition ou s’il y a d’autres facteurs qui perturbent le résultat.”
Normes de rayonnement en Belgique
Notre pays appliquait jusqu’à il y a quelques années la règle de 20,58 volts par mètre. Aujourd’hui, chaque région applique ses propres directives. La Flandre s’en tient à l’ancienne norme fédérale de 20,58 V/m à 900 MHz. Pour les fréquences comprises entre 2 et 10 GHz, la norme est de 30,7 V/m pour le rayonnement total dans l’espace public. Mais une limite de 3V/m s’applique par antenne. En Wallonie, c’est la règle de 3V/m par technologie et par opérateur qui s’applique, mais uniquement dans les endroits habités.
Bruxelles possède des normes nettement plus strictes et applique une limite de six volts par mètre pour l’ensemble du rayonnement, moins le rayonnement des stations. Cela signifie que la fourniture d’un réseau correct pour la 3G et la 4G par plusieurs opérateurs au même endroit est aujourd’hui très difficile. Et l’arrivée de la 5G rendra les choses encore plus compliquées.
Les normes de sécurité conseillées par ICNIRP sont nettement plus élevées: 41 V/m à 900MHz, 58 V/m à 1.800 MHz et 61 V/m à 2.100 MHz.
Enfin, il se peut que le rayonnement soit aussi exprimé en W/m². Pour effectuer la conversion, on prend la valeur en volts par mètre au carré et on la divise par 377. Vous trouverez davantage d’informations sur les normes de rayonnement dans une étude du régulateur télécom, l’IBPT.
La 5G, c’est aussi une ‘millimeter wave technology’ passant par la fréquence 26 GHz, qui n’a pas encore fait l’objet d’une recherche approfondie.
VAN RONGEN: “On y a en effet consacré que relativement peu de recherche. En tant que secrétaire scientifique du conseil néerlandais de la santé, je suis occupé à élaborer un avis à ce propos à la demande de la chambre des députés des Pays-Bas. On y reprend ce qu’on sait actuellement. Ce que la commission ‘Elektromagnetische Velden’ (du conseil néerlandais de la santé, ndlr) dira à propos de la fréquence 26 GHz, nous ne le savons pas encore. Nous attendons un avis avant les vacances d’été.”
“Il y a bien eu des études sur des gens qui ont travaillé avec des rayons de radar et des tests effectués sur des animaux. Mais tout cela ne débouche pas sur des résultats catastrophiques. Le fait est certes que chaque étude ne prétend pas qu’il n’y a rien. Au contraire, beaucoup d’entre elles indiquent qu’il y a bien ‘quelque chose’. La question est de savoir comment l’interpréter.”
Que voulez-vous dire par ‘quelque chose’? Qu’il peut y avoir des dommages?
VAN RONGEN: “Des études ont été réalisées sur des gens qui travaillent sur des navires de la marine norvégienne, où il y a d’assez puissantes installations de radar. Si on se trouve sur le pont, on peut être exposé à certains endroits à un rayonnement relativement puissant. La question est de savoir si cela se passe très souvent. Pour les gens se trouvant sur le pont et ayant été ainsi potentiellement exposés, on examine par exemple s’il y a un effet sur la fertilité. Ont-ils eu moins ou plus d’enfants, ont-ils eu plus de garçons ou de filles? Il y a des conséquences divergentes par rapport aux valeurs normales. Mais on ne sait pas si c’est un impact direct, parce qu’on ignore le degré d’exposition.”
Dans la plupart des cas, il est très malaisé d’interpréter le résultat de ce genre de recherche.
“Aussi longtemps qu’on ne mesure pas exactement l’exposition, on ne sait pas si on peut établir un lien entre celle-ci et les effets obtenus.”
“Dans la plupart des cas, il est très malaisé d’interpréter le résultat de ce genre de recherche. Une étude épidémiologique recherche des liens entre l’exposition et ses effets, mais si l’on ne connaît pas le degré d’exposition, il est malaisé de tirer des conclusions.”
Des esprits critiques affirment qu’il faut dès à présent y renoncer, car si d’ici 3 à 4 ans, des études démontent des dommages, le secteur ne voudra plus faire machine arrière en raison de l’intérêt économique du moment. Pourra-t-on encore reculer?
VAN RONGEN: “En principe oui, si on arrive à démontrer que cela peut vraiment entraîner des dommages. Il appartiendra alors aux autorités de prendre les mesures qui s’imposent.”
Vous faites référence aux autorités. A Bruxelles, on parle d’une valeur maximale de rayonnement de 0,096 W/m², soit 6 volts par mètre (6V/m), ce qui est nettement inférieur au reste du pays. Et si je ne me trompe pas, quelque cinquante fois moindre que ce que l’OMS recommande…
VAN RONGEN: “L’OMS même ne recommande rien. Ce qu’elle fait, c’est inventorier ce qu’on sait. Pour ce type de rayonnement, elle ne fixe aucune norme, mais se réfère aux normes d’ICNIRP et à celles d’une organisation américaine comparable à la nôtre.”
“Ce que Bruxelles a fait, c’est se tourner vers les normes européennes, qui se basent elles-mêmes sur celles d’ICNIRP. Or ces normes européennes ont été reprises dans de nombreux pays de l’UE, mais certains ont choisi d’aller un peu plus loin comme ici à Bruxelles. Si c’est 6 volts par mètre, ce n’est pas cinquante fois inférieur aux normes d’ICNIRP, mais dix fois environ.”
Même si on s’écarte un peu (des normes), cela ne se traduit pas encore par un réchauffement excessif. Donc que vous soyez à la limite de notre recommandation ou nettement en-dessous, l’impact est similaire.
Selon des opérateurs, 6 volts par mètre, c’est trop faible pour une bonne couverture mobile et à coup sûr pour la 5G. En Flandre, c’est 20,4 V/m (l’ancienne norme fédérale) ou 3V/m par antenne. Cela a-t-il son importance sur le plan de la santé que nous examinions la valeur totale ou par antenne?
Van Rongen: “Quand on mesure l’exposition, il faut mesurer l’ensemble du rayonnement. Si on veut limiter quelque chose, il convient de le faire à la source et donc examiner le rayonnement de chaque antenne.”
Au niveau purement de la santé, y a-t-il une preuve scientifique que 6 volts par mètre ou 20 volts par mètre fassent une différence? Bruxelles enregistrera-t-elle par conséquent moins de cas de cancer?
Van Rongen: “Non. Ces normes d’ICNIRP sont basées sur des effets scientifiquement observés du rayonnement sur le corps, et on ne parle encore que du réchauffement de ce dernier. Ces normes se caractérisent par une certaine marge de sécurité. Même si on s’écarte un peu (des normes), cela ne se traduit pas encore par un réchauffement excessif. Donc que vous soyez à la limite de notre recommandation ou nettement en-dessous, l’impact est similaire.” (ICNIRP recommande 41 V/m à 900 MHz, 58 V/m à 1.800 MHz et 61 V/m à 2.100 MHz, ndlr)
A propos d’impact, s’agit-il seulement d’un réchauffement du corps d’un degré?
Van Rongen: “Oui.”
Si on grimpe dans le spectre, on arrive dans l’infrarouge. Il y a des gens qui se rendent dans des saunas à l’infrarouge pour se réchauffer et bénéficier d’une sensation de bien-être.
Où en est la 5G?
Pour la 5G, il y a en Belgique des fréquences prévues autour de 700 MHz, 1,4 GHz (uniquement en réception, ‘downlink’), 2,1 GHz et 3,6-3,8 GHz, même si, selon l’IBPT, il n’y a pas encore d’intérêt sur le marché. Les basses fréquences telles que 700 MHz conviennent en général pour parcourir de longues distances et peuvent pénétrer plus facilement dans les bâtiments, mais elles sont moins adaptées au trafic rapide des données. Les fréquences plus élevées ne peuvent pas ou pas facilement franchir les obstacles, mais peuvent permettre des vitesses supérieures du fait de la disponibilité d’un spectre plus important. Cela signifie qu’un signal 5G dans la bande de fréquence 26 GHz pourra atteindre des vitesses très élevées, mais sera moins utilisable sur un pylône d’antennes pour desservir la moitié d’une ville.
Pour conclure, on passe de la 4G à la 5G, puis par la suite à la 6G. Cette nouvelle génération utilisera-t-elle un spectre potentiellement encore plus dangereux?
VAN RONGEN: “Pas nécessairement. Pour la 5G, on utilise à présent aussi la bande des 700 MHz, qui précédemment déjà était exploitée pour des applications télécoms.”
Plus c’est élevé, plus c’est nocif?
VAN RONGEN: “Ce lien est établi par des personnes, mais tel n’est pas le cas. Si on grimpe dans le spectre, on arrive dans l’infrarouge. Il y a des gens qui se rendent dans des saunas à l’infrarouge pour se réchauffer et bénéficier d’une sensation de bien-être.”
Mais on ne les fréquente pas toute la journée.
VAN RONGEN: “Si on poursuit notre ascension dans le spectre, on en arrive à la lumière visible à laquelle nous sommes tous exposés. Ce n’est qu’ensuite qu’on aboutit dans la zone de l’ultraviolet, dont on a démontré qu’il est nocif. Ce qui est incroyable, c’est que les gens se préoccupent nettement moins de cela que des champs électromagnétiques.”
Plus ou moins en même temps que la présente interview, notre rédaction a été contactée par un ingénieur civil au nom du collectif Stop5G, qui prétend que les champs électromagnétiques causent nettement plus de dommages que le seul réchauffement du corps humain. Et d’évoquer des tumeurs, la leucémie chez les enfants, l’Alzheimer, l’autisme, une diminution de la qualité du sperme, des troubles du sommeil, la dépression, le suicide, l’électrohypersensitivité et bien d’autres problèmes. L’organisation dénonce aussi les limites d’ICNIRP, dont Eric van Rongen est le président. Selon le collectif, ICNIRP, l’OMS et l’UE ignorent l’appel émis par divers scientifiques qui se réfèrent à plusieurs études démontrant des liens entre le rayonnement et la santé.
Pour le présent article, Data News a aussi pris contact avec Test-Achats et a rencontré dans le passé d’autres spécialistes du rayonnement. Aucun d’entre eux n’abonde dans le sens de Stop5G. Lors d’une récente audition parlementaire, Test-Achats a observé que les études qui démontrent ce genre de lien, sont minoritaires et sont généralement de moindre qualité que celles qui n’établissent aucun lien. Dans l’interview, monsieur van Rongen n’apporte lui-même pas de réponse aux différents arguments des groupes d’opposition. Une opinion de Stop5G a été refusée par la rédaction, parce qu’elle ne répond pas aux normes qualitatives qui sont les nôtres, mais vu la sensibilité de la matière, nous nous devons de signaler qu’il y a des organisations qui remettent en cause les normes recommandées par ICNIRP, l’Organisation Mondiale de la Santé et l’UE.
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