Nous devons aborder votre carrière. Et surtout donc votre futur. Car vous n’êtes pas vraiment rassuré, n’est-ce pas ? Chaque année, nous vous sondons, vous, cher/chère lecteur/trice en tant que professionnel ICT. Sur votre carrière et votre satisfaction, que ce soit les recrutements, l’enveloppe salariale ou les formations. Année après année – n’hésitez pas à consulter les éditions précédentes de notre enquête Career Guide -, les résultats sont largement positifs. L’informaticien/cienne moyen/ne se sent bien dans sa peau, très à l’aise et même confiant, regardant avec sérénité l’étape suivante de son évolution professionnelle.Pour la première fois en plus de 10 ans, un revirement apparaît pourtant. Certes, la grande majorité continue à se montrer très positive et continue d’apprécier son travail – heureusement ! –, mais l’anxiété grandit. C’est ainsi que le pourcentage d’informaticiens/ciennes qui craignent de perdre leur emploi est passé de 13% en 2024 à 20% cette année. Cette hausse ne semble certes pas dramatique, mais mérite d’être analysée : ces dernières années – même avant la crise du Covid –, ce taux fluctuait entre 10 et 13%.
Quelque part, cela n’a rien d’étonnant. Le secteur ICT belge a connu une année de croissance zéro, suivie de multiples restructurations, réorganisations et licenciements. Pour la première fois depuis 2014, le volume d’emplois IT est en baisse dans notre pays, alors que normalement, quelque 3.000 postes de travail se créent d’année en année. L’organisation sectorielle Agoria prévoit pour 2025 une stabilisation du nombre d’emplois et une légère augmentation du chiffre d’affaires global, même s’il nous revient que certaines entreprises ICT obligent massivement de nombreux collaborateurs à être en intercontrat ou procèdent à des licenciements brutaux. L’émergence de l’IA joue à cet égard un rôle non négligeable. Certes, il n’est pas question de remplacer les informaticiens/ciennes à grande échelle par des machines, mais les entreprises sont contraintes de recherches des compétences IA. Or celles-ci ne se trouvent pas forcément parmi les effectifs existants ou ne peuvent pas simplement être formés. Ainsi, 2 répondants sur 3 à notre enquête s’attendent à voir l’IA impacter fortement les perspectives d’emploi dans le secteur IT. Dans une autre enquête du recruteur IT CHRLY, il apparaît que 38% des directeurs RH affirment éprouver des difficultés à recruter des experts en IA et en apprentissage machine. Former le personnel IT existant n’est pas toujours la solution, comme le relève l’enquête. Ainsi, 26% précisent qu’il est difficile de développer des compétences en IA.
Mais pour en revenir à notre propre enquête, l’affirmation ‘L’avenir du secteur IT m’inquiète’ apparaît comme la plus alarmante. Si, l’an dernier, 14% avaient répondu positivement, ce pourcentage a grimpé cette année à 27%, soit un quasi-doublement. Eh oui, à ce niveau également, l’IA entre en compte. Les tâches de programmation qui prenaient autrefois plusieurs semaines sont désormais prêtes en quelques heures. Où il fallait auparavant une petite équipe est désormais confié à un seul FTE. Songez aux propos du patron d’OpenAI,Sam Altman, sur le codage superhumain. Ce que l’on fait soi-même n’est plus forcément meilleur. Ou au CEO de Microsoft, Satya Nadella, qui indiquait récemment que 30% du code de l’entreprise sont maintenant générés par l’IA. L’on peut dès lors se poser à juste titre la question de savoir quel sera l’avenir du secteur IT. Personne ne le sait vraiment. Mais il est certain qu’il sera différent. Si l’on y ajoute les tensions géopolitiques, la guerre commerciale américaine et la volonté d’une plus grande souveraineté européenne (en matière de données), il est clair que l’IT est dans l’œil du cyclone. Et personne ne sait si la tempête va se calmer. Ni quand elle va s’arrêter et comment le calme reviendra après la tempête. Mais ce climat d’incertitude est bel et bien perceptible dans les conversations actuelles. La conclusion est pourtant limpide : la seule certitude est que nous devrons vivre longtemps encore dans l’incertitude.
Personne ne sait si la tempête va se calmer.