Des starters flamands à Londres: “L’argent arrive rapidement, et le risque est faible”

Frederik Tibau est rédacteur chez Data News.

Trois Flamands d’une bonne vingtaine d’années tentent de conquérir le monde au départ de Londres avec une application qui offre aux hôtels une vision sur leurs prestations sur des sites de voyages et de réservations populaires.

Trois Flamands d’une bonne vingtaine d’années tentent de conquérir le monde au départ de Londres avec une application qui offre aux hôtels une vision sur leurs prestations sur des sites de voyages et de réservations populaires.

‘OTA Insight’ (alias ‘Online Travel Agencies Insight’), telle est l’appellation de la startup créée par Adriaan Coppens (27 ans) en 2012 à Londres. La petite entreprise a conçu une application big data de ‘revenue management’ permettant aux hôteliers non seulement d’avoir une vue sur le nombre de chambres qu’ils louent et sur les rentrées pécuniaires qu’ils enregistrent, mais aussi sur leurs performances sur les sites de réservations bien connus tels booking.com et expedia.com.

“Nos clients utilisent également cet outil pour comparer leurs prix avec ceux de la concurrence”, déclare Coppens, qui est venu narrer son histoire inspirante d’entrepreneur devant un groupe de 40 étudiants lors du ‘student start-up trip’ d’AFC (‘Academics for Companies’) et de SITE (‘Student IT Entrepreneurs’) à Londres. “On pourrait le comparer avec le moteur de recherche de Google: plus le score d’un hôtel est élevé dans notre classement, plus il reçoit de réservations.”

Coppens a débuté sa carrière à la SNCB, avant de rejoindre très vite Project Brokers, une petite entreprise britannique de ‘business intelligence’ qui crée notamment des logiciels permettant aux banques de visualiser leurs données. C’est quasiment par hasard que lui est venu l’idée d’une appli pour le secteur du tourisme, alors qu’il participait à un concours de startups. Les choses se précipitèrent ensuite.

“Le coup d’essai s’avéra une catastrophe”, affirme-t-il aujourd’hui. “Ce n’était guère brillant à l’époque, mais j’avais en tête le concept de combiner les ‘reviewscores’ de Booking.com et de Tripadvisor, et de faire comprendre clairement aux hôteliers qu’ils pouvaient gagner nettement davantage avec beaucoup de critiques (reviews) positives.”

Ambitions

OTA Insight avait de grandes ambitions lors de son démarrage en 2012. 3.500 clients en une seule année, cela devait pouvoir se faire car tous les hôtels approchés s’étaient montrés intéressés! Tel ne fut pas le cas. Les économies de Coppens et consorts furent vite dévorées, et les jeunes gens durent bien se résoudre à emprunter à des membres de la famille ou à des amis.

“Le gros problème, c’était que dès le départ, nous ciblions surtout les grandes chaînes hôtelières, qui ont un cycle d’achat de 12 mois”, poursuit le co-fondateur. “Vous signez aujourd’hui un accord avec elles, mais pour dans un an seulement. Malheureusement, cela ne fonctionne pas ainsi pour une startup. En outre, l’Hilton est en fait une chaîne d’hôtels séparés qui disposent individuellement encore d’une grande force décisionnelle. Même si vous arrivez à convaincre le grand patron, cela n’empêche pas chaque hôtel de prendre lui-même beaucoup de décisions. En tout cas, nous avons de ce fait perdu pas mal de temps et d’argent. Heureusement, précisément au moment où nous étions quasiment en faillite, nous avons pu récolter de l’argent, ce qui nous a permis de gagner un peu de temps.”

Lors d’une session avec des investisseurs, organisée par Seedcamp, OTA Insight a rencontré quelques business angels britanniques et néerlandais qui étaient prêts à injecter des fonds dans la petite entreprise. “L’eau nous arrivait alors pratiquement à la bouche. Mais depuis ce premier investissement, cela s’est mis à tourner. Aujourd’hui, nous avons un peu moins de 70 clients et nous sommes sur le point de finaliser un deuxième investissement auprès d’un fonds de capital-risque” (Coppens ne souhaite cependant pas révéler le montant total récolté par OTA, mais il avoue quand même que son équipe conservera encore un peu plus de la moitié des actions au terme des deux transactions). “En tout cas, nous sommes parés pour les deux prochaines années.”

“Finalement, il faut pouvoir présenter rapidement de bons résultats car c’est ce que les investisseurs veulent voir, avant de puiser dans leur bourse. Ils ne le font en tout cas pas par charité. Mais lorsque nous avons commencé à cibler des clients plus modestes, le déclic s’est fait. Les hôtels plus petits nous en ont amené d’autres et, entre-temps, les grands s’intéressent de nouveau à nous. Nous avons à présent conclu des contrats avec six Hilton, qui nous font à leur tour de la publicité par le bouche à oreille.”

Londres

Pourquoi Londres s’avère-t-elle intéressante pour un starter, demandons-nous encore? “J’ai déjà travaillé ici, et mon partenaire business a aussi été actif ici. Londres était donc un choix évident. Il est ici aussi plus facile de recueillir de l’argent et d’engager du personnel. La ville est chère, certes, mais vous payez nettement moins de taxes sur le travail. En Belgique, cela m’aurait coûté 20 à 30 pour cent de plus pour offrir un salaire décent à mes collaborateurs. Ici, l’on peut payer un salaire plus élevé, tout en dépensant moins.”

“Ce qui est également intéressant à savoir, c’est que les investisseurs récupèrent de toute façon la moitié de l’argent qu’ils injectent dans une startup, et cela peut même aller jusqu’à 75 pour cent. Il s’agit là d’une fameuse différence avec la Belgique: l’argent arrive plus vite, et vos investisseurs courent moins de risques.”

“Même en travaillant à Londres, il est facile d’attirer ici des Belges”, conclut le jeune entrepreneur, qui emploie aujourd’hui quatre personnes à temps plein à Tech City (dont deux développeurs belges de 23 ans), et une à Bruxelles.

“Londres est la raison même pour laquelle Yoeri et Matthias m’ont suivi. Proches de chez eux et pourtant actifs dans un tout autre monde. Berlin était aussi une option, mais c’est quand même un peu plus loin et à Londres, il y a nettement plus de chaînes hôtelières. A Bruxelles aussi, c’est vrai, ce qui explique que nous avons aussi quelqu’un dans la capitale belge. Mais du point de vue des investissements, Londres est au-dessus du lot, de très loin…”

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