Kristof Van der Stadt
Sans confiance, pas de service
L’entreprise recherchera un outsourceur de confiance, de même qu’un fournisseur cloud capable de sécuriser ses données. De même, en tant que particulier, vous espérez confier votre vie numérique en toute confiance aux Apple, Facebook et Google de ce monde.
La confiance est la conviction que l’autre partie est honnête. La confiance est un sentiment à la fois très fort et très fragile. Une fois rompue, la confiance est irrémédiablement perdue. Il en va ainsi de nos contacts privés et professionnels ainsi que des services que l’on attend.
Ainsi, l’entreprise recherchera un outsourceur de confiance, de même qu’un fournisseur cloud capable de sécuriser ses données. De même, en tant que particulier, vous espérez confier votre vie numérique en toute confiance aux Apple, Facebook et Google de ce monde. Cependant, il serait naïf de croire que la confiance fait partie de chaque transaction. Il suffit pour s’en rendre compte de se rappeler ses expériences avec Facebook, Google et consorts. En effet, ceux-ci analysent dans le détail nos faits et gestes numériques et proposent ces données à des annonceurs. Or nous semblons tous accepter cette situation. Et sans doute croyons-nous dur comme fer que les contrats que nous signons sur la vie privée servent à améliorer notre confort d’utilisation. Afin de recevoir enfin des annonces véritablement adaptées à nos centres d’intérêt.
À propos de boîte de messagerie : avez-vous suivi les péripéties autour de Unroll.me ? Ce service souvent adulé qui vous permet de vous désinscrire de newsletters indésirables semble désormais vendre les données provenant de votre messagerie. Et quoi encore ? Voilà la preuve que la confiance s’ébranle. Exemple concret : Uber achète à Unroll.me des données sur sa grande rivale Lyft et les exploite pour mieux évaluer la position concurrentielle de ladite Lyft. Et Unroll.me utilise les bénéfices de la vente de données pour financer le service gratuit offert aux utilisateurs.
La confiance est très fragile : une fois rompue, elle est irrémédiablement perdue.
Qu’on le veuille ou non, il s’agit là d’un modèle commercial désormais classique. L’utilisateur est le produit ! Pire encore, vous auriez pu le savoir en lisant les petits caractères, pour paraphraser le CEO d’Unroll.me. Vous savez, ces ‘conditions générales’ que vous faites défiler à toute vitesse pour cliquer sur ‘accepter’. D’autant que vous devez bien les accepter si vous voulez utiliser le service en question.
Ce problème de confiance se rencontre également toujours plus au niveau des appareils. Avec l’émergence de l’Internet des objets, le nombre de fabricants qui analysent et/ou revendent les données sur le comportement des consommateurs ne cesse de croître, sans qu’il ne soit ici question de ‘conditions générales’. Songez aux TV intelligentes qui enregistrent le comportement des spectateurs. Ainsi, la marque de TV Vizio vend ces données aux annonceurs. De même, Bose communique à ses partenaires les données d’utilisation de son appli pour casque, et peut-être aussi le comportement des auditeurs. Et il semble donc bien que certaines applis ‘écouteraient’ le micro de votre smartphone. De quoi perdre toute confiance dans vos applis favorites.
Récemment, un analyste de marché de GfK considérait même la confiance comme une menace potentielle pour le marché de l’électronique grand public. Car une fois qu’un consommateur a perdu confiance en une marque ou un service à la suite d’un ‘incident’, cette confiance est difficile à restaurer. Et les premiers exemples apparaissent : collez-vous un cache sur la webcam de votre laptop ? Or la confiance est indispensable si vous envisagez bientôt d’installer un assistant vocal intelligent du style Amazon Echo ou Google Home dans votre salon.
La confiance est fragile. Je crains que nombre de sociétés technologiques aient négligé cet aspect et succombent trop vite à la tentation de vendre davantage encore de données. En adaptant les ‘conditions générales’ puisque le consommateur les accepte quand même sans les lire. Le nouveau Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) n’arrivera pas trop tôt. En espérant que d’ici son introduction en mai 2018, la confiance n’aura pas disparu…
Rédacteur en chef de Data News Kristof Van Der Stadt
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