Persévérance et nerfs d’acier
2008 restera gravée dans la mémoire collective comme l’année durant laquelle notre confiance dans le monde financier a été fortement ébranlée.
2008 restera gravée dans la mémoire collective comme l’année durant laquelle notre confiance dans le monde financier a été fortement ébranlée.
Et entrera sans doute dans l’histoire comme l’année où les États-Unis, après la désillusion militaire en Irak, ont définitivement renoncé à une partie de leur domination économique. Bien que les drames économiques qui sont survenus l’année dernière et qui se jouent cette année encore puissent être qualifiés d’inédits, bon nombre de professionnels des TIC et moi-même ressentons une étrange impression de “déjà vu”. La fin des années ’90 n’a-t-elle pas été marquée par les agissements de jeunes cadres dynamiques qui ont fait plané une grande incertitude depuis Wall Street et par des investisseurs qui ont conclu de juteux contrats internet pour des centaines de milliards de dollars? Le sceptique de l’époque, qui se perdait dans la jungle des abréviations et du jargon, ne s’est-il pas entendu rétorquer par les analystes financiers new-yorkais qu’il n’avait toujours pas “compris”? En effet, l’histoire se répète, mais l’avarie économique risque cette fois de dégénérer pour de bon. Le message est clair: tout le monde sur le pont pour remettre à flot le système financier et le tissu industriel.
Ces dernières semaines, de nombreux gouvernements ont dû mettre toutes voiles dehors pour tenter de limiter la crise financière. Mais dans les plus petits pays, surtout, il est clairement apparu qu’une telle crise était difficilement surmontable. Non seulement les plus grandes banques disposent de succursales dans de nombreux États membres de l’Union européenne, mais elles s’échangent également d’énormes quantités de titres de créance. Comme dans le secteur de l’énergie, où une approche et une régulation européennes sont demandées depuis longtemps, une délégation de compétences vers un organe au niveau de la zone euro s’impose. Il est temps que les plus grands États membres européens qui parlent sans cesse de leadership fassent en sorte que nous puissions offrir au minimum une réponse continentale à des problèmes qui sont par définition transnationaux et qui se manifestent au niveau mondial.
Tandis que de nombreuses banques cherchent encore à naviguer en eaux plus calmes, l’économie “réelle” traverse actuellement une tempête exceptionnelle. La dernière enquête conjoncturelle semestrielle de la FEB reflète le pessimisme presque généralisé des différents secteurs quant à l’activité économique, aux coûts et à la rentabilité. Sur cette base, la FEB prévoit une croissance économique de -0,6% en 2009, un chiffre comparable au recul de -0,7% enregistré lors de la récession de 1993. Il est évident que cette évolution se répercutera sur l’emploi, les investissements et le nombre de faillites. Bien que le secteur des TIC ne soit pas le premier et le plus touché, nous risquons également d’être confrontés à une diminution importante des transactions commerciales. Pour les chefs d’entreprise, garder la tête froide et ajuster régulièrement le planning s’apparentent à un défi de taille. Les remèdes de cheval sont parfois indispensables, mais une approche alarmiste est toujours à proscrire. Nous la paierons cash dans les plus brefs délais.
Face aux divers risques baissiers, il existe aujourd’hui plusieurs points positifs susceptibles d’insuffler aux consommateurs et aux chefs d’entreprise la confiance nécessaire pour ne pas réagir de manière exacerbée à la crise actuelle. Ainsi, la grande majorité des consommateurs continueront à bénéficier du système d’indexation automatique au cours des deux prochaines années. Cette injection massive de pouvoir d’achat, couplée au budget fédéral de plus de 1,5 milliard EUR affecté au pouvoir d’achat pour 2009, n’a évidemment de sens que si l’argent circule. Et il existe de bonnes raisons que ce soit le cas. Le marché immobilier est à nouveau un marché acheteur où les prix peuvent être négociés. Le crédit hypothécaire redevient moins onéreux. La baisse du taux de TVA devrait séduire les candidats à la construction. Les prix des produits les plus divers baissent et la vente de stocks est souvent l’occasion de faire de bonnes affaires. Espérons que le consommateur belge garde tout son bon sens. En effet, la panique ne peut que générer du chômage. Les pronostics de croissance macro-économique moins favorable sont une chose. Un regard froid sur notre pouvoir d’achat individuel en est une autre.
En cette période difficile, les entreprises doivent elles aussi garder à l’esprit les défis à moyen terme. Heureusement, de nombreux chefs d’entreprise n’ont pas l’intention de remiser leurs projets d’internationalisation et d’innovation. Certes, il faudra rogner sur les coûts et faire plus avec moins. Et c’est parfaitement possible. L’informatique peut toujours aider à générer d’importantes hausses de la productivité, pensons notamment aux applications e-health, e-government ou secure trade lane. Mais nous devons exploiter toutes les opportunités qui se présentent dans nos entreprises ICT également. Prenons le cas de l’innovation: des exemples pratiques montrent qu’une bonne utilisation de quelques instruments permet de réduire de 25 à 30% le coût d’une équipe de R&D. Une combinaison judicieuse (i) de la retenue sur le précompte professionnel pour le personnel R&D, (ii) de la prime d’innovation exonérée d’impôt, (iii) des avantages liés aux résultats fortement défiscalisés et (iv) des importantes aides régionales à l’innovation peut faire la différence lorsqu’il s’agira de décider de projets d’innovation pendant cette redoutable année 2009. Je rencontre malheureusement encore chaque jour des entreprises qui n’effectuent pas la retenue sur le précompte professionnel pour leurs ingénieurs actifs dans la R&D, par exemple. C’est regrettable.
Bref, toutes les mauvaises nouvelles pourraient nous rendre sourds aux encouragements concrets apportés à la confiance des consommateurs et des chefs d’entreprise. Les réductions de charges, le remboursement accéléré de la TVA, la suppression de la taxe sur l’assurance crédit, etc. sont autant d’opportunités à saisir. Y recourir la tête froide et intelligemment sera le gage de notre prospérité en des temps meilleurs…
Rudi Thomaes, administrateur délégué FEB
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