Nécrologie numérique (1)
L’industrie musicale est décimée, la vidéo s’essouffle et qui achète aujourd’hui encore du software? Il y a de fortes chances que les livres et les magazines soient les prochaines victimes de la nécrologie numérique.
L’industrie musicale est décimée, la vidéo s’essouffle et qui achète aujourd’hui encore du software? Il y a de fortes chances que les livres et les magazines soient les prochaines victimes de la nécrologie numérique.
Les chiffres sont hallucinants. Dix ans après le pic des ventes musicales en 1999, le chiffre d’affaires a reculé de moitié. Les chiffres de vente sont adaptés à l’inflation par la Recording Industry Association of America. Plus étonnant encore: on n’a pas trouvé le moindre acheteur (pas un seul!) de dix des treize millions de chansons vendues sous forme numérique l’an dernier. 80% de tout le chiffre d’affaires de la musique numérique provient de 52.000 chansons seulement (selon une étude de PRS for Music).
Les discussions vont bon train sur les causes de cette situation. L’un accuse le piratage, alors que l’autre évoque le fait que les chansons numériques peuvent être achetées à la pièce. De cette façon, seuls les tubes trouvent preneurs, alors que le reste demeure dans les… rayonnages des boutiques numériques.
La technique numérique semble toujours prendre le modèle commercial de vitesse. Il en résulte que personne n’a encore trouvé un modèle commercial efficient de la manière de lancer avec succès sur le marché du contenu numérique et de manière durable. Digital Rights Management (DRM) semblait autrefois être la solution, mais on fait marche arrière aujourd’hui car pour ce qui est de l’industrie musicale spécifique, DRM a surtout permis à Apple d’acquérir un quasi monopole. (Le fait que l’iPod ait été le premier lecteur musical numérique convivial a évidemment eu son importance, tout mérite en revenant bien entendu à Apple.) Tout schéma DRM est de toute façon tôt ou tard piraté.
Le processus DRM avait été présenté en 2004 déjà par Lawrence Lessig, professeur à Stanford, dans son ouvrage Free Culture: How Big Media Uses Technology and the Law to Lock Down Culture and Control Creativity. Lessig a publié son livre sous licence ‘creative commons’, mais il se trouve aussi simplement en librairie. Free Culture est également en vente sous forme numérique, notamment pour l’Amazon Kindle. Sur ce e-lecteur qui n’est disponible qu’aux Etats-Unis, le livre de Lessig est assez ironiquement protégé DRM. La version PDF que vous pouvez télécharger sur le site web de Lessig, ne peut être utilisée sur le Kindle car le support PDF en est encore au stade expérimental sur ce e-lecteur.
Les livres, journaux et magazines sont transférés sans fil sur le Kindle. Pratique, mais vous ne pouvez ouvrir que les documents au format Kindle sécurisé. Vous ne pouvez pas partager des livres avec d’autres. Qui plus est, Amazon peut éliminer un livre déjà acheté de votre Kindle, au cas où il y aurait une raison pour cela. C’est ce qu’elle a fait en juillet avec une copie de 1984 d’Orwell qui paraissait illégale. Cela mécontenta fortement les clients, et Jeff Bezos, directeur d’Amazon, s’en excusa. Mais voilà qui démontre bien que le client que vous êtes, n’a dans un monde DRM pas voix au chapitre à côté des grands groupes de médias qui font ce qu’ils veulent avec “leur” contenu. Vous n’achetez en effet pas votre contenu numérique, vous ne faites que l’emprunter, aussi longtemps que le vendeur l’accepte et qu’il continue à supporter le format propre à son entreprise. Ce n’est pas vraiment là le modèle commercial qu’attend l’amateur de livres moyen. Existe-t-il des alternatives? Nous le verrons la prochaine fois.
PRS for Music: http://www.prsformusic.com/ NYT Op-Ed van Charles M. Blow: http://www.nytimes.com/2009/08/01/opinion/01blow.html
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