L’Europe ouvre une enquête formelle sur X
La Commission européenne va enquêter pour savoir si X, anciennement Twitter, respecte bien les règles du Digital Services Act et sa politique. En ce qui concerne la désinformation, les coches bleues et la transparence, entre autres, l’Europe estime qu’il existe des indices, selon lesquels X n’est pas en règle.
Le règlement DSA, l’abréviation de Digital Services Act, vise à s’assurer que les grandes plates-formes internet respectent un certain nombre de règles. Plus d’un an après l’entrée en vigueur du règlement, une première enquête formelle contre X débute donc. L’Europe se montre circonspecte et déclare qu’elle n’a pas encore condamné X ou qu’elle n’a pas encore affirmé qu’il y a eu des infractions, mais il existe suffisamment d’indices pour une enquête plus approfondie.
Sur quoi l’enquête portera-t-elle?
L’Europe veut, entre autres, enquêter pour savoir si X traite correctement la désinformation. Elle affirme que X utilise entre autres dans ce but les ‘community notes’, une politique sur la manipulation de la plate-forme et sur ce qu’on appelle les coches bleues. Mais l’Europe estime que la combinaison des trois est insuffisante pour lutter efficacement contre la désinformation. ‘Nous ne disons pas que ces choses ne fonctionnent pas, mais nous craignons qu’elles ne soient pas assez efficaces’, selon un haut fonctionnaire de la Commission européenne.
Les coches bleues sont un label sur X, qui était autrefois accordé pour confirmer l’authenticité de quelqu’un. Aujourd’hui encore, X les appelle des ‘utilisateurs vérifiés’, mais dans la pratique, rien n’est contrôlé: il s’agit seulement de savoir qui paie pour X. Mais la coche bleue donne l’idée qu’un profil est digne de confiance et vérifié, alors que toute personne disposant d’une carte de crédit peut l’obtenir en s’abonnant. Ce faisant, X s’écarte de la norme du secteur. C’est ainsi que chez d’autres plates-formes, il s’agit généralement d’une confirmation d’authenticité. Tel était du reste le cas aussi chez Twitter avant son rachat par Musk.
Autre soupçon de l’Europe: la bibliothèque publicitaire de X ne fonctionnerait pas correctement. Il s’agit là d’un élément obligatoire en vertu du DSA. X déclare de son côté s’interdire elle-même de montrer des choses choquantes telles que des images de blessures ou de personnes décédées sans avertissement préalable. Ce système existe, mais de telles images apparaissent assez souvent sans avertissement.
A propos des enquêteurs, il y a le problème qu’après l’entrée en fonction de Musk, ils n’ont plus eu accès aux données sur X, sauf moyennant un abonnement très coûteux. Entre-temps, il existe un formulaire pour demander l’accès d’une autre manière, mais l’Europe veut savoir là aussi si c’est bien suffisant.
Il est également reproché à X de réagir trop tard ou trop peu aux demandes de suppression rapide de contenus illicites. La Commission européenne souligne qu’elle n’a pas à décider elle-même de ce qui est légal ou non. Elle insiste sur le fait que chaque Etat membre a des règles différentes, mais que les notifications, y compris celles des autorités nationales, ne provoquent pas toujours une réaction chez X.
S’adapter ou se voir infliger une amende
C’est la première fois que l’Europe ouvre une enquête formelle pour le DSA. On ignore combien de temps cela durera. ‘Cela prendra le temps qu’il faudra’, déclare le haut fonctionnaire de l’UE. Si des infractions sont effectivement constatées, cela pourrait entraîner une amende pouvant aller jusqu’à six pour cent du chiffre d’affaires mondial de X.
Il n’est cependant pas nécessaire d’en arriver là. La Commission déclare explicitement qu’une amende serait le dernier recours. Dans un premier temps, elle souhaite que X trouve des solutions et affine son fonctionnement au sein de l’UE. Ce n’est que si la plate-forme d’Elon Musk refuse de se conformer au règlement que son compte bancaire sera… rogné.
Suffisant ou pas?
L’Europe n’exclut pas la possibilité que d’autres infractions éventuelles fassent l’objet d’enquêtes dans un avenir proche. Elle nuance également le fait que X n’est pas la seule plate-forme qui sera examinée, tout en ajoutant qu’il y a eu concertation avec l’ensemble du secteur avant et après l’entrée en vigueur du DSA, mais qu’à un moment donné, X a délaissé le code de conduite en la matière et a déployé son propre système (community notes).
‘En soi, ce n’est pas interdit par le DSA, mais nous voulons vérifier si X s’attaque efficacement aux problèmes et lutte suffisamment contre les risques sur sa plate-forme’, selon un porte-parole de la Commission.
X semble se diriger vers une première confrontation formelle avec la Commission européenne depuis son rachat par Musk et le changement d’appellation de Twitter en X. A part s’adapter aux règles, il n’y a pas grand-chose d’autre à faire. De plus, si X décidait de quitter l’Europe à la suite de l’enquête, cela ne changerait rien à l’affaire. ‘Aujourd’hui, l’entreprise doit se conformer au DSA. Si elle devait partir demain ou si le nombre d’utilisateurs dans l’UE chutait en-dessous de 45 millions de personnes, elle n’en dépendrait plus, mais les choses sur lesquelles nous enquêtons, sont liées à la situation actuelle et à la législation qui doit être respectée aujourd’hui’, prétend-on à la Commission européenne.
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