Cedric Deweeck
“Les startups peuvent aussi bien réussir en Belgique”
L’on entend toujours dire que San Francisco est le paradis des startups technologiques. Mais une jeune entreprise a autant de chances de connaître le succès en Belgique. Mon conseil est donc le suivant: n’allez pas aux Etats-Unis.
L’on entend toujours dire que San Francisco est le paradis des startups technologiques. Mais une jeune entreprise a autant de chances de connaître le succès en Belgique. Mon conseil est donc le suivant: n’allez pas aux Etats-Unis. Chaque matin, je lis les journaux avant de me mettre au travail. Un début en douceur, quoi. Du moins jusqu’à la semaine dernière et la lecture d’un article consacré à Tim Van Damme, l’ex-mobile designer belge d’Instagram. Tim n’est certainement pas un inconnu à San Francisco, où il s’est déjà taillé une solide réputation.
Pour beaucoup, c’était probablement la première fois qu’ils entendaient parler de Tim. Moi-même, j’ai eu la chance de le rencontrer dans la Silicon Valley, où il travaillait dans un bureau de Facebook. Il quitte à présent Instagram pour rejoindre Dropbox. Une évolution de carrière incroyable que celle-là. Je suis fan.
Mais je souhaite évoquer ici la fin de l’article en question et plus précisément sa conclusion: ‘En tant qu’entrepreneur technologique, il vaut nettement mieux être à San Francisco qu’en Belgique.’ Une citation que j’ai déjà souvent lue et entendue. Et honnêtement, je ne la supporte plus.
Les startups technologiques sont souvent liées à la Silicon Valley, ce qui est tout à fait normal. Il s’agit là du nirvana des startups. L’ambiance et l’énergie que l’on y trouve, ne se rencontrent pas facilement en Belgique. Et cela risque de ne pas changer dans les années à venir.
Mais ce n’est encore et toujours pas une raison pour que l’entrepreneur technologique débutant belge fasse aussitôt ses valises et s’en aille.
Avez-vous du répondant? J’ai moi-même pu séjourner à San Francisco pour ma propre startup. Notre petite entreprise permet de transférer des présentations et du contenu supplémentaire d’orateurs vers les appareils mobiles du public.
Nous avons participé à plusieurs salons de startups et avons pu nous présenter à un jury impressionnant. Notre startup se trouvait alors encore à un stade très précoce: nous ne disposions pas encore d’un prototype opérationnel, mais uniquement d’une démo.
En soi, il s’agit alors de relever un formidable défi que de vendre son produit. Nous l’avons remarqué: lorsqu’on parle avec des investisseurs, l’on est la cible d’un tas de questions. ‘Quelle est la taille de votre équipe?’ Voulez-vous déménager ici?’ ‘De combien d’argent avez-vous besoin?’ ‘Quel est votre business?’ Et surtout: ‘Avez-vous du répondant?’
San Francisco est une ville incroyable, remplie de personnes talentueuses qui travaillent quasiment toutes pour des startups. Tout le monde collabore pour créer ‘the next big thing’. Les défis à relever pour un entrepreneur débutant, sont toutefois gigantesques.
La vie à San Francisco par exemple est affreusement chère. Et la concurrence est immense. Si vous ne disposez pas encore d’une équipe, il est quasiment impossible de recruter du talent. Les géants high-tech comme Facebook, Google et Apple sont en effet eux aussi à la recherche de talent, mais eux, ils ont les moyens. Tout le monde recherche des investisseurs.
Des études montrent qu’il y a moins d’investissements pour des idées à un stade précoce. Le débouché est le Graal à San Francisco: il faut d’abord démontrer que vous pouvez vendre, avant de pouvoir parler d’investissements.
Ne partez pas! Etes-vous vous-même un entrepreneur débutant et vous sentez-vous interpelé par le message des entrepreneurs high-tech belges qui s’en vont aux Etats-Unis? Un conseil: ne partez pas! C’est incroyablement dur, je parle par expérience.
Ne devez-vous dès lors jamais partir? Non. Je suis encore et toujours convaincu que San Francisco est LA cité des startups. Mais vous devez bien évaluer et planifier votre départ. Créez d’abord des prototypes opérationnels, entourez-vous de gens talentueux, testez votre produit sur un petit marché, persuadez les clients, élaborez un business model correct. Tout cela peut se faire parfaitement en Belgique et en Europe. Il y a ici un accès au capital. La commissaire européenne Neelie Kroes vient par exemple de créer un fonds de 100 millions d’euros en vue de soutenir les startups européennes.
Il y a ici aussi un accès au talent. La Belgique par exemple est connue pour la qualité de ses formations. Et les investisseurs y sont sensibles. Même si l’histoire des ‘school drop-outs’ (décrochages scolaires) est toujours bien ancrée, ce n’est pas toujours le fait des meilleurs entrepreneurs et certainement pas des plus fructueux. En outre, la recherche du talent pour la création d’une équipe s’effectue ici de manière plus fluide qu’aux Etats-Unis, étant donné qu’il y a moins de concurrence.
La Belgique peut-elle devenir un concentrateur de startups? J’y crois encore et toujours. Mais il faut alors que tout le monde tire dans le même sens. Et la Belgique doit surtout avoir l’ambition de canaliser les initiatives des entrepreneurs. Car des règles ne pourront jamais dominer l’entreprenariat. La Belgique n’aura sa chance que si nous confions la direction aux entrepreneurs.
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