Lies Van Cauter
Les deux visages de la banque de données des panneaux routiers
La classe politique veut depuis des années mettre de l’ordre dans la profusion des panneaux de signalisation routière. Une première étape consiste à cartographier le nombre de panneaux au moyen de la banque de données ad hoc lancée en 2008. Il n’empêche que cette banque de données est loin d’être actualisée. Lies Van Cauter consacre précisément sa thèse de doctorat à l’échec des systèmes d’informations inter-administratifs en Flandre et à ses raisons.
L’expert néerlandais en circulation routière Hans Monderman plaide pour une réduction de nombre de panneaux de signalisation et de marquages au sol, afin que les conducteurs roulent de manière plus concentrée. Des expériences effectuées notamment au Danemark, en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas démontrent qu’il y a moins de morts sur les routes dépourvues d’une pléthore de panneaux et que les conducteurs y roulent automatiquement plus prudemment (mobilité intelligente). La classe politique belge souhaite depuis des années déjà mettre de l’ordre dans la profusion des panneaux routiers. Il existe un consensus par delà les partis en faveur de la mobilité intelligente. Une première étape consiste à cartographier le nombre et le type de panneaux routiers. Tel est le but de la banque de données lancée en 2008.
Tout le monde semble d’accord et pourtant, cette banque de données des panneaux routiers est loin d’être à jour. Au cours des débats parlementaires du 15 janvier 2015, l’on a reproché aux administrations communales et à quelques autres administrations flamandes leur ‘mauvaise volonté’ et leur ‘renoncement à leur obligation d’actualisation’. Nous avons analysé les fondements de ces prises de position.
Problèmes dans le passé
Dans le cadre d’une thèse de doctorat à la KU Leuven, 130 des 308 communes flamandes ont été interrogées à propos de la banque de données des panneaux routiers. 26 de ces administrations locales n’ont jamais collaboré à cette banque de données, dont 7 villes, parce qu’elles disposaient d’une banque de données propre incompatible, et 19 petites communes par manque de capacité. Celles qui participèrent, ont très vite été aux prises avec des problèmes de connexion et des bugs, mis aussi de perte de données, alors que la saisie d’informations ou l’élaboration de rapports prenaient beaucoup de temps. L’utilisation de la banque de données n’apportait en outre que peu de valeur ajoutée à la politique de circulation locale. Son utilisation par les communes interrogées le fut par 38 sur les 130 peu après l’implémentation, ce qui s’avéra néfaste pour la qualité des données. La réputation était à un moment donné si mauvaise que les communes qui n’utilisaient pas encore la banque de données, décidèrent de ne même pas s’y risquer. Certaines créèrent leur propre système d’informations, alors que d’autres encore décidèrent d’attendre que le système fonctionne mieux. En mars 2013, le système d’informations fut complètement actualisé. Plusieurs communes se (re)mirent alors à utiliser la banque de données, mais le nombre d’utilisateurs demeura limité.
Solution d’avenir
Que faut-il faire à présent? Dans les débats parlementaires, l’on plaide pour ‘l’utilisation du bâton après la carotte’. Ce ‘bâton’ est une obligation légale en vue d’actualiser la banque de données des panneaux routiers. Pour d’autres banques de données locales flamandes, le gouvernement flamand a déjà appliqué pareille tactique. Le passé nous apprend que plusieurs scénarios indésirables peuvent se manifester en la matière. Option A: les communes prennent à coeur cette obligation, mais la mise jour sécurisée de la banque de données peut se faire aux dépens d’autres tâches non obligatoires. Option B: l’actualisation de la banque de données est légalement obligatoire, mais son absence n’est pas sanctionnée. Toutes les communes n’entreprendront alors pas d’action. Option C: la banque de données est actualisée juste avant une date-butoir obligatoire, mais elle n’est de ce fait pas mise en jour en continu. Option D: la banque de données est actualisée un minimum.
Il y a aussi des alternatives: ‘la tendre carotte’. Primo, les communes pourraient obtenir une compensation financière pour actualiser la banque de données. Les administrations locales sont toujours à la recherche de plus de financement, mais du point de vue du gouvernement flamand, cela ne semble pas opportun en cette période d’économies. La banque de données a déjà coûté 20 millions d’euros. Il pourrait y avoir aussi des effets pervers, comme une actualisation partielle en vue de recevoir le financement. De plus, il apparaît que si le stimulant financier est supprimé, la saisie de données régressera de manière radicale. Un scénario qui s’est par exemple manifesté en 2014 déjà à l’expiration de l’accord de collaboration dénommé ‘Milieu’.
La ‘tendre carotte’ serait la création d’un scénario ‘win-win’ (où les deux parties sont gagnantes). Au lieu de reprocher aux administrations locales leur mauvaise volonté, l’on pourrait établir une relation durable par le truchement d’un nombre restreint de mesures. Primo: de nouveau un programme de formation actif à grande échelle, où l’objectif, l’importance mutuelle et l’utilisation technique seraient explicités. Secundo: la mise en oeuvre d’un helpdesk actif accessible. Tertio: la démonstration périodique de l’utilité de la banque de données dans la politique suivie. Et enfin: la combinaison plus poussée des banques de données existantes et l’application du ‘only once principe’.
En résumé, l’on peut affirmer que la convivialité a été nettement augmentée depuis la rénovation du système, mais la banque de données pâtit encore de son image précédente. Le dialogue est donc plus que jamais nécessaire. Il est temps de considérer les administrations locales surtout comme des partenaires et pas comme des subordonnés insoumis.
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