Siddy Jobe
L’entreprenariat ‘tech’ en Belgique à l’aube d’un tournant social
Il y a un an environ, je me suis immergé dans la culture du venture capital alias le capital risque. Au terme d’un voyage d’affaires animé à New York, j’ai pris l’avion en direction de San Francisco, où je devais suivre un Master in Venture Capital à la HAAS Business School de Berkeley.
Il y a un an environ, je me suis immergé dans la culture du venture capital alias le capital risque. Au terme d’un voyage d’affaires animé à New York, j’ai pris l’avion en direction de San Francisco, où je devais suivre un Master in Venture Capital à la HAAS Business School de Berkeley.
Outre un solide ensemble de cours préparatoires, les participants à ce programme ont l’opportunité de rencontrer une vingtaine de professionnels une semaine durant. Il s’agit tant d’investisseurs en capital risque, d’investisseurs institutionnels gérant un portefeuille de fonds de capital risque, d’avocats spécialisés dans les investissements en capital risque et dans la création de fonds de capital risque, ainsi que ‘last but not least’ d’entrepreneurs. Le programme exploite diverses méthodes éducatives, y compris des études de cas, des débats de groupe, l’utilisation de banques de données électroniques, et des ateliers en petits groupes.
Avant le début des cours, j’ai été à la découverte du campus avec, dans l’esprit, un sérieux décalage horaire correspondant d’abord à six heures de différence avec New York, plus trois heures avec San Francisco. Lors de ma balade matinale, je suis arrivé devant la faculté de droit, dont la façade toute entière était recouverte d’une citation de Benjamin Cardozo:
“You will study the wisdom of the past, for in a wilderness of conflicting counsels, a trail has there been blazed. You will study the life of mankind, for this is the life you must order, and, to order with wisdom, must know. You will study the precepts of justice, for these are the truths that through you shall come to their hour of triumph. Here is the high emprise, the fine endeavor, the splendid possibility of achievement, to which I summon you and bid you welcome.” (“Vous allez étudier la sagesse du passé car elle laisse une trace dans la jungle des avis contradictoires. Vous étudierez la vie de l’humanité car c’est la vie que vous devrez diriger. Or pour pouvoir y arriver avec sagesse, vous devrez avoir la connaissance. Vous étudierez les préceptes de la justice car ce sont les vérités qui connaîtront leur heure de gloire grâce à vous. Je vous souhaite la bienvenue et vous exhorte donc à atteindre cet objectif ultime, cette formidable aspiration et cette magnifique opportunité de vous réaliser.)
Même si je me trouvais alors face à la faculté de droit et non pas devant celle d’économie, cette citation m’est restée en mémoire. Cela peut à première vue paraître un tantinet étrange pour quelqu’un qui s’inscrit à un cours de venture capital. Quoi qu’il en soit, le capital risque est un pari calculé sur l’avenir, pas sur le passé.
Mon intérêt pour ce domaine spécifique n’est pas le fait du hasard. Depuis 2005, je travaille comme analyste d’actions à la Banque Degroof, où je suis les entreprises belges cotées en Bourse dans les secteurs télécoms, des médias et technologique. A première vue, cela peut sembler un inconvénient de suivre des entreprises de trois secteurs différents. C’est en partie vrai, parce qu’il faut à chaque fois étudier et explorer la situation, le jargon et les récursivités du secteur. Moi-même, je considère cependant cela comme un avantage, parce que ces secteurs croissent toujours plus l’un vers l’autre. Parallèlement à mon travail d’analyste d’actions, qui s’effectue en grande partie dans un monde établi et traditionnel, j’explore depuis 2007 déjà et de ma propre initiative l’écosystème des entreprises technologiques débutantes en Belgique. Au début par plaisir, mais assez rapidement avec un but bien précis.
J’ai fait des études en sciences économiques appliquées à la RUCA d’Anvers, puis en gestion financière à la Vlerick School de Gand, et je ne suis donc ni ingénieur ni développeur de logiciels. Il n’empêche qu’après toutes ces années de travail comme ‘analyste tech’ et conseiller de startups, je suis parfaitement capable de parler ouvertement de 3G, 4G, carnets de route de produits, scrum (gestion de projets), UI, capacité de serveur, etc. C’est cette expérience aussi vaste que variée qui justifie mon accès et ma participation au monde des jeunes tech startups. Je peux en effet les aider à élaborer leur business plan financier et à traduire les codes logiciels en un business plan avec des chiffres étayés.
Maintenant, je sais comme nul autre que pour une startup, un business plan financier représente un impressionnant exercice de remue-méninges, étant donné que l’itération et le pivotement sont une occupation hebdomadaire. Je le considère cependant comme un exercice plus qu’utile qui fait surgir tout un tas de questions qui, sinon, n’auraient pas été posées. De plus, il oblige les entrepreneurs à identifier les options possibles, à faire des choix et à travailler de manière ciblée.
En tant qu’analyste et probablement aussi qu’investisseur de capital risque, l’on étudie précisément le passé et l’environnement, afin d’identifier un ‘courant sous-jacent’ qui indique la future direction à suivre. Je peux avouer avec plaisir qu’au fil des années, j’ai découvert un nouveau courant sous-jacent qui s’intensifie toujours plus. Ce courant, c’est l’entreprenariat technologique en Belgique. Une base toujours plus large de personnes jeunes et moins jeunes est attirée par ce monde passionnant. Hier encore un peu hésitantes, aujourd’hui déjà un peu plus sûres d’elles et demain oeuvrant à pleine puissance. Cette observation a quasiment un impact mathématique avec une chance de succès toujours plus grande. Au fil des années, j’ai vu croître le nombre de personnes qui se sentent attirées par l’entreprenariat technologique. Toutes ces personnes ont acquis de l’expérience – bonne et moins bonne – en partant de leur propre vécu, tout comme je l’ai fait.
Bref, il n’y a pas qu’une croissance volumétrique, mais il y a aussi une croissance qualitative. L’idée de l’écosystème des startups belges sous la forme d’un système vivant, je la trouve incroyablement intéressante. C’est surtout au départ de la science que l’intérêt individuel commence à prendre d’énormes proportions, de sorte qu’à l’avenir, un tournant social sera atteint. L’entreprenariat technologique sera généralement répandu. Les investisseurs ne pourront plus rester en arrière, mais devront rechercher activement les meilleurs projets et les meilleurs entrepreneurs. Et une fois qu’ils les auront trouvés, l’argent seul ne suffira pas pour adhérer à ces histoires à succès.
Voilà ce qui attend l’écosystème des startups belges. Il est malaisé de préciser quand nous atteindrons ce tournant social, mais si nous continuons à arpenter cette voie de l’acquisition d’expérience, l’on y arrivera plus vite qu’on le pense. Je vous souhaite la bienvenue et vous exhorte donc à atteindre cet objectif ultime, cette formidable aspiration et cette magnifique opportunité de vous réaliser / Here is the high emprise, the fine endeavor, the splendid possibility of achievement, to which I summon you and bid you welcome.”
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici