Le Parlement européen veut mieux protéger les enfants du ciblage publicitaire sur le net
Le Parlement européen a fixé jeudi la position qu’il défendra face aux États membres (Conseil) en vue du futur règlement sur les services numériques, appelé à mettre un terme au “Far West” d’internet et à mieux réguler le terrain de jeu des géants du net. Les eurodéputés insistent notamment sur la protection des enfants ciblés par les publicitaires.
Sous la devise “ce qui est interdit ‘offline’ doit aussi l’être ‘online'”, l’Union européenne veut imposer de nouvelles contraintes aux opérateurs du net pour lutter contre les produits, services et contenus illicites. Le cadre actuel remonte à l’an 2000 et est dépassé par l’évolution fulgurante du secteur. “Ce que nous avons vu l’an dernier aux États-Unis avec la prise d’assaut du Capitole était le point culminant d’années de discours de haine non contrôlés, d’incitation à la violence, de stratégies de désinformation et de déstabilisation répandues sans retenue sur les réseaux sociaux et dont ces réseaux ont largement tiré profit”, a lancé le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, lors du débat parlementaire. “Il est devenu évident pour tous que l’absence de règles et de contrôle démocratique sur les décisions d’une poignée de grandes plateformes, aujourd’hui devenues des espaces publics systémiques, n’est plus tolérable.”
Il convient notamment d’obliger les plateformes à supprimer rapidement les contenus illicites (incitation à la haine, désinformation, etc.), de mieux contrôler les produits mis en vente (contrefaçons, produits dangereux, etc.), d’exiger la transparence du fonctionnement des algorithmes, d’interdire la collecte de données d’utilisateurs relatives à leur santé, orientation sexuelle ou préférences politiques, ou encore de repérer les abus dans les images pornographiques diffusées par des usagers de plateformes. Dans ce futur règlement sur les services numériques (mieux connu sous son acronyme anglais DSA), une attention particulière est portée aux grandes plateformes en ligne (telles que Meta-Facebook, Google, Apple, Amazon ou Microsoft). Elles risquent des amendes pouvant aller jusqu’à 6% de leur chiffre d’affaires annuel, voire une exclusion du marché unique européen, si elles foulent aux pieds ces obligations de manière répétée.
Le DSA est une priorité de la présidence française du Conseil de l’UE, qui espère le faire aboutir ce semestre, de même que le futur règlement sur les marchés numériques (DMA, sur lequel Parlement et États membres sont déjà au stade de la négociation). Le Parlement européen, dans son mandat de négociation adopté jeudi par 530 voix pour, 78 contre et 80 abstentions, réclame un choix plus transparent et éclairé pour les destinataires des services en ligne, notamment des informations sur la manière dont leurs données seront monétisées. Le refus de consentement ne doit pas être plus difficile ou plus long pour le destinataire que l’octroi du consentement, disent les élus. Et en cas de refus ou de retrait du consentement, les destinataires devraient se voir proposer d’autres options pour accéder à la plateforme en ligne, notamment des “options fondées sur la publicité sans suivi”. Les eurodéputés insistent sur la protection des mineurs d’âge: les techniques de ciblage ou d’amplification impliquant les données de mineurs à des fins d’affichage de publicités devraient être interdites (marketing direct, profilage et publicité comportementale), tout comme le ciblage de groupes vulnérables.
En termes de dédommagement, les bénéficiaires de services numériques et les organisations qui les représentent devraient avoir accès à des voies de recours à l’encontre des plateformes en ligne, pour tout dommage subi en raison du non-respect de leurs obligations, ajoutent les élus. Une fois les négociations terminées avec le Conseil, l’accord des deux institutions sera à nouveau soumis au Parlement.