Le paiement sans contact s’imposera-t-il comme la norme cette année ?
L’innovation numérique sans doute la plus visible dans la distribution est le paiement sans contact. Celui-ci deviendra-t-il la norme en 2018 dans notre pays ? Peut-être, mais gare au morcellement technologique.
Avez-vous utilisé le paiement sans contact pour vos achats de fin d’année ? Il suffit en effet d’une carte bancaire dotée d’une puce NFC ou d’une appli sur smartphone utilisant la communication en champ proche (NFC). Si tel fut le cas, vous aurez comme nous constaté que le paiement sans contact peut encore s’apparenter à un défi. Notamment parce que le caissier n’a pas encore été confronté à une telle transaction sans fil ou ne sait peut-être même pas si son terminal supporte ce type d’opération. Ou parce que telle appli n’est pas compatible avec le terminal du commerçant. Le moment est donc venu de faire le point sur ce qu’il faut savoir lorsque l’on souhaite utiliser le paiement sans contact.
Par rapport aux pays voisins, le paiement sans contact en est encore à ses balbutiements en Belgique.
De quoi avez-vous besoin ?
Le paiement sans contact se fait via NFC, entendez en near-field communication où l’échange de données entre émetteur et récepteur se fait en mettant les appareils à proximité immédiate l’un de l’autre. Le commerçant doit donc disposer d’un terminal de paiement adapté : il se reconnaît au logo sans contact (avec des ondes radio). Quelque 80 % de tous les commerçants posséderaient un terminal compatible NFC. De son côté, l’acheteur doit avoir une carte bancaire dotée d’une puce NFC ou d’un smartphone équipé de NFD et d’une appli, que celle-ci soit de sa banque, de Bancontact, Android Pay ou une alternative comme SEQR. Les utilisateurs d’iPhone d’Apple en sont pour leurs frais : le service Apple Pay n’est pas encore accessible dans notre pays au moment d’écrire ces lignes, même si la situation devrait évoluer rapidement. En effet, la Belgique satisfait à l’ensemble des exigences d’Apple, affirmait récemment au Soir Henri Dewaerheijd, country manager de MasterCard. L’appli choisie doit en outre être liée à une carte bancaire utilisée effectivement pour les paiements.
Comment cela fonctionne-t-il ?
Le commerçant introduit le montant sur son système de caisse, après quoi le client passe son smartphone ou sa carte de paiement NFC à proximité immédiate du logo figurant sur le terminal de paiement. En fonction du montant et de l’appli ou carte utilisée, il convient d’introduire encore un code PIN. La seule différence entre un paiement ‘classique’ avec carte bancaire et un paiement sans contact se situe en fait dans la transmission de données sans fil entre la carte/smartphone NFC et le terminal. ” Par la suite, le traitement se fait exactement de la même manière. Pour le commerçant, le son ‘bip-bip’ typique confirme que le paiement a été correctement exécuté “, explique Johan Maes, expert en innovation auprès de la plateforme de traitement Worldline.
Est-ce sécurisé ?
Oui. Du moins si vous respectez quelques règles de base en tant qu’utilisateur. Pour payer sans contact avec votre smartphone, vous devez déverrouiller votre appareil : prévoyez donc un code PIN fort. La carte de paiement sans contact sera de préférence conservée dans un portefeuille qui fera office de cage de Faraday et protégera la communication sans fil afin d’éviter que quelqu’un ne puisse vider votre carte à l’aide d’un terminal mobile. Cela dit, Worldline considère comme très faible le risque d’un tel type de fraude. ” La force de schémas de paiement comme Bancontact ou Maestro est que le nom du commerçant est connu. Retrouver un fraudeur est donc un jeu d’enfant “, affirme Johan Maes. Qui plus est, un fraudeur doit être physiquement présent, ce qui rend son trafic nettement plus limité par rapport par exemple à l’hameçonnage ou à la fraude à l’e-commerce. ”
Le danger principal se situe dès lors dans la perte physique de sa carte bancaire puisque n’importe qui pourra effectuer de petits achats sans devoir connaître le code PIN.
Mais pourquoi y a-t-il des ratés ?
Tout comme une carte bancaire peut parfois être refusée, notamment parce que la puce n’est pas lue correctement, il arrive que le terminal n’accepte pas un paiement sans fil. Il suffit parfois de réessayer pour que le paiement soit accepté, selon une bonne vieille loi de l’informatique. Mais il arrive que le problème subsiste, ce qui est dans la plupart des cas imputable à l’appli utilisée. C’est ainsi que l’appli Android Pay fonctionne selon le schéma de paiement international Maestro et le schéma de paiement des cartes de crédit (Mastercard/Visa). ” Si le commerçant ne supporte que Bancontact, Android Pay refusera le paiement, explique Johan Maes. Sur certains systèmes de caisse, l’employé doit également indiquer à l’avance le schéma de paiement qui sera utilisé, tandis que pour les cartes de crédit, il doit préciser séparément le mode de paiement. Or le commerçant ne sait malheureusement pas toujours clairement la manière dont le client souhaite payer lorsqu’il place son smartphone devant l’appareil. De même, il est important que le commerçant initie d’abord le paiement avant d’introduire le montant, sans quoi le paiement ne sera pas accepté. ”
Dois-je encore introduire un code PIN ?
En l’occurrence, la réponse n’est pas claire : il faut notamment voir quelle appli ou carte est utilisée, de même que la banque dont le consommateur est client ainsi que le montant à payer. La plupart des banques ont mis en place des seuils de sécurité. Ainsi, le paiement sans contact avec une carte NFC n’est possible que pour des montants limités : en général jusqu’à 25 ?. Après un certain nombre de transactions ou au-delà d’une certaine limite, l’utilisateur devra introduire un code PIN.
Vous souhaitez payer sans contact avec une appli ? En-dessous de 20 ou 25 ?, pas besoin de code PIN : il suffit de déverrouiller l’écran de votre smartphone et de placer l’appareil à proximité immédiate du terminal.
Dans le cas d’Android Pay – qui est donc lié à une carte de débit ou de crédit -, il n’existe même aucune limite et le client pourra donc régler même son caddy entier. Pour payer un petit montant (jusqu’à 25 ?), il suffit d’activer le smartphone et de le placer contre le terminal de paiement. Pour de plus gros paiements, votre téléphone devra être déverrouillé à l’aide du code PIN, d’un schéma ou d’une empreinte digitale si vous l’avez ainsi prévu. ” La limite de paiement est en l’occurrence identique à celle des cartes de débit et de crédit associées. Cela fonctionne aussi à l’international. Si vous souhaitez également payer aux Etats-Unis avec Android Pay, vous devez certes activer les cartes pour ce faire, tout comme vous le faites pour des cartes physiques “, précise toujours Johan Maes.
Le paiement sans contact est-il déjà populaire ?
La plupart des grandes banques proposent désormais des cartes de débit sans contact à leurs clients. Selon Worldline, on recense déjà 3,5 millions de cartes de débit en circulation en Belgique, soit plus de 20 % de l’ensemble des cartes de débit. La majorité des banques émettent une carte de banque NFC à partir du moment où le client doit remplacer sa carte. Mais dans certaines banques, les clients peuvent demander eux-mêmes une carte NFC. De même, les cartes de crédit sont toujours plus souvent dotées du NFC. On compte un peu moins de 400.000 cartes de crédit NFC dans notre pays.
2017 a été l’année où le grand public a été sensibilisé au paiement sans contact par smartphone. Depuis octobre de l’an dernier en effet, tout Belge disposant d’un smartphone Android et d’un compte bancaire auprès de l’une des 20 banques belges peut effectuer des paiements sans contact via l’appli Bancontact. Depuis le lancement, 57.339 paiements sans contact ont été effectués. Le chiffre peut sembler modeste, mais Kim Van Esbroeck, CEO de Bancontact Company, se déclare néanmoins satisfaite. ” Un beau résultat, compte tenu du fait qu’un changement de comportement doit intervenir pour payer sans contact. Nous constatons par ailleurs que l’appli Bancontact attire bon nombre de nouveaux utilisateurs. ”
Sur le total des paiements sans contact, 3 % environ s’effectueraient chaque mois via l’appli Bancontact. Selon Johan Maes, la plupart des paiements sans contact se font en effet toujours via des cartes NFC, même s’il estime que les appli deviennent toujours plus populaires. ” Nous avons constaté la même évolution à l’étranger. Dès qu’une masse critique est atteinte et que les gens voient toujours plus de paiements par smartphone autour d’eux, ils font de même. ” Un point de vue que confirme Kim Van Esbroeck. ” Nos chiffres montrent que la nouveauté du paiement sans contact incite le Belge à payer avec l’appli Bancontact. Nous le voyons également dans les réactions des utilisateurs qui disent continuer à utiliser le paiement sans contact une fois qu’ils en ont pris l’habitude. ”
Où l’utilisateur paie-t-il le plus souvent sans contact ?
” L’appli Bancontact est surtout utilisée dans les paiements aux supermarchés, mais aussi dans les snacks, les restaurants d’entreprise, les boulangeries, les fleuristes, les pharmaciens et les friteries. Rien d’étonnant à cela puisque la convivialité du paiement sans contact se remarque surtout lors du paiement de petits montants sans code PIN “, dixit encore Van Esbroeck.
2018 sera-t-elle une année charnière ?
” Sans doute. Une fois la masse critique atteinte, l’utilisation du sans contact ira en s’accélérant. Reste qu’il faudra veiller à former les commerçants et les vendeurs, tout en veillant dans certains cas à aider le consommateur à franchir le pas. Des campagnes de sensibilisation joueront un rôle à cet égard, mais voir la technologie utilisée dans la pratique sera au moins aussi important “, estime Johan Maes.
” Par rapport aux pays voisins, le paiement sans contact en est encore à ses balbutiements en Belgique. Aujourd’hui, Belfius, Beobank, BNP Paribas Fortis, CBC, KBC et ING proposent déjà des cartes de débit permettant de payer sans contact avec Bancontact. D’autres banques suivront cette année, ce qui permettra à un nombre croissant de Belges de découvrir la facilité du paiement sans contact par carte, tant pour les petits que les gros montants. Une enquête que nous avons menée indique d’ailleurs que notre compatriote souhaite payer davantage sans contact, mais aussi par mobile [de personne à personne, NLDR]. L’an dernier, 12 millions de paiements ont été effectués avec l’appli Bancontact, soit un quadruplement par rapport à 2016. Nous prévoyons que tant le mobile que le sans contact continueront à se développer cette année “, conclut Kim Van Esbroeck.
D’autres innovations en vue
Plus tard dans l’année, votre banque devra ouvrir vos données de compte aux entreprises dans le cadre de la directive PSD2. En principe, cette directive aurait déjà dû entrer en vigueur, mais la Belgique a tardé à transposer cette directive européenne dans le droit belge. Tel devrait néanmoins être le cas au printemps, ce qui implique que les banques seront tenues de permettre à des tiers d’accéder à vos données bancaires. Concrètement, songez aux boutiques Web qui pourront ainsi élargir leurs possibilités de paiement. Apple Play devrait normalement faire son entrée dans notre pays plus tard dans l’année. Il s’agit de l’équivalent d’Apple Pay pour les smartphones Apple. De même, il se pourrait que l’on voie débarquer aussi cette année Samsung Pay. Le fabricant sud-coréen a en effet annoncé début 2016 son intention d’introduire ce service de paiement en Belgique également, mais l’annonce semblait quelque peu prématurée.
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