La 5G est-elle dangereuse? ‘Non, mais…”
“Le rayonnement croissant des pylônes d’antennes GSM constitue un risque possible, selon des chercheurs dans le monde entier.” C’est avec ce titre qu’un article de presse a attiré notre attention, mais aussi notre… détecteur d’inepties. Ces 171 scientifiques et docteurs ont-ils donc tort?
Au moyen d’une lettre ouverte adressée à la Commission européenne, le groupe de chercheurs demande notamment de prendre des mesures raisonnables et de stopper le déploiement (futur) de la 5G et ce, jusqu’à ce qu’on puisse démontrer que le rayonnement de la 5G, 4G, 3G, 2G et du wifi ne représente pas un danger pour la population.
Il convient aussi que les normes de rayonnement européennes soient revues à la baisse et qu’une force opérationnelle (‘task force’) indépendante soit créée pour évaluer les normes et leurs risques, en ce compris la vision du rayonnement total auquel est soumis le citoyen.
A court et à moyen terme
Le contenu de la lettre ouverte semble être scientifiquement étayé et fait référence à diverses études. Mais ici, il y a quand même un hic: il s’agit surtout d’études évoquant de ‘possibles’ dangers.
“Il existe suffisamment d’études qui suggèrent les effets du rayonnement électromagnétique. Mais à ma connaissance, il n’y en a aucune qui prouve par A + B que cela représentera à court ou à moyen terme un danger pour le corps humain”, déclare Guy Vandenbosch, expert en rayonnement à la KU Leuven, à Data News.
Vandenbosch nous explique que la 5G n’engendrera pas forcément davantage de rayonnement ou un rayonnement plus puissant dans notre chambre à coucher: “Qu’il s’agisse de la 2G, 3G, 4G ou de la 5G, on a en fait affaire au même type de rayonnement pour lequel il existe aujourd’hui des normes. Il faut donc se demander surtout si les normes sont suffisamment correctes pour le rayonnement en question. Mais ces normes sont très faibles pour l’instant en Belgique et ce, même si elles diffèrent à Bruxelles, en Flandre et Wallonie.”
Il existe suffisamment d’études qui suggèrent les effets du rayonnement électromagnétique. Mais à ma connaissance, il n’y en a aucune qui prouve par A + B que cela représentera à court ou à moyen terme un danger pour le corps humain.
C’est l’ensemble qui compte
Ce qui est plus important que le nombre total de pylônes ou que la technologie présente sur ceux-ci, c’est la quantité totale de rayonnement. “Si on parle de rayonnement électromagnétique, il s’agit alors de votre signal 4G et du wifi, mais aussi de votre radio et TV. Tout ce qui est électrique, émet quelque chose.”
“En fait, on l’entend trop peu dans tout le débat. Il y a des gens qui sont pour ou contre, mais si on veut vraiment faire quelque chose, il devrait être alors question de réduire l’impact global du rayonnement.”
En marge de ce débat, le groupe de chercheurs indique aussi dans sa lettre ouverte que pour la 5G, il faudra nettement plus d’antennes. Mais davantage de pylônes ne signifie pas plus de rayonnement en soi. “Si la couverture du réseau est suffisamment bonne, il y aura moins de rayonnement”, ajoute Vandenbosch. Autrement dit, si un pylône d’antennes et un smartphone doivent éprouver plus de difficultés à se trouver mutuellement, cela ira de pair avec davantage de rayonnement.
Préoccupation justifiée
Entre-temps, le magazine scientifique EOS a déjà annoncé que la plupart des chercheurs qui ont signé la lettre ouverte, soit sont à la retraite, soit ne sont pas actifs dans le domaine du rayonnement. C’est ainsi que le magazine signale que pour les Pays-Bas, c’est un spécialiste des… insectes à la retraite qui a signé. Le seul nom belge apparaissant sur la lettre est celui de Marie-Claire Cammaerts, une biologiste pensionnée active à l’époque à l’ULB et, selon Vandenbosch, spécialisée dans les… fourmis.
Il n’empêche que l’expert en rayonnement de la KU Leuven ne veut pas aller jusqu’à qualifier la lettre ouverte d’ineptie: “Ces chercheurs ont marqué un point: ils sont tous préoccupés par l’impact du rayonnement. A court et à moyen terme, le risque est négligeable, pour autant que nous fassions preuve de prudence avec les normes, ce qui est le cas en Belgique. Nous ne pouvons en tout cas pas savoir aujourd’hui quels seront les effets sur une période de 40-60 ans.”
Long terme
Qu’en sera-t-il si ce lien peut quand même être démontré à long terme? Ici encore, Vandenbosch ne s’attend pas à un retour vers l’ère de la ligne téléphonique fixe: “La société ne le voudra pas, et il n’y aura pas non plus de quoi fouetter un chat. Ne tolère-t-on pas aujourd’hui la pollution de l’air? Certaines choses font partie de la vie, vous savez. En outre, il y aura de fortes chances pour que les réseaux mobiles aient sauvé plus de vies que d’en supprimer.”
Vandenbosch plaide cependant pour la poursuite des innovations dans l’optique de réduire autant que possible l’impact total du rayonnement. “Si on développe un jour une technique permettant de scinder les communications intérieures et extérieures, pourquoi ne l’appliquerait-on pas? C’est ce genre de nuance qui se manifeste trop peu dans le débat actuel. Les opérateurs parlent de capacité et d’atteindre le plus large public possible. Mais on envisage trop peu la technologie ayant comme but de réduire l’impact du rayonnement.”
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