Des scientifiques belges sollicitent l’intelligence artificielle pour déterminer le goût et la qualité de la bière, a fait savoir mardi l’Institut flamand de biotechnologie (VIB). L’étude est publiée dans le périodique scientifique Nature Communications.
Comparer les goûts des nombreux styles de bière différents a toujours constitué un sacré défi. Actuellement, le consommateur peut essayer d’y voir plus clair en recourant aux nombreux ouvrages et guides consacrés au sujet. Mais le jugement ultime reste celui posé par chaque individu, laissant donc une grande part de subjectivité dans la démarche.
Une équipe de chercheurs du VIB-Centre de Microbiologie de la KU Leuven et de l’Institut de recherche sur la bière, basé à Louvain, a souhaité rendre ces jugements sur telle ou telle bière plus objectifs. L’équipe a commencé a analysé des bières sur le plan chimique et est ainsi parvenue à répertorier les concentrations de centaines de composants aromatiques. Chaque bière était en outre jugée, sur la base de 50 critères, par un panel d’une quinzaine de personnes formées.
250 analyses
“C’était un travail de fourmi”, commente le scientifique Miguel Roncoroni. “Au début du projet, nous tablions sur une petite centaine de bières, mais nous nous sommes rapidement rendu compte que cela ne suffirait pas à couvrir toute la diversité du paysage brassicole belge. Nous avons terminé avec 250 analyses.”
Cinq années ont été nécessaires pour rassembler les concentrations chimiques et les rapports détaillés du panel pour toutes ces bières. Une fois les données exploitables, les chercheurs ont eu recours à l’intelligence artificielle pour lier les caractéristiques chimiques aux scores attribués pour le goût. Un modèle est finalement parvenu à prédire la cote attribuée à une bière, avant même que le breuvage ne soit soumis à la dégustation des jurés. Le modèle en question était ainsi en mesure de repérer les principaux arômes de cette bière.
L’étape suivante consistait à utiliser les résultats obtenus pour améliorer le goût d’une bière belge présente dans le commerce. Les arômes que l’intelligence artificielle avait retenus comme devant parfaire la qualité de la bière ont été ajoutés au breuvage existant. La bière ainsi modifiée a reçu une note bien meilleure au cours d’une dégustation à l’aveugle.
L’étude pourrait être étendue à d’autres produits alimentaires. Ce qui constituerait une petite révolution dans la façon de concevoir de nouveaux aliments, estime Kevin Verstrepen, professeur à la KU Leuven. “Notre objectif le plus important maintenant est de faire de meilleures bières sans alcool. A l’aide de notre modèle, nous sommes parvenus à créer un cocktail de composants aromatiques naturels qui reproduisent la saveur et l’arôme de l’alcool, sans risque de gueule de bois.”
