Les entreprises belges investissent dans l’intelligence artificielle, mais sa mise en œuvre est chancelante. L’écart grandissant entre les managers et les employés semble en être la cause.
Il existe sur le plan de la stratégie d’IA dans les entreprises un fossé profond entre la perception de la direction et la réalité du terrain. Alors que les dirigeants croient qu’ils sont à l’avant-garde de l’IA, leurs employés souffrent principalement d’un manque cruel d’orientation, de formation et d’une stratégie claire. C’est ce qui ressort d’une enquête de SAP Belgium, effectuée par l’agence de recherche iO, auprès de 500 entreprises belges.
Près de la moitié des managers (45 pour cent) considèrent leur organisation comme pionnière dans le domaine de la politique et de la mise en œuvre de l’IA. Cependant, cet optimisme n’est guère partagé par leurs collaborateurs, dont 18 pour cent seulement adhèrent à cette vision. En fait, près de quatre employés sur dix (39 pour cent) estiment que leur organisation est à la traîne et qu’elle doit rattraper son retard de toute urgence.
Tout le monde tire-t-il à la même corde?
Alors que 41 pour cent des managers estiment qu’il y a suffisamment de formations et de soutien disponibles en IA, seuls 16 pour cent des employés sont de cet avis. L’absence d’une stratégie de soutien est peut-être la plus révélatrice à cet égard: 31 pour cent des employés affirment que leur organisation ne dispose pas du tout d’une stratégie claire en matière d’IA, une constatation partagée par 8 pour cent des managers seulement.
‘L’IA n’est plus une promesse pour l’avenir, c’est un outil indispensable dans de nombreuses organisations aujourd’hui déjà’, déclare Stijn De Beuckelaer, Managing Director chez SAP BeLux. ‘Mais comme l’IA s’impose si rapidement, nous devons également nous assurer que tout le monde tire à la même corde. L’écart entre la vision et l’expérience ne doit pas devenir trop grand.’
Le risque de ‘shadow IT’ s’accroît
L’enquête de SAP met également en évidence les conséquences directes de cet écart, telles que l’augmentation des risques dus à la ‘shadow IT’. Lorsqu’une politique centralisée échoue, les employés se mettent eux-mêmes au travail avec des outils accessibles au public. Quatre dirigeants sur dix craignent que cela n’amène les employés à saisir des informations sensibles de leur entreprise dans des applications d’IA non autorisées, ce qui engendrerait des risques de fuites de données et des problèmes de mise en conformité. ‘Si les employés ne connaissent pas ou ne ressentent pas la stratégie, c’est qu’elle n’existe pas dans la pratique’, poursuit De Beuckelaer. ‘Nous ne devons pas seulement mettre en œuvre l’IA, mais aussi l’expliquer, l’accompagner et surtout: apprendre à l’utiliser ensemble.’
De la shadow IT à la shadow AI
Qualité des données
Outre le manque d’ancrage stratégique, la qualité des données reste un frein fondamental à la réussite du déploiement de l’IA. Tant les managers (41 pour cent) que les employés (38 pour cent) reconnaissent que les données de leur entreprise sont d’une qualité insuffisante pour des applications d’IA fiables. Les informations sont trop souvent fragmentées et stockées dans différents silos, ce qui complique le développement de perspectives précises, basées sur les données. Les résultats de l’enquête sont conformes au récent rapport de Kyndryl, qui avait également évoqué une tension entre la perception et la réalité, ce qui fait que la volonté est bien là, mais la mise en œuvre vacille.
Des projets d’IA belges se heurtent à des carences technologiques et à un manque de compétences