Toujours plus de consommateurs font le choix d’un smartphone reconditionné. Il s’agit là d’un appareil nettement plus abordable qu’un modèle flambant neuf, mais qui est pourtant fourni avec deux ans de garantie. La firme finlandaise Swappie est depuis quasiment dix années déjà spécialisée dans la remise en état d’iPhones et – depuis cette semaine – également d’iPads déjà utilisés. Data News a pu assister au premier rang à la façon dont ce processus se déroule.
Le siège central de Swappie se trouve à Helsinki, mais pour rejoindre sa principale usine de reconditionnement, il faut prendre le bateau pour traverser le Golfe de Finlande et se rendre dans la capitale estonienne, Tallinn. Une deuxième filiale appelée Operations est établie à Leipzig en Allemagne, où les appareils remis à neuf sont acheminés, avant de prendre la direction des clients.
L’usine OPS de Tallinn occupe 395 personnes, ce qui représente 59 pour cent des effectifs totaux. Ici, entre deux et quatre mille iPhones sont traités chaque jour en deux pauses. ‘Les pics de travail sont évidemment enregistrés à l’abord des jours de fête, tels que la Noël et le Nouvel An, mais aussi le Black Friday’, explique Pavel Tšukrejev, responsable de la production et directeur de l’usine. ‘Le modèle que nous rencontrons le plus souvent actuellement, c’est l’iPhone 12, mais dans pas très longtemps, il s’agira de l’iPhone 13.’

Chaque iPhone qui aboutit dans l’usine Swappie, fait bien vite connaissance avec l’une des prouesses technologiques du reconditionneur: un bras robotisé entièrement automatique qui prélève les téléphones de la bande transporteuse pour les introduire instantanément dans l’un des espaces libres d’une machine. Celle-ci peut accueillir quelque cinq cents iPhones, qui peuvent être ‘activés’ simultanément via autant de connecteurs Lightning, comme cette phase du processus de reconditionnement s’appelle. Une seule armoire dans l’ensemble est encore vide – elle sera utilisée plus tard cette année pour l’iPhone 15 et les modèles ultérieurs équipés d’un connecteur USB-C. Entre-temps, ces modèles seront activés manuellement dans un autre département de l’entreprise.
Effacement sécurisé
Le processus d’activation comprend initialement l’effacement sécurisé de l’appareil, suivi par une mise à jour vers la version iOS la plus récente possible. On contrôle en outre si le téléphone ne se trouve pas sur la liste noire d’un opérateur, ce qui pourrait indiquer qu’il s’agit d’un exemplaire volé, et/ou si l’utilisateur – à la suite d’une perte ou d’un vol – n’a peut-être pas paramétré le verrouillage d’activation (via la fonction Rechercher mon iPhone). Ces appareils sont alors mis invariablement de côté par le bras robotisé et disparaissent du trajet de reconditionnement. Durant le processus d’activation, les iPhones sont aussi directement rechargés, parce que leur accu doit être chargé à 30 pour cent minimum pour les prochaines phases du processus de reconditionnement.
Une fois activés, les téléphones transitent – de nouveau automatiquement – par plusieurs cabines de test. Ce trajet débute par une phase de nettoyage, par laquelle la plus importante couche de saleté est enlevée par ‘sablage au CO2’ (ou dry ice cleaning). On trouve ensuite une série de cabines spéciales où ont lieu plus de cinquante tests de fonctionnalité différents. Sur base d’un code QR unique, qui apparaît à l’écran, la machine sait exactement de quel iPhone il s’agit. Dans un premier temps, les éléments les plus généraux sont contrôlés (fonctionnement des boutons, sensibilité tactile de l’écran,…). Par la suite, c’est au tour des appareils photo et des composants audio, comme le micro et les haut-parleurs. Dès que le premier test est terminé, l’iPhone passe automatiquement dans la cabine de diagnostic suivante.
‘Dans cette phase, nous contrôlons également la qualité de l’accu’, explique Pavel Tšukrejev. ‘Si l’état de l’accu est inférieur à 86 pour cent, il est purement et simplement remplacé. Mais nous contrôlons en outre aussi le nombre de cycles de recharge. S’il sont trop nombreux, l’appareil reçoit également un nouvel accu, même si son état affiche encore 86 pour cent ou plus.’
Swappie en quelques chiffres
Sur les marchés où Swappie est active, l’entreprise enregistre une imposante croissance. En Belgique, le reconditionneur a réalisé en 2024 un chiffre d’affaires de 19 millions d’euros, en hausse de 66 pour cent en comparaison avec l’année précédente. Durant la même période, le nombre de commandes dans notre pays a même progressé de 78 pour cent. Les smartphones remis à neuf par Swappie émanent surtout de fournisseurs tels que des B2B-suppliers, des stocks d’invendus, des modèles de présentation,…), mais via le site web, les consommateurs peuvent également vendre leur ancien téléphone à l’entreprise. Le modèle C2B a lui aussi le vent en poupe, puisque l’année dernière en Belgique, 54 pour cent d’appareils en plus qu’en 2023 ont été acheminés chez Swappie.
Travail manuel
Au terme de la phase de tests, le travail est terminé pour la machine. Place à un certain nombre de collaborateurs qui expérimentent les choses que la technologie ne peut mener à bout: la reconnaissance faciale FaceID et le capteur d’empreintes digitales de l’appareil plus précisément. ‘Pour cela, des humains sont encore et toujours nécessaires’, apprend-on.
Des dommages apparents, comme des griffures sur l’écran ou un coup dans la coque, sont aujourd’hui encore contrôlés par un collaborateur humain chez Swappie. Mais comme durant le processus de reconditionnement, ce sont quasiment toutes des photos à haute résolution des iPhones qui sont réalisées, l’entreprise prépare une technologie capable d’enregistrer ce genre de dégâts de manière automatisée. Un projet-pilote est au programme en automne, alors que début 2026 déjà, Swappie entend mettre la nouveauté en production.
Une fois tous les tests terminés, les appareils se voient apposer un sticker portant les principaux résultats: état de l’accu, nombre de cycles de recharge et les éventuels problèmes détectés. En fonction du verdict, l’appareil passe ensuite au département repair ou, lorsqu’aucune réparation n’est nécessaire, à des collaborateurs qui se chargent de l’évaluation. Ils sont spécialisés dans l’estimation de la valeur de l’iPhone, en fonction de son état physique et, évidemment, du modèle.
Toutes les données des téléphones traités – et par là, nous voulons dire les résultats des tests, pas les données du précédent propriétaire – sont du reste conservées. Si un appareil devait revenir quelques années plus tard dans l’usine de Swappie pour une proverbiale troisième vie, il serait ainsi possible de connaître rapidement son historique, afin qu’une éventuelle réparation puisse se faire assez rapidement.
Ce que notre processus de reconditionnement peut encore rationaliser davantage? Qu’Apple cesse de sortir un nouveau modèle chaque année.
Le deuxième étage du bâtiment OPS sert en grande partie d’entrepôt. De longues rangées d’armoires offrent de l’espace à des milliers d’iPhones contrôlés, séparés les uns des autres par des étiquettes portant des codes uniques, et attendant d’être réparés. Le reste de l’étage est occupé par de petits espaces intégrant d’innombrables pièces de rechange – des cadrans, en passant par des accus, jusqu’aux mini-haut-parleurs, rangés dans des bacs et sur des étagères.
Une chose qu’on n’attendrait pas forcément: les petits écrans sont généralement aussi des affichages reconditionnés, en provenance d’appareils fichus qui aboutissent finalement de nouveau chez Swappie via des centres de réparation, après avoir transité ou pas par un partenaire chinois. Dans la pratique, les écrans des smartphones semblent en effet encore réparables. ‘Ils sont constitués de nombreuses couches: en cas de griffures ou de verre cassé, il ne faut souvent que remplacer la couche supérieure et pas le panneau sous-jacent’, explique Tšukrejev. ‘Nous le faisons partiellement en interne, mais comme nous ne pouvons pas nous-mêmes suivre le rythme élevé, nous externalisons une partie de ce travail spécialisé.’

Métaux et minéraux rares
Certains iPhones sont en trop mauvais état pour pouvoir être encore pris en compte pour une ‘réanimation’. Ils sont dans ce cas manuellement démontés, après quoi leurs composants réutilisables aboutissent à un moment donné dans d’autres appareils. Ce qui reste, ce sont des e-déchets, constitués majoritairement d’accus qui ne sont plus récupérables. Il n’est donc pas vrai que Swappie récupère elle-même toutes sortes de matières premières, dont des métaux rares comme de l’or et du palladium, et des minéraux tels que du cobalt et du coltan. Ce processus est lui aussi confié à un partenaire spécialisé externe qui, comme c’est souligné, ‘doit scrupuleusement respecter toutes les prescriptions et les mesures environnementales’.
C’est réellement impressionnant à voir, tous ces iPhones et composants, mais le le travail proprement dit se déroule au troisième étage, où opèrent la plupart des collaborateurs (dont 120 repair specialists). C’est ici que les problèmes constatés sur les appareils sont réparés avec beaucoup de doigté et évalués quant à leur valeur – le processus de grading. Un collaborateur examine attentivement chaque iPhone à la loupe et lui attribue le label Excellent, Très bon ou Moyen. Ce statut et le modèle d’iPhone déterminent finalement le prix que le consommateur paiera pour l’appareil via le site web de Swappie. L’estimateur (grader) passera alors encore un dernier coup de chiffon sur l’iPhone et le rangera avec un nouveau câble de rechargement dans une boîte. L’appareil reconditionné est ainsi prêt à rejoindre son nouveau propriétaire.
‘L’estimation peut sembler facile, mais tel n’est pas le cas’, nous assure Pavel Tšukrejev. ‘L’apprentissage prend six mois environ.’ Les personnes qui testent les appareils, reçoivent une formation de quatre à six semaines, alors que pour réparer des iPhones, il convient de suivre une instruction durant six semaines.’
‘L’iPhone X était terrible’
Les smartphones deviennent de plus en plus sophistiqués, et leurs composants toujours plus petits. Le processus de reconditionnement n’en devient-il dès lors pas sans cesse plus complexe? ‘Oui et non’, répond Tšukrejev. ‘Un iPhone 7 est indéniablement beaucoup plus facile à réparer qu’un iPhone 14. Mais si vous comparez l’iPhone X ou Xs avec un nouveau modèle, les appareils plus récents sont un peu plus faciles à remettre à neuf. Ils s’ouvrent plus aisément, et il s’avère plus simple de remplacer les pièces. A cet égard, l’iPhone X, le premier téléphone d’Apple avec un écran qui occupe toute la partie avant, était carrément terrible. Pour chaque partie à atteindre, des vis devaient être retirées. Heureusement, Apple a beaucoup amélioré cela entre-temps.’
Pourtant, chaque nouvelle génération d’iPhones présente de nouveaux défis aux employés de Swappie. ‘Prenez les 12, 13 et 14: extérieurement, ils se ressemblent beaucoup, mais à l’intérieur, ce sont des téléphones complètement différents. Si Apple arrêtait de faire cela, cela nous rendrait très heureux’, déclare Tšukrejev en blaguant.
Un nouveau CEO chez le reconditionneur Swappie
iPads reconditionnés
Lors de notre visite à l’usine de Tallinn, nous apprenons que Swappie vendra également des iPads reconditionnés à partir du 12 juin – en Belgique, aux Pays-Bas et en Allemagne. Les mêmes normes de qualité strictes seront appliquées qu’avec les iPhones. Swappie démarrera avec cinq modèles remis à neuf: l’iPad 8, l’iPad 9, l’iPad 10, l’iPad Air 4 et l’iPad Air 5. Le prix moyen des tablettes se situera entre 250 et 570 euros, selon le modèle et la capacité de stockage.

La société n’a pas l’intention de reconditionner des appareils d’autres marques. ‘Il n’y a pas d’obstacles techniques en soi, nous pouvons ‘recycler’ notre personnel assez rapidement pour réparer n’importe quel autre appareil. Mais pour l’instant, nous nous concentrons sur les appareils Apple, parce que nous voulons exceller dans ce domaine’, explique Tšukrejev.
Swappie a du reste peu de contacts avec le fabricant américain des iPhones. ‘En tant que reconditionneur, nous faisons partie du même écosystème, mais nous ne nous considérons pas vraiment comme un concurrent d’Apple’, explique le manager. ‘Au contraire même, car du fait de notre activité, il y a beaucoup d’utilisateurs d’Android qui passent à un iPhone reconditionné. Ils utilisent ensuite souvent aussi les services d’Apple (tels que iCloud, Music, Apple TV+, ndlr) ou achètent des applis, dont Apple empoche une partie.’