‘Il faudra atteindre la fin de la crise pour assister à une véritable percée de la transformation numérique’
Clairement, le coronavirus a constitué le fil rouge de l’étude de marché de Beltug auprès des responsables IT belges. A noter que ceux-ci évoquent une accélération numérique, ce qui n’est pas forcément synonyme de transformation numérique.
Sans grande surprise, près de neuf entreprises sur dix estiment que la Covid-19 a eu un impact évident sur la numérisation. Pourtant, 1% seulement des répondants affirme que la crise du coronavirus a véritablement modifié les processus organisationnels. En fait, il serait plutôt question d’accélération numérique que de transformation numérique.’ Le coronavirus a contraint les entreprises à s’intéresser de près au télétravail, considère An Swalens, CIO de la Banque Nationale de Belgique. Du coup, la numérisation porte plutôt sur le volet opérationnel. En soi, il ne s’agit pas d’une avance importante de la transformation numérique. Cela dit, il faut bien admettre que la crise du coronavirus n’est sans doute pas le meilleur moment pour procéder à des changements importants et fondamentaux.’
Priorité à la continuité
Du fait de la crise, la stratégie a été adaptée.’ La continuité d’activité a été le souci majeur des entreprises, analyse Robin Joncheere, VP Go-To-Market chez NTT. L’intérêt pour la transformation numérique était certainement marqué avant la crise, le but étant de rendre les processus plus rapides, meilleurs et moins chers. Et les entreprises reprennent désormais cette priorité.’ Pas étonnant en effet que l’attention ait été attirée par d’autres objectifs.’Nous avons dû arrêter totalement nos activités’, précise Bjorn Van Reet, CIO de Kinepolis. Pas évident lorsque tant le modèle d’entreprise que l’architecture sont axés sur la croissance. Dans le même temps, nous avons constaté – sous l’influence du coronavirus – de nombreux changements sur le marché. Ainsi, le comportement d’achat du client s’est fortement numérisé. Lorsque les cinémas ont rouvert leurs portes après le premier confinement, les clients ont passé leurs commandes et leurs achats jusqu’à 95% en numérique.’
Alors que certains secteurs ont fermé à la suite de la pandémie, d’autres ont vu leurs activités exploser.’ Le nombre de colis a fortement augmenté’, précise Wim Nagels, CIO de DPD, ce qui a clairement impacté l’IT.’ Notre trafic de données a progressé de 40%. D’ailleurs, la transformation numérique est un concept vaste. Pour l’employé du centre de services qui passe au télétravail et qui n’appelle plus avec son téléphone, mais son ordinateur portable, il est clairement question d’une transformation en profondeur. Il s’agit là d’un exemple avec lequel chacun est désormais relativement familiarisé que celui du télétravailleur qui utilise des outils en ligne pour contacter ses collègues et clients. En effet, la crise du coronavirus a fortement boosté l’utilisation d’outils en ligne. Avec 89% des répondants, la domination de Microsoft – avec Teams et Skype – saute aux yeux. Zoom suit à distance respectable avec 24%.
Basculement rapide
Le fait que les entreprises aient opté pour Microsoft n’est pas vraiment une surprise.’ Nombre de partenaires avec lesquels vous communiquez ont eux-mêmes Teams, relève An Swalens. Il est évidemment pratique de pouvoir travailler sur la même plateforme.’ De son côté, Kinepolis utilise tant Teams que Zoom.’ Nous avons laissé le choix aux collaborateurs, précise Bjorn Van Reet. La convivialité et le taux d’adoption de Zoom ont fait pencher la balance. Mais pour partager des documents, le choix se porte néanmoins sur Teams, essentiellement parce que nos collaborateurs étaient déjà habitués à utiliser Office.’ Le basculement vers Teams s’est souvent aussi révélé plus rapide.’ La migration de Skype vers Teams figurait déjà à l’agenda avant la crise, note Wim Nagels. Nous avions prévu un trajet d’un an, mais nous l’avons finalement achevé en 3 semaines.’
‘ Chez nous également, Microsoft était déjà largement répandu, même si nombre d’entre nous utilisent aussi des appareils Apple, indique Patrick Putman, CIO de Manuchar. En même temps, il ne faudrait pas oublier que la collaboration en Afrique passe pratiquement d’office par WhatsApp.’ Plus près de chez nous également, l’utilisation de WhatsApp se révèle étonnamment élevée puisque pas moins de 34% des grandes entreprises disent utiliser cet outil.’ Voilà qui incite à la réflexion, fait remarquer Danielle Jacobs, CEO de Beltug, sachant que près de la moitié des entreprises n’ont aucune politique formelle quant à l’utilisation de tels outils. Indépendamment de cet aspect, l’emprise croissante de Microsoft suscite à tout le moins l’inquiétude.’ Voici 4 ans, les répondants à l’enquête citaient en effet toute une liste d’outils collaboratifs.’ Entre-temps, il n’en reste plus beaucoup, note encore Danielle Jacobs. Microsoft est une tache d’huile qui ne cesse de s’étendre : avec des produits maison comme SharePoint et Azure, mais aussi via le rachat de LinkedIn et désormais de Teams.’
Vers une approche plus proactive
Si l’on intéresse de plus près encore à l’importance de la transformation numérique, l’enquête révèle que 56% à peine des grandes entreprises considèrent cette transformation comme une stratégie formelle. Certes, le contexte du coronavirus peut en partie expliquer ce phénomène.’ Dans un premier temps, il a fallu réussir à survivre sur le plan numérique, concède Patrick Putman. A présent que c’est chose faite, une stratégie de transformation numérique se met en place. Nous avons encore pas mal de processus papier au sein de l’organisation, mais nous lançons plusieurs projets pour les réduire. C’est d’ailleurs une nécessité. Les traders qui n’ont pas pleinement embrayé sur cette évolution ont d’ores et déjà disparu.’
L’attitude réactive de nombreuses entreprises n’était pas inhabituelle.’ Du fait du coronavirus, les entreprises ont mis leurs investissements structurels au frigo, croit savoir Werner De Laet, Chief Enterprise Officer d’Orange Belgium. Désormais, une approche plus proactive voit le jour, même s’il faudra atteindre la fin de la crise pour assister à une véritable percée de la transformation numérique.’
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