Frederik Tibau
Facebook Home est-il un cheval de Troie?
Même si les premières réactions à Facebook Home ne sont guère virulentes – le fait que vous deviez faire un détour pour accéder aux applis de votre smartphone, n’est pourtant pas apprécié par tout le monde -, le nouveau logiciel de Facebook pourrait néanmoins constituer à terme une menace pour Google et pour les opérateurs télécoms traditionnels.
Même si les premières réactions à Facebook Home ne sont guère virulentes – le fait que vous deviez faire un détour pour accéder aux applis de votre smartphone, n’est pourtant pas apprécié par tout le monde -, le nouveau logiciel de Facebook pourrait néanmoins constituer à terme une menace pour Google et pour les opérateurs télécoms traditionnels. Cela a dû être une fameuse épine dans le pied de Mark Zuckerberg de constater que Facebook était en train de manquer la révolution mobile. L’internaute, qui s’est tourné massivement ces dernières années vers le smartphone et la tablette, devait se contenter d’applis Facebook imparfaites et lentes pour iOS et pour Android, alors que de new kids on the block, comme l’application photos complètement mobile Instagram, entamaient une formidable marche en avant.
En 2013, les applis HTML5 à problème de Facebook pour Android et pour iOS font cependant place à des alternatives résidentes plus rapides, alors qu’Instagram fait désormais partie de l’empire Facebook, ce qui accroît encore nettement la lutte pour attirer l’attention sur les appareils mobiles.
Avec Facebook Home, le plus grand réseau social au monde jette en effet dans la bataille une arme qui a le potentiel de faire de chaque Android-phone un téléphone Facebook. En d’autres mots, Zuckerberg a tiré les leçons de ses erreurs et semble à présent vouloir effectuer une manoeuvre de rattrapage.
Pour rappel, Facebook Home est une appli qui tisse une couche logicielle au dessus d’Android et qui transforme l’écran d’accueil des smartphones en un ‘coverfeed’ affichant des mises à jour de statut toujours changeantes des contacts Facebook. Au lieu de devoir d’abord transiter par un écran d’accueil, l’utilisateur aboutit dès lors directement dans son réseau social favori. Une mise à jour ‘like’ ou une réponse s’effectue simplement au départ de l’écran d’accueil.
Il y a encore une page disponible via laquelle vous pouvez naviguer vers vos autres applis Android, mais vous devez effectuer un petit détour pour y arriver. Et même si vous êtes en train de jouer à Angry Birds ou que vous recherchez un film via l’appli Kinepolis, vos amis Facebook peuvent continuer de chatter avec vous via la fonction ‘chat head’.
“Nous voulons accorder la priorité aux gens et pas aux applis”, a déclaré Zuckerberg lors d’une conférence de presse. Ce qu’il avait oublié de dire, c’était que son nouveau logiciel rend invisible l’environnement Android de son grand rival Google.
A présent, Android est bien un système d’exploitation ouvert qui est utilisé par de plus en plus d’entreprises afin de glaner du trafic de chez Google (pensez à ce qu’Amazon fait avec ses tablettes), mais si votre principal concurrent le fait, cela fait quand même réfléchir.
Car si Facebook reprend l’écran d’accueil des smartphones et tablettes Android, des applis Google aussi importantes que YouTube, Google Search et Google Maps seront renvoyées de facto à l’arrière-plan. Alors que la priorité d’Android est précisément de diriger les utilisateurs mobiles vers les services Google.
Ceci est très signifiant dans la mesure où tant Google que Facebook vivent de la publicité. Pour les deux entreprises, la publicité online est même la principale source de revenus. Il est donc logique que toutes deux veuillent être la principale fenêtre sur internet pour leurs utilisateurs.
Voilà qui explique également leur antipathie mutuelle. Surtout à présent que toujours plus de personnes considèrent Facebook comme un synonyme d’internet, et que les surfeurs mobiles consacrent déjà 25 pour cent de leur temps passé sur le net à Facebook et à Instagram.
Avec Facebook Home, Zuckerberg exploite (abuse?) donc habilement la stratégie -fructueuse – de Google pour proposer Android en tant que plate-forme ouverte et gratuite, susceptible d’être adaptée par tout un chacun. A l’instar d’un cheval de Troie, la nouvelle application pénètre dans le camp de l’ennemi pour l’affaiblir de l’intérieur.
Opérateurs
Du reste, il n’y a pas que Google qui a du souci à se faire. Les opérateurs télécoms doivent aussi se tenir sur leurs gardes. Facebook effectue en effet pour l’instant déjà des tests de son appli de chat mobile Facebook Messenger pour permettre à ses membres de s’appeler gratuitement (VoiP).
Dans les pays, où une majorité de la population dispose d’un compte Facebook et d’un abonnement internet mobile, ce service pourrait bien devenir une alternative au trafic téléphonique traditionnel.
Si les acolytes de Zuckerberg mettent ce genre de service bientôt à disposition à partir de l’écran d’accueil des smartphones (via Facebook Home par exemple), ce ne sont pas uniquement Android et Google qui seraient contournés, mais aussi les opérateurs spécialisés surtout dans la téléphonie et les SMS.
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