SAP mise à fond sur la souveraineté numérique par le biais d’un investissement substantiel et une extension de son portefeuille cloud.
Le principal éditeur européen de logiciels annonce qu’il va investir plus de vingt milliards d’euros en ressources propres dans des solutions cloud souveraines tout au long des dix prochaines années. Ces moyens seront dédiés à la technologie, à l’infrastructure, à la recherche, au développement, ainsi qu’au personnel. Parallèlement, SAP lancera deux nouveaux services, afin d’offrir aux clients dans des secteurs régulés, ainsi qu’aux autorités davantage de contrôle sur leurs données et opérations, sans devoir pour autant régresser sur le plan de leur puissance innovante.
Pas uniquement des motifs géopolitiques
L’annonce du géant allemand des logiciels s’inscrit dans un contexte géopolitique en changement rapide, mais Thomas Saueressig, membre du conseil d’administration de l’entreprise, a expliqué lors d’un briefing avec la presse que ce n’est pas là la raison principale de cette décision stratégique. Saueressig distingue depuis quelques années déjà une demande toujours plus forte de souveraineté numérique et de sécurisation des données: une demande qui va également de pair avec un doublement du nombre de cyberattaques depuis la pandémie du Covid-19. ‘Nous observons que les exigences de nos clients évoluent sur la base de thèmes géopolitiques, mais aussi sur celle de modifications dans le réglementation’, a déclaré Saueressig. ‘Dans ce contexte, la souveraineté et la cybersécurité représentent des conditions cruciales pour la liberté, le bien-être, la puissance concurrentielle numérique, voire pour la démocratie’, a-t-il encore ajouté.

Deux nouveaux modèles
Pour répondre à cette demande croissante, SAP va étendre sa gamme ‘Sovereign Cloud’ au moyen de deux nouveaux modèles d’implémentation. Le premier s’appelle ‘SAP Cloud Infrastructure’: une solution qui tournera dans le centres de données de SAP en Europe et qui s’articulera sur une technologie open-source. Cette option sera destinée aux clients qui recherchent une alternative aux clouds publics des hyperscalers bien connus. Toutes les données resteront stockées au sein de l’UE et satisferont pleinement à la législation européenne sur le confidentialité.
Le second modèle a été baptisé ‘SAP Sovereign Cloud On-Site’, qui prévoit que l’ensemble de l’infrastructure cloud de SAP sera installée dans le centre de données du client lui-même. Le point crucial ici sera que l’infrastructure et les logiciels seront gérés et entretenus entièrement par SAP. ‘Cela garantira une innovation continue et la mise en œuvre de correctifs de sécurité, mais au sein même des installations du client’, selon Saueressig.
Réaction européenne
Grâce à l’extension de sa gamme et à son investissement substantiel, SAP veut stimuler le débat sur la souveraineté et accélérer la transformation numérique en Europe. ‘L’innovation et la souveraineté ne doivent pas s’exclure mutuellement’, a affirmé Saueressig, qui s’est empressé d’ajouter qu’il ne faut pas considérer la décision de SAP comme un mouvement dirigé contre les grands hyperscalers américains. ‘Pour nous, la souveraineté, cela ne se résume pas uniquement à des alternatives aux acteurs américains. Il est ultra-important dans pareil débat que nos clients se voient offrir des options’, a encore ajouté Saueressig. ‘On peut donc parfaitement choisir une option hyperscaler avec SAP, mais du reste aussi se tourner vers notre SAP Cloud Infrastructure, ou un autre partenaire.’ Et de se référer ici également à Delos Cloud en Allemagne, une filiale de SAP qui propose au secteur public allemand un cloud souverain basé sur la technologie Azure de Microsoft.

Définition de la souveraineté
Tout dépend évidemment de la définition qu’on donne à la souveraineté. Or celle-ci diffère selon l’acteur ou le fournisseur à qui on parle. Pour SAP, l’offre s’articule autour de quatre éléments. ‘Primo, la souveraineté des données, qui garantit que ces dernières restent sécurisées au sein d’environnements locaux. Secundo, la souveraineté opérationnelle, ce qui signifie que les services sont gérés par des experts locaux. Tertio, la souveraineté technique, qui offre une architecture sécurisée. Et enfin, la souveraineté juridique, qui garantit le respect de la réglementation locale’, comme l’a résumé Martin Merz, Président de SAP Sovereign Cloud, lors du briefing avec la presse européenne.