CRIDS: pas d’ICT sans dimension Sciences humaines
Le centre de recherche et d’expertise namurois CRIDS (Centre de Recherche Information, Droit et Société) a officiellement été porté sur les fonts baptismaux ce mardi 15 mars. Mission: privilégier une analyse multidisciplinaire de la réalité ICT. Les pouvoirs publics régionaux saluent l’initiative.
Le centre de recherche et d’expertise namurois CRIDS (Centre de Recherche Information, Droit et Société) a officiellement été porté sur les fonts baptismaux ce mardi 15 mars. Mission: privilégier une analyse multidisciplinaire de la réalité ICT. Les pouvoirs publics régionaux saluent l’initiative.
Fort de 40 chercheurs et d’une dizaine d’académiques, le centre de recherche CRIDS des Facultés universitaires de Namur est la résultante de la fusion entre le Centre de Recherche Informatique & Droit (CRID), de la CITA (Cellule Interdisciplinaire de Technology Assessment) et du GRICI (Groupe de Recherche Interdisciplinaire en Communication et Internet). Parmi les thèmes de recherche couverts, citons notamment la gouvernance IT, le Web 2.0, les réseaux sociaux, la cybersurveillance, la numérisation du patrimoine, l’e-health et l’e-gouvernement, le cloud computing… Outre ses travaux de recherche et d’analyse, destinés à la société civile, aux pouvoirs publics mais aussi à divers acteurs de niveau européen, le CRIDS continuera par ailleurs d’organiser des formations pour des étudiants, juristes, cadres d’entreprise etc.
Dimension Sciences humaines Le CRIDS se propose d’aborder les problématiques ICT en étudiant les enjeux, impacts et incidences sous divers angles: technologiques, sociétaux, juridiques, philosophiques, culturels…
Jean-Claude Marcourt, ministre wallon de l’Economie et des Technologies nouvelles, soulignait la nécessité d’une telle approche multidisciplinaire, mêlant ICT et sciences humaines, afin d'”éviter tout cloisonnement, de (ré)insérer une délibération démocratique dans la chose technologique, de donner naissance à des chaînons manquants encore en ICT”. Et de prendre quelques exemples de problématiques qui, dans le cadre des politiques publiques régionales, ont besoin de cette vision pluridisciplinaire:
– “l’e-gouvernement ne se limite pas à la seule simplification administrative mais soulève également des questions en termes de nouveau contrat social, de telle sorte que l’on évite de marginaliser ceux qui n’ont pas apprivoisé les nouvelles technologies”;
– “l’e-santé publique, qui doit réaliser l’équilibre entre l’échange d’informations dans l’intérêt du patient et une garantie de sécurité pour le respect de sa vie privée”;
– “les nouvelles formes de l’offre éducative (e-formation, smart games…), un domaine dans lequel il est important d’anticiper cette offre mais aussi de voir quel en sera l’impact sur l’offre éducative traditionnelle. C’est un peu l’amphi vs la tablette.” On a affaire, soulignait-il, à deux réalités différentes en termes de flexibilité, de pré-requis imposé, de démarche, de modèle de diffusion, d’évaluation des résultats… “Les savoirs seront toujours davantage une valeur économique. Il s’agit dès lors de s’engager par rapport à cette vérité mais sans oublier la dimension de la concurrence privée qu’implique l’éducation nouvelle et qui devient de plus en plus importante.”
Emily Hoyos, présidente du Parlement wallon, soulignait pour sa part que les décisions et projets ICT tombant sous la responsabilité des pouvoirs publics devront intégrer une dimension d’évaluation technologique et que cet exercice devra être fait par “un organisme indépendant du pouvoir exécutif, sous la supervision finale du législatif.” Un point de vue d’ailleurs déjà avalisé par le gouvernement wallon.
ICT et valeurs humaines Yves Poullet, recteur des Facultés universitaires de Namur, soulignait combien il est nécessaire d'”introduire la réflexion critique et autonome des sciences humaines au coeur de la construction de l’ICT et de la société de l’information. Le CRIDS apporte une modeste contribution à cet effort, au service de l’homme et de l’humanité.” Il est, selon lui, essentiel de mettre la Toile au service de l’humain alors même qu’elle est davantage synonyme d’opacité, d’ubiquité, de globalité et de puissance. Et d’expliquer comment et pourquoi l’homme, en raison des nouvelles technologies et de la Toile, est devenu “(sur)exposé, augmenté, remplacé, tracé, profilé, multiplié”. “Qu’est-il dès lors advenu, s’interrogeait-il, “de l’homme objet de droit, de ce Petit Prince? Il s’agit de se réapproprier la maîtrise de soi et de l’interface. Il faut penser en termes d’info-éthique, remettre à l’honneur les trois valeurs éthiques fondamentales de l’homme que sont la dignité, l’autonomie ou autodétermination, et la justice sociale, autrement dit la non discrimination et la solidarité. Il faut procéder à l’analyse des impacts sociétaux et culturels, favoriser le value sensitive design”.
Ces valeurs éthiques sont, selon lui, l’un des aspects des exigences qui devraient être imposées à certains “gatekeepers”. “L’accès à l’information et aux services essentiels passe souvent par des oligopoles, tels Google. Il est important d’imposer à ces services, qui sont des portes d’entrée, des exigences que l’on pose aussi aux services publics.”
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