Comment chercher l’amour sur internet ?
Toujours plus de personnes seules surfent sur les sites de rencontres à la recherche de l’âme soeur. Ce sont surtout les quadragénaires séparés ayant une carrière bien remplie qui sont des clients réguliers. Mais quel est le pourcentage de chance de trouver le (nouvel) amour de sa vie sur internet? Voici cinq questions à propos des rencontres numériques.
Notre pays compte actuellement un million et demi de personnes seules environ, un nombre qui continue de croître progressivement. Voilà qui explique pourquoi les sites de rencontres sont devenus si populaires. Il y en a des dizaines de milliers d’actifs de par le monde. D’après une étude étrangère, il existe rien qu’en Europe déjà 5.000 sites de rencontres, dont 1.500 en Grande-Bretagne et environ 200 aux Pays-Bas. Personne ne sait exactement combien notre pays en recense, entre autres parce que certains opèrent depuis l’étranger et ne doivent pas se faire enregistrer ici. Selon le Service Public Fédéral (SPF) Economie, tout le monde peut créer ce genre de site: il n’y a aucune condition particulière à remplir. Peter Menu du site de rencontres flamand Tesamen en a lui-même dressé une liste et arrive à 34 sites flamands du genre.
Le secteur des sites de rencontres est l’un de ceux qui croissent le plus vite sur internet. Son chiffre d’affaires mondial est estimé à quelque trois milliards de dollars par an. Le leader de marché au niveau international est l’entreprise internet américaine Active Corp, qui est non seulement propriétaire de l’appli de rencontre Tinder en progression rapide et populaire également chez nous, mais aussi de cinquante sites de rencontres actifs dans quarante pays. Le point de saturation semble ainsi atteint. Voilà pourquoi toujours plus de sites se tournent vers les clients de niche, tels les végétariens, les fermiers, les seniors, voire les gothiques.
Qui visite les sites de rencontres?
Dans notre pays, des dizaines de milliers de personnes sont à court ou à long terme membres d’un site de rencontres. Le nombre précis n’est pas enregistré, et nombreux sont ceux qui sont membres de plusieurs sites. Rendez Vous est le principal site de rencontres bilingue belge et compte entre 30.000 et 40.000 membres. Un site flamand plus modeste tel Tesamen recense environ 4.000 membres actifs, selon son coordinateur Peter Menu. ‘Il existe des études qui affirment qu’entre 25 et 30 pour cent des personnes seules ont déjà visité un site de rencontres, mais c’est malaisé à contrôler.’
D’une récente étude de marché réalisée par l’entreprise GfK, il ressort que sur les 280 millions d’internautes américains, il y en a 5,6 millions – soit deux pour cent – qui sont actifs sur un site de rencontres. Il s’agit là d’un doublement par rapport à une étude effectuée en 2009.
L’un des mythes véhiculés par les sites de rencontres, c’est qu’ils sont surtout visités par des hommes jeunes. Cela ne semble pourtant pas correspondre à la réalité, nous apprend une étude réalisée par l’université allemande de Bamberg. Celle-ci a interrogé, il y a deux ans, 3.535 utilisateurs de sites de rencontres. L’âge moyen des membres était de 40 ans, et 72% d’entre eux étaient célibataires ou séparés. 48% des membres étaient des femmes contre quasiment 52% d’hommes. Les différences hommes-femmes seraient donc moins grandes qu’attendu. Le fait que des gens se tournent vers internet, parce qu’ils éprouvent des difficultés à trouver un(e) partenaire dans la vie réelle, n’est pas vrai non plus. Quasiment trois quarts des membres de sites se trouvent séduisants et recourent à internet comme une façon supplémentaire et surtout grisante de trouver une nouvelle relation.
Les chercheurs allemands ont dressé une liste de sept raisons pour lesquelles quelqu’un visite un site de rencontres. Tant pour les hommes que pour les femmes, trouver une relation durable constitue la première raison. Le sexe est la deuxième plus importante raison pour les hommes. Viennent ensuite, mais à bonne distance, le chat et de quoi occuper le temps libre. Selon l’enquête, avoir de l’humour est la principale caractéristique pour vouloir rencontrer quelqu’un et ce, tant pour les hommes que pour les femmes. Suivent alors le niveau de formation, l’attractivité physique, l’âge et les revenus. Les chercheurs observent que l’ajout d’une photo augmente sensiblement la chance de décrocher un rendez-vous. Quiconque n’inclut pas de photo à son profil, n’a que 3,5% de chance d’une rencontre rapide. Les femmes l’expriment encore davantage.
L’étude s’est même intéressée au Body Mass Index (BMI) des membres. Il apparaît que les candidats et candidates ayant un BMI moindre ont plus de chances d’un rendez-vous que ceux/celles ayant un BMI plus élevé. L’attractivité physique joue donc bien un rôle, concluent les chercheurs de Bamberg.
Comment cela se passe-t-il?
La plupart des sites sont très conviviaux. Ils offrent un seuil d’accès très bas, comme Rendez-Vous, où l’on répond à quelques questions avant de pouvoir se retrouver en ligne quelques minutes plus tard. Rendez-Vous est aussi l’un des plus économiques: quatre euros pour une semaine et seize euros pour un mois. Les prix des sites de rencontres peuvent varier fortement: de quatre euros par mois à un abonnement de trois cents euros pour un an. Sur un site de rencontres, l’on s’en tire à meilleur compte que dans une agence matrimoniale, mais celle-ci offre une approche plus personnalisée.
Certains sites de rencontres travaillent avec des questionnaires psychologiques pour créer un profil. Sur base de certains algorithmes, le système fait des recommandations pour un éventuel partenaire. Nombre d’experts, tels le professeur néerlandais Roos Vonk de l’université de Tilburg, dénoncent ce genre de tests, du fait qu’ils n’ont absolument aucune valeur scientifique.
Peter Menu, du site de rencontres Tesamen, travaille avec une liste de 150 questions: ‘Il faut une demi-heure environ pour y répondre. Les réponses donnent aux autres membres une meilleure vision du profil pour une éventuelle rencontre.’ Outre les informations courantes telles l’âge, la formation, la profession et les préférences sexuelles, il convient aussi de mentionner les hobbys, la connaissance des langues, les lieux de vacances préférés et les émissions TV favorites. Il faut aussi décrire son style de vie et son caractère. ‘Nous avons intégré des techniques de contrôle au questionnaire, afin de pouvoir relever les contradictions ou les inexactitudes. Ce n’est que quand tout est en ordre que le nouveau membre peut rechercher une rencontre en ligne. Nous sommes plus chers que Rendez-Vous. Pour trois mois, vous payerez un abonnement de 96 euros, mais je pense que chez nous, la chance de trouver une relation durable est plus grande qu’ailleurs, parce que nos exigences qualitatives sont supérieures.’
Tesamen est une a.s.b.l. et, selon Peter Menu, un site de rencontres non-commercial. L’argent qu’il reçoit de ses membres, il le consacre quasi entièrement au marketing. ‘Il faut faire continuellement de la publicité sur internet, sinon vous êtes éjecté du marché.’
Quel est le pourcentage de chance de réussir?
Cela ne fonctionne pas pour un vaste groupe de gens. Dans l’étude de Bamberg, quasiment 63% des personnes interrogées répondent négativement à la question de savoir si elles ont trouvé un partenaire fixe via leur site de rencontres. Les femmes ont manifestement plus de succès (44%) que les hommes (32%). On leur a demandé aussi si leurs attentes avaient été rencontrées sur le site de rencontres. Seul 1,7% a répondu ‘chaque fois’. 12% ont répondu ‘souvent’, 42% ‘parfois’, 32% ‘rarement’ et 11% ‘jamais’.
Selon une étude de l’université de Chicago en 2013, le nombre de couples qui se sont formés via internet a crû de 19 pour cent ces cinq dernières années. Aux Pays-Bas, plus de 13% pour cent ont trouvé leur partenaire via internet, contre même pas 2%, il y a dix ans.
Y-a-t-il des abus?
L’organisation des consommateurs Test-Achats avait examiné l’année dernière les conditions d’une dizaine de sites tels 50plusmatch, Elite Dating, Parship, Rendez-Vous, Meetic et Gleeden. Il en ressortait que le nombre d’abus était acceptable. Test-Achats avait néanmoins pointé du doigt quelques dangers. C’est ainsi que certains sites se présentent comme gratuits, mais que si vous y cherchez réellement une rencontre, vous êtes bien vite invité à payer. Les tarifs ne sont pas non plus toujours mentionnés clairement ou de manière transparente. Si vous signez un contrat en ligne dans notre pays, vous disposez légalement d’un délai de réflexion de quatorze jours. ‘Dans le cas des sites de rencontres, c’est surtout vrai en théorie’, selon Test-Achats.
Certains sites créent des profils fictifs d’hommes et de femmes séduisants, afin d’attirer de nouveaux membres. Un site tel Gleeden prétend qu’il supprime les profils factices, alors que d’autres sites se limitent à mentionner qu’ils ne peuvent donner de garantie de succès. ‘Si vous n’avez pas trouvé de rencontre au bout de six mois sur ces sites, vous ne pouvez pas demander d’être remboursé’, selon Test-Achats. Mais pour l’organisation des consommateurs, le principal danger réside dans le prolongement indésirable des abonnements.
Si vous avez à vous plaindre d’un site, vous pouvez vous adresser à l’Inspection Economique. Ce service public a reçu l’année dernière 62 plaintes relatives à des sites de rencontres. Cela peut sembler peu, mais la réticence à déposer une plainte est assez élevée car nombreux sont ceux qui préfèrent ne pas ébruiter qu’ils sont actifs sur un site de rencontres. D’après le porte-parole du SPF Economie, les plaintes reçues portaient surtout sur des sites étrangers: ‘Elles dénonçaient les tarifs imprécis, le prolongement en catimini d’un abonnement et les faux profils.’
Des rares études sur les sites de rencontres, il apparaît que des clients peuvent également sérieusement mentir. Les rencontres en ligne forment un monde de petits mensonges pour apparaître sous un meilleur jour: les femmes préfèrent se rajeunir quelque peu, alors que les hommes se présentent avec quelques kilos en moins, dans l’espoir d’accroître leurs chances. Dans l’étude de l’université de Bamberg (voir graphique), 20 pour cent des visiteurs web indiquaient avoir été une fois trompés par une rencontre. 37 pour cent admettaient avoir été trompés plusieurs fois. Les femmes mentent le plus souvent sur leur poids (35%), leur photo de profil (30%) et leur âge (26%). Les hommes, par contre, mentent le plus souvent sur le type de relation qu’ils recherchent (45%), leur état civil (36%) et leur poids (38%).
Peter Menu connaît le phénomène, mais ne trouve pas cela très intelligent: ‘Pourquoi mentir? Au moment du rendez-vous, vous allez décevoir la personne en face de vous, s’il s’avère que vous n’êtes pas aussi séduisant ou jeune que ce que vous avez déclaré sur le site. Le mensonge n’est pas la meilleure façon de démarrer une relation, me semble-t-il.’
Que nous réserve l’avenir?
A l’instar des sites de rencontres qui s’emparent de parts de marché des agences matrimoniales, les sites internet payants devront toujours plus affronter la concurrence de sites gratuits et de nouveaux types de médias sociaux tels Tinder. Il s’agit là d’une appli gratuite reliée à un compte sur Facebook. Tinder est devenue incroyablement populaire en peu de temps avec déjà plus de 500 millions de membres au niveau mondial.
Selon certains, cela ressemble plus à un… service d’inspection sanitaire car une fois que vous êtes connecté, l’on vous soumet des photos d’autres membres qui habitent dans votre coin. Vous y trouvez une croix et un petit coeur. Si vous appuyez sur la croix, vous renoncez à ce membre, et l’on vous présente la photo suivante et ce, jusqu’à ce que vous pensez avoir trouvé la perle rare et que vous appuyez sur le petit coeur. Vous pouvez alors commencer à chatter et éventuellement à prévoir un rendez-vous.
Tinder est gratuite, mais l’entreprise en a récemment lancé une version payante – Tinder Plus – aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne pour toute personne de plus de 28 ans et souhaitant plus de services. Le prix est de quelque vingt euros par mois. Tinder Plus vous permet de récupérer les photos que vous avez refusées par mégarde et de rechercher un partenaire dans l’environnement de votre choix.
Mais le nouveau terme à la mode, ce sont les ‘applis portables’. Le site de rencontres américain Match.Com a lancé il y a peu la première appli de rencontres portable, qui peut être installée sur les montres intelligentes. Cette appli enregistre et analyse le genre de musique que vous téléchargez d’iTunes, quelle série vous regardez sur Netflix, ce que vous faites sur Facebook et ce que vous achetez sur internet. Quelques algorithmes créent alors votre profil. L’appli recherche ensuite un profil correspondant et émet une vibration, si cette personne se trouve dans votre environnement. Pour vous, il y a donc encore toujours et partout l’espoir de rencontrer tôt ou tard le/la partenaire de vos rêves car c’est finalement cet espoir qui fait tourner cette industrie…
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